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Sporting Charleroi: gagner et prier…

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Battu à Saint-Trond, dans un match qui ressemblait à une allégorie de sa saison, Charleroi voit le top 6 s’éloigner. Sans doute pour de bon.

Ballon du match entre les mains, puis glissé sous le maillot, Yohan Boli affiche un large sourire devant les médias rassemblés autour de lui au Stayen. Quelques minutes plus tôt et un étage plus bas, l’Ivoirien a signé un triplé qui rapproche Saint-Trond du top 6. Les Zèbres, eux, s’éloignent des play-offs 1 comme des micros. Avant l’arrivée de l’expérimenté Jérémy Perbet, c’est Ryota Morioka qui est envoyé au front pour distiller lentement quelques mots d’anglais, suivi par Victor Osimhen, révélation de la saison carolo.

Personne ne joue l’homme, mais tout le monde semble regarder vers l’arrière.  » On ne s’est pas facilité le match en encaissant ce but rapidement « , signale Perbet.  » Un joueur qui traverse toute votre défense après cinq minutes pour planter un but, c’est difficile à digérer à ce niveau.  »

Une nouvelle fois, Charleroi semble avoir oublié de faire sonner son réveil. Si la saison dernière, les Zèbres étaient les rois des débuts de rencontre, trouvant souvent la brèche dès leur premier tir au but, l’histoire semble leur offrir le revers de la médaille quelques mois plus tard.

Cette année, le Sporting carolo a encaissé à neuf reprises dans les vingt premières minutes du match, contre quatre fois seulement lors de l’exercice précédent. Le constat est identique au retour des vestiaires, avec cinq buts encaissés avant la cinquantième minute, ce qui n’était arrivé qu’une fois un an plus tôt.

Un problème d’efficacité

 » On a fait de bonnes choses au niveau du contenu. Mais notre saison, c’est l’histoire de deux rectangles. C’est vraiment le point noir de cette saison « , raconte devant la presse un Felice Mazzù qui donne l’impression d’avoir envie d’être le plus loin possible du Stayen. Pendant que Marc Brys raconte le sentiment de revanche qu’il a éveillé chez ses joueurs en ravivant le souvenir douloureux de la défaite au Mambour, le regard du coach carolo est ailleurs.

 » Cette saison, la moindre erreur se paie cash « , reprend Mazzù à l’heure des questions-réponses.  » Si je connaissais le problème d’efficacité, je l’aurais réglé.  » Dans le staff trudonnaire, certains glissent le début d’une réponse. Comme beaucoup d’adversaires, ils jugent que la défense est devenue le véritable point faible de Carolos qui avaient bâti leurs plus grands succès sur cette forteresse.

Les gens vont me prendre pour un fou, mais j’y crois toujours.  » Felice Mazzù

Les chiffres sont éloquents. Après 25 journées, les statistiques avancées démontrent que Charleroi a concédé des occasions qui auraient dû lui faire encaisser 28,54 buts. C’est ce qu’on appelle les expected goals, chaque occasion concédée étant créditée d’une valeur entre 0 et 1 en fonction de la probabilité qu’elle finisse au fond. Avec 35 buts encaissés au bout de ces 25 matches, les Zèbres étaient donc en sous-performance flagrante.

Seuls Eupen et Zulte Waregem, deux des trois pires défenses, présentent des sous-performances encore plus marquées. Après s’être habitués à trôner dans les hautes sphères du classement des meilleures défenses du championnat ces dernières saisons, les Carolos sont désormais à la huitième place de ce ranking particulier, devancés par les six premiers de Pro League ainsi que par Mouscron.

La déception Angella

Mazzù n’a pourtant pas relâché la pression. En semaine, quand un joueur prend la parole lors de la théorie vidéo pour défendre les ailiers en affirmant que leur tâche défensive n’est pas toujours aisée, le coach hausse le ton pour rappeler que c’est pourtant dans ce goût de l’effort partagé que le club a puisé ses plus grands succès des dernières saisons.

Les détails sont toujours relevés avec minutie. Le duel aérien trop timide de Ryota Morioka est pointé du doigt à la base du but concédé à Courtrai, et chacun se voit rappeler précisément sa mission dans l’opération défensive des Carolos. Nicolas Penneteau, devenu le véritable patron incontesté du vestiaire et du terrain depuis que Javier Martos a quitté le onze de base, se charge de secouer tout le groupe, donnant de la voix jusqu’à quelques secondes avant de fouler le synthétique de Saint-Trond. Visiblement pas assez pour éveiller son secteur défensif dès le coup d’envoi.

 » On avait bien réussi à contenir les mouvements de leur bloc « , continue Mazzù après la rencontre.  » Là où on a fauté, c’est plutôt dans le un-contre-un, peut-être dans les prises en charge. On doit être beaucoup plus stricts dans nos gestes défensifs.  »

Touché dans son orgueil par les ralentis du but encaissé à Courtrai, où son duel à la course face à Imoh Ezekiel était cruel de déséquilibre, Gabriele Angella fait partie des déceptions. Son arrivée en fin de mercato estival, sa culture défensive et ses premières prestations avaient suscité les louanges, et l’Italien semblait être la personne indiquée pour relayer un Martos qui paraissait parfois fatigué en défense centrale, mais le joueur prêté par l’Udinese n’a pas vraiment su enchaîner et s’ériger définitivement en patron du secteur.

Gagner et prier

Son manque de vitesse le rend fébrile face à des équipes qui, de plus en plus souvent, attendent Charleroi pour le poignarder dans le dos. Contre une défense dont l’élément le plus rapide est probablement Dorian Dessoleil, la tactique est souvent payante. Trop souvent pour permettre aux Zèbres de s’installer dans le top 6.

Certains, dans les travées du Mambour, ont même soumis à Mazzù l’idée d’un retour de Martos dans le onze, mais le coach a maintenu sa confiance en son défenseur italien, le seul à prendre des initiatives balle au pied face à une équipe de Saint-Trond pourtant mise en difficulté quand un membre de l’arrière-garde adverse s’infiltre avec le ballon.

 » Les gens vont me prendre pour un fou, mais j’y crois toujours « , conclut Felice Mazzù, à l’heure où les troisièmes play-offs 1 consécutifs semblent être devenus une utopie.  » Je n’abandonne pas, je ne veux pas dire que c’est fini « , abonde Ryota Morioka, suivi par un Victor Osimhen qui semble déjà plus fataliste en affirmant que  » tout peut arriver, on doit croiser les doigts.  »

On ne la fait pas à Jérémy Perbet. Le buteur français a trop d’expérience pour ça. L’ancien Taureau d’or s’oblige à garder le moral, même si le coeur ne semble pas y être quand il raconte que Charleroi  » se doit d’y croire, ne serait-ce que pour les supporters.  »

Gagner et prier. Un sprint final en forme de chemin de croix qui commence par la venue du leader au Mambour.

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