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Soulier d’Or : la passe de trois ?

Ce mercredi soir, un nouveau Soulier d’Or sera attribué. L’un des principaux candidats à la victoire est Hans Vanaken. Si le Limbourgeois l’emporte, ce sera le troisième succès d’affilée pour un joueur du Club Bruges. Autrefois, ceux-ci devaient plutôt applaudir les autres. Qu’y a-t-il de changé ?

Il existe des Souliers d’Or de toutes les pointures. C’est ce que l’on pourrait déduire en consultant la liste des vainqueurs. D’un côté, il y a les artistes, les adeptes du beau jeu : Praet, Hazard, Boussoufa, Degryse, Suárez, Zetterberg, Vercauteren, pour n’en citer que quelques-uns. Ou encore Van Himst, Rensenbrink, Coppens.

Vanaken est le De Bruyne du championnat de Belgique.  » Peter Verbeke, manager sportif de Gand

José Izquierdo, vainqueur en janvier 2017, peut également être classé dans cette catégorie. À son époque brugeoise, Joske était parfois insaisissable, capable de réaliser des éclairs de génie. Trossard et Danjuma sont également de ce type.

Une autre taille est plus appropriée pour les travailleurs, les adeptes de la régularité : souvent des défenseurs, parfois des joueurs d’entrejeu, sans oublier les gardiens de but (Pfaff, Piot, Boone, Preud’homme) : Simons, Staelens, Franky Van der Elst, et avant cela le regretté Lei Clijsters. Defour, Van Moer et Ruud Vormer, vainqueur en janvier 2018, peuvent aussi être répertoriés dans cette catégorie.

Les finisseurs constituent une dernière catégorie : Koller, Vandenbergh, Mbokani, Sonck, De Bilde, Ceulemans, Strupar. Des buteurs émérites qui étaient capables de bien jouer au football, mais surtout, qui décidaient de l’issue des matches.

À quelle catégorie appartiendra le vainqueur de cette année ? Un artiste (Trossard, Carcela) ou un homme qui associe la régularité à des bons pieds (genre Hans Vanaken). On peut aussi citer Pozuelo ou Malinovskyi qui, avec Berge (absent des terrains pendant une demi-saison), constituaient la force motrice du RC Genk.

La persévérance récompensée

Si Vanaken, qui a été champion avec le Club et a déjà été élu Footballeur Professionnel de l’Année par ses collègues, l’emporte, ce serait le troisième Soulier d’Or d’affilée pour Bruges. Et c’est exceptionnel, car entre janvier 1997, lorsque Franky Van der Elst a été sacré pour la deuxième fois, et janvier 2017, lors du couronnement d’Izquierdo, le Club n’a fêté qu’un seul lauréat : Timmy Simons en 2002.

Les autres années, le trophée est revenu à Anderlecht, au Standard, au RC Genk, à Gand et à Zulte Waregem. Qu’y a-t-il de changé aujourd’hui ?

Peter Verbeke, manager sportif des Buffalos :  » Ce n’est pas un hasard, c’est lié à la manière de travailler de Vincent (Mannaert, ndlr) et de Bart (Verhaeghe, ndlr). Les bonnes personnes à la bonne place, tant sur le plan sportif qu’extra-sportif. Le Club est devenu une machine et c’est la raison de son succès. Les quatre premières années n’ont peut-être pas été formidables, mais ils sont restés fidèles à leur vision et ont persévéré.

Les trophées sont individuels mais le succès est structurel. Lorsqu’on est deux fois champion en trois ans, on peut offrir quelque chose aux joueurs : la Ligue des Champions, un club de pointe en Belgique… C’est plus facile, dans ces conditions, de retenir ses meilleurs éléments.  »

Georges Leekens :  » Lorsqu’on est champion, le Soulier d’Or n’est jamais très loin, à plus forte raison lorsque l’on pratique du bon football. L’explication, pour le vide, doit être cherchée dans la période de transition que le Club a traversée, lorsqu’on a cherché l’équilibre à tous les niveaux. Tout ne rentre pas dans l’ordre immédiatement. D’autres équipes en font aussi la constatation, aujourd’hui. Beaucoup aimeraient brûler les étapes, mais ce n’est pas possible en football.  »

Une vision à long terme

Un entraîneur de D1A, qui préfère rester anonyme car il s’agit d’un concurrent :  » Ce n’est pas un hasard, car le Club Bruges a une vision à long terme et fait ainsi la différence. Que la concurrence, pour le trophée, puisse venir de Genk, n’est pas un hasard non plus. Là aussi, on sait ce que l’on fait.  »

 » Combien de temps le Club a-t-il dû attendre un titre ? Les deux choses sont liées « , estime Wesley Sonck.  » Ils ont rassemblé une bonne équipe, avec des joueurs étrangers qui ne coûtent pas les yeux de la tête et des Belges comme Hans qui ont très bien progressé.  »

Dans quelle catégorie doit-on placer Vanaken, si tant est qu’il remporte le trophée ? Verbeke :  » Pour moi, Hans est le De Bruyne du championnat de Belgique : quelqu’un qui voit des lignes de passe et de course que d’autres ne voient pas, ce qui se traduit aussi par un grand nombre d’assists et de buts, année après année. Il est très spécial.

On trouve beaucoup de bons ailiers, comme Izquierdo, et beaucoup de bons travailleurs, comme Vormer, mais Hans est unique. Il incarne la créativité à partir de l’intelligence, car il ne dribble pas beaucoup. Ce sont les joueurs les plus importants pour une équipe, car ce sont eux qui font la différence.  »

Leekens :  » Hans a eu besoin de temps pour devenir régulier et acquérir de la personnalité. Il est bon depuis un certain nombre d’années et, progressivement, il est passé du statut de bon footballeur à celui de joueur dominant. Hans est plutôt un artiste, qui a beaucoup évolué sur le plan mental. Il a perdu sa timidité.

Avant, il suffisait de pratiquer un marquage individuel sur Vanaken pour réduire son rendement, mais aujourd’hui, il a appris à se défaire de ce marquage. Son maniement de ballon laisse apparaître sa classe. J’aimerais, mais je parle en mon nom personnel, le voir tenter un jour sa chance en Allemagne, en Premier League ou en Italie.  »

Plus constant que Carcela

L’entraîneur anonyme :  » Si Hans devait l’emporter, je ne trouverais pas cela logique, car il n’a guère brillé en Ligue des Champions. Je trouve que Pozuelo, Malinovskyi, et même Berge, sont davantage des artistes. Avec Hans, je reste toujours un peu sur ma faim.

C’est un très bon footballeur, ne me comprenez pas mal. Mais à mes yeux, il ne retire pas encore le maximum de son potentiel. Pourquoi ? Je me le demande. Vormer réalise bien davantage dans cette même équipe, avec moins de moyens.  »

Sonck :  » Je suis la Ligue des Champions depuis cinq ans. Impossible, au sein d’une équipe belge, de briller à ce niveau. Il faut être d’un autre niveau, et je parle ici d’un Kane, d’un Ronaldo, d’un Messi… On peut se mettre en évidence sur une action individuelle, comme l’a fait Danjuma à l’Atlético Madrid, mais cela n’arrive qu’une fois.

Hans n’est pas du genre à réaliser des actions géniales, mais il conserve bien le ballon, il réfléchit et voit plus vite que les autres. C’est difficile de le classer dans une catégorie précise : il n’est ni l’artiste capable d’éclairs de génie, ni le footballeur qui preste toute l’année au même niveau.

Lui aussi connaît des hauts et des bas. Tout le monde a ses qualités propres, et lorqu’on convertit celles-ci en efficacité, on est dans le bon. C’est que ce parvient à faire Hans. Sur ce plan-là, il a réalisé de gros progrès, et il est devenu très important pour le Club. Sur toute l’année civile, Hans va peut-être l’emporter pour cette raison, mais je ne sais pas s’il terminera en tête lors de chaque tour.

Lors du premier tour, je pense que Carcela devrait émerger, car il a livré de grandes prestations et a fait la différence. Mais Hans ne devrait pas être très loin. Lors du deuxième tour, je trouve aussi que d’autres joueurs ont été meilleurs, mais encore une fois, Hans ne devrait pas être très loin. Alors, peut-être, sur toute l’année civile…  »

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