© BELGA - Virginie Lefour

Que cherchent les enquêteurs dans les deals de Mogi Bayat?

La plupart des documents saisis à Genk et à Charleroi concernent des transferts effectués par le roi du marché national.

Alors qu’il était l’un des rares clubs épargnés lors des précédentes perquisitions autour de l’Opération Mains Propres, le Sporting de Charleroi a reçu la visite des enquêteurs en ce chaud mercredi de juin. À la question de savoir pourquoi la police n’avait pas frappé aux portes du Pays Noir lors des vagues antérieures, Mehdi Bayat avait donné l’explication suivante: « C’est bien simple, nous n’avons jamais inclus Dejan Veljkovic dans nos transactions. » L’agent serbe aurait-il quitté le devant de la scène du dossier?

Chez les Zèbres, des documents concernant plusieurs transferts ont été saisis, notamment ceux des départs de Danijel Milicevic, Onur Kaya et David Pollet, envolés vers d’autres cieux au cours d’un mercato hivernal qui avait permis de relever les comptes du club.

À l’autre bout du pays, à Genk, ce sont les documents entourant les transferts de Sébastien Dewaest et Neeskens Kebano qui ont retenu l’attention des enquêteurs, selon la presse néerlandophone. Des joueurs alors arrivés de Charleroi, et emmenés jusqu’au Limbourg par Mogi Bayat, incontournable dans toutes les pièces dont la saisie a été dévoilée par les journaux de ce jeudi.

« On parle de commissions occultes sur quatre ou cinq transferts. »

De quoi confirmer la rumeur qui veut qu’après avoir fouillé les recoins du dossier consacré à Dejan Veljkovic, la justice est désormais penchée sur le cas de l’agent le plus puissant du marché national. Un dossier plus complexe, notamment parce que les écoutes téléphoniques étaient moins riches en informations que pour le Serbe, Mogi ayant l’habitude de passer par WhatsApp pour les conversations plus confidentielles. Une précaution qui complique évidemment le travail des enquêteurs, qui avaient pourtant saisi une quantité importante de documents et de pièces à conviction lors de leur perquisition au domicile de l’aîné des frères Bayat au matin du 10 octobre 2018, lors du coup de filet coordonné du Footgate.

Dans les documents saisis, les enquêteurs cherchent désormais des pistes pour confirmer les soupçons d’évasion fiscale envers l’agent franco-iranien. « On est tellement contrôlé, je ne vois pas comment on pourrait sortir du noir », s’était défendu son frère Mehdi dans les colonnes de Sport/Foot Magazine au bout de l’année 2018, à l’heure d’évoquer le blanchiment d’argent et la fraude fiscale qui avaient longtemps maintenu son aîné derrière les barreaux.

« On parle de commissions occultes sur quatre ou cinq transferts », ajoutait à l’époque Jean-Philippe Mayence, avocat de Mogi et grand supporter du Sporting dont il défend aussi les intérêts, dans Le Soir. Des pratiques illégales, menées avec des complices (l’avocat Laurent Denis et l’agent de joueurs Karim Mejjati avaient également été interpellés), qui ajoutent au dossier le chef d’accusation de participation à une association de malfaiteurs. Reste à savoir si les joueurs et les clubs concernés étaient au courant des malversations, voire en profitaient via un système de rétro-commissions.

Condamné en 2007 et interdit d’exercer le métier d’agent, Lucien D’Onofrio n’a pourtant jamais quitté le milieu.

La rumeur persistante doit être recoupée par des faits pour arriver jusqu’aux tribunaux. Si une forme de corruption est avérée (ce que d’aucuns suspectent via la fameuse histoire des boites de montres vides), les peines potentielles deviendraient plus graves.

Difficile, cependant, d’imaginer Mogi Bayat finir par faire de la prison ferme, chose de plus en plus rare pour de l’évasion fiscale, sauf quand celle-ci atteint des montants bien plus importants. Reconnu coupable de blanchiment d’argent en 2015, Lucien D’Onofrio a ainsi payé une transaction pénale de 1,5 million d’euros pour conserver sa liberté. Huit ans plus tôt, l’actuel vice-président de l’Antwerp avait été condamné par le tribunal d’Aix-en-Provence dans le cadre du dossier des transfert suspects effectués par l’OM entre 1997 et 1999. Il s’était alors vu retirer sa licence d’agent.

Comme lui, Mogi pourrait être frappé d’une interdiction d’exercer. Et comme lui, il pourrait malgré tout rester un acteur central du grand théâtre du football national.

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