© BELGAIMAGE

Pourquoi Perbet marque (presque) toujours dans les 15 dernières minutes

Pierre Danvoye
Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

Le Français marque tous ses buts, ou presque, dans les 15 dernières minutes. Voici pourquoi.

C’est le moment où tout a basculé pour les Zèbres. 7 avril, sur le coup de 21h46. Depuis une heure et demie, les Carolos cherchent leur football sur le terrain d’Eupen, après deux défaites pour commencer leurs play-offs 2. Subitement, dans les arrêts de jeu, Jérémy Perbet, monté 7 minutes plus tôt, offre la victoire à Charleroi. Un but à la Perbet, en renard des surfaces, en voleur de goals. Un tournant de la saison. Le début du parcours qui qualifiera les Carolos pour la finale.

Jérémy Perbet est l’homme des apparitions furtives cette saison. C’est assez rare qu’il joue plus d’une mi-temps. Il doit fréquemment se contenter de quelques minutes sur la pelouse en fin de match. Mais il fait le  » taf  » (voir encadré). Ce mercredi, Charleroi se rend à Courtrai pour la finale des play-offs 2. Un ancien club du buteur français. Il était là-bas la saison dernière et il avait à nouveau bien alimenté son compteur : 13 buts en 34 matches.

Courtrai est aussi une de ses victimes favorites depuis qu’il joue en Belgique : il a marqué 11 fois contre ce club. Il n’y a que contre Malines qu’il a fait mieux (13). Qu’est-ce qui fait toujours courir cet attaquant de 34 balais ?

 » Quand tu ne triches pas, les gens le voient  »

Au moment d’un match de ces PO2 entre Charleroi et le Beerschot, Stijn Vreven, l’entraîneur des Anversois, lâche :  » Je voudrais que mes joueurs affichent la même mentalité que Jérémy Perbet.  » Une parfaite illustration de la personnalité du buteur en série. Parce que Perbet est typiquement le footballeur qui s’accommode des choix de ses coaches, même quand ils ne lui sont pas favorables.

Il nous avait accordé une longue interview durant l’été 2018, juste après son retour à Charleroi. Il ne pouvait pas espérer un salaire semblable à celui qu’il avait dans son club la saison passée, Bruges. Pas grave, Perbet a trouvé un accord avec la direction carolo pour un contrat de trois ans. Un salaire annuel bien moindre qu’au Club, mais un salaire correct sur trois saisons, ça compensait.

A ce moment-là, il espérait recevoir beaucoup de temps de jeu. Mais très vite, il a compris que ça allait être impossible, vu l’éclosion de Victor Osimhen. A nouveau, Perbet a fait du Perbet. Il a accepté les choix. Et a su profiter du nombre limité de minutes qu’il passait sur le terrain. Un comportement à l’opposé d’un autre attaquant du noyau, Adama Niane. Lui, il a rué dans les brancards. Il s’est notamment pris la tête avec Mehdi Bayat.

Pourquoi Perbet marque (presque) toujours dans les 15 dernières minutes

Perbet comprend les choix de Felice Mazzù. Parfois, il a été obligé d’évoluer plus en retrait, toujours pour laisser Osimhen en pointe. Il l’a fait. Sans ronchonner. Un Perbet qui fait la mauvaise tête, ça n’existe pas. Sa dépense d’énergie est maximale dès qu’il est sur le terrain, c’est aussi pour ça qu’il a toujours eu un lien très fort avec les supporters de Charleroi.  » Quand tu ne triches pas, les gens le voient.  »

De tous les clubs belges par lesquels il est passé (Tubize, Lokeren, Mons, Gand, Bruges, Courtrai), c’est au Pays Noir qu’il s’est toujours senti le mieux. Y revenir cette saison pour un troisième séjour, y finir sa carrière, il en rêvait. Il nous l’avait confié la saison dernière, quand il était encore à Courtrai.

Mazzù vs les autres

Chez nous, Jérémy Perbet a travaillé avec des entraîneurs très durs, dont l’approche humaine n’est pas la première qualité. Il y a eu Peter Maes et Emilio Ferrera à Lokeren, Dennis van Wijk à Mons, Hein Vanhaezebrouck à Gand. La relation avec Maes et Vanhaezebrouck, surtout, n’était pas bonne. Mais il n’est jamais allé au clash.

Il nous explique comment il fait :  » Maes était très souvent dans l’exagération. Dans la tête, tu dois être très fort. Dans ses discours, Vanhaezebrouck n’est peut-être pas aussi imposant que lui mais il faut aussi être costaud pour travailler avec lui. On n’avait pas de dialogue. Mais je n’ai jamais voulu qu’il y ait une bagarre non plus.  »

Il aurait pourtant pu se rebeller. Par exemple quand le club, sur décision du coach, l’a prévenu par mail, la veille du départ en stage, vers 23 heures, qu’il devait rester en Belgique. Au lieu d’aller au clash, il atténue, encore une fois :  » Tu dois toujours pouvoir t’adapter à la personnalité et aux méthodes de ton coach.  »

Il aurait aussi pu se prendre le chou avec Ivan Leko. Le Croate a été son coéquipier à Lokeren, ils s’entendaient très bien. Avant la saison dernière, Leko l’appelle et lui dit qu’il a besoin de lui à Bruges, il lui rappelle qu’il adore sa mentalité. Mais finalement, il ne joue pas et il file en prêt à Courtrai après quelques semaines seulement. Il pourrait en vouloir à Leko.

Mais ce n’est pas le cas.  » Il débarquait à Bruges, il était jeune, il avait beaucoup de pression, il était jugé sur les résultats. Et à partir du moment où les autres attaquants marquaient des buts, pourquoi il aurait changé sa compo ? Il n’y a rien à redire, notre relation n’a pas souffert de tout ça.  »

Avec Mazzù, c’est comme s’il avait conclu un deal dès le moment où Osimhen s’est révélé. Jérémy Perbet l’a expliqué juste après avoir marqué son fameux but en avril dernier à Eupen.  » Même si je ne passe que quelques minutes sur le terrain, j’ai des bonnes chances de me créer une occasion de but. Mazzù le sait. Depuis que je suis pro, j’ai beaucoup joué.

Aujourd’hui, c’est différent. Dans une situation pareille, tu peux avoir deux réactions opposées. Soit tu en veux à tout le monde et tu baisses les bras. Soit tu acceptes la situation et tu montres que tu es, quand même, toujours là. J’ai choisi la deuxième solution. Et ça ne marche pas mal. « 

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire