© Koen Bauters

« On peut gagner sans être le meilleur, c’est ce qui fait la beauté du foot »

Matthias Stockmans
Matthias Stockmans Matthias Stockmans is redacteur van Sport/Voetbalmagazine.

Le foot, c’est de la passion. Pour les femmes aussi. A intervalles réguliers, nous donnons la parole à l’une d’entre elles, férue de sport. Cette semaine : Fabienne Van De Steene (48 ans), kinésiste chez les Red Flames depuis un quart de siècle.

« J’ai commencé en équipe nationale féminine au début des années 90 comme stagiaire. Le kiné était tombé malade et ils avaient besoin d’un remplaçant de toute urgence. A l’époque, on ne parlait pas encore des Red Flames. L’équipe nationale, c’était : un médecin, un kiné, un entraîneur et un team-manager. C’est tout. J’ai, par exemple, encore dû laver des chaussettes ( elle rit). Nous avons parcouru un long chemin. Aujourd’hui, l’encadrement, les stages et l’organisation sont de haut niveau.

Au départ, j’étais peu concernée par le football. Je pratiquais l’athlétisme. Mais j’ai directement été enthousiasmée par la dynamique d’un sport collectif. Moi-même, je suis une très mauvaise joueuse de foot. Il m’est déjà arrivé d’être applaudie par une Red Flame parce que je parvenais à contrôler un ballon ( elle rit). Vu mon passé universitaire, je m’en tenais à des traitements qui ont déjà fait leurs preuves. Mais lorsqu’une des Flames me parlait d’une thérapie que je ne connaissais pas, j’essayais d’approfondir le sujet. Dans cette optique, il est intéressant de voir de plus en plus de joueuses internationales partir à l’étranger. Mais tout n’est pas toujours parfait ailleurs. En Belgique, nous avons aussi un bon niveau, je le constate de plus en plus. Je suis parfois irritée par l’attitude de gourou de certains kinésistes, et particulièrement en football : si x le dit, cela doit être vrai. Alors que les kinésistes y ou z peuvent avoir un avis tout aussi valable.  »

Des blessures différentes

 » Les femmes ont des blessures différentes de celles des hommes. Les hommes développent plus de puissance, et mettent dès lors davantage leurs ischiojambiers à contribution, alors que les femmes se blessent davantage aux ligaments croisés des genoux. A titre préventif, avec les femmes, on travaille plus les croisés antérieurs : la stabilité et les techniques de réception au sol. Je n’ai pas encore traité un Diable Rouge. En revanche, autrefois, je me suis occupée de Josip Weber et de Glen De Boeck, qui m’ont rendu visite à mon cabinet. Des chouettes contacts. Dans l’ensemble, je trouve que les sportifs de haut niveau sont très reconnaissants.

J’apprécie énormément des joueuses comme Julie Biesmans ou Tessa Wullaert, qui recherchent la beauté du geste. » – Fabienne Van De Steene

Tomber enceinte n’est pas nécessairement néfaste pour une carrière footballistique. Après avoir accouché, le corps d’une femme devient plus élastique – sauf en cas de césarienne – et cela lui procure un avantage. D’une manière générale, on voit que des athlètes féminines de haut niveau réalisent souvent de meilleures prestations après avoir accouché.

Leurs hormones sont boostées Ce qui peut avoir une influence négative, par contre, c’est une période d’inactivité. Curieusement, on en parle peu dans un vestiaire. En tout cas, à ma connaissance.  »

La chair de poule

 » Avoir loupé la Coupe du monde en France est une énorme déception pour les Red Flames, car le Championnat d’Europe 2017 avait été une expérience fantastique. Un moment enrichissant dans notre évolution : lorsqu’on reste ensemble pendant trois semaines, on se rend compte de l’influence que peut avoir l’individu sur une dynamique de groupe. Ou l’inverse.

C’était aussi magnifique de constater la manière dont l’approche d’un tel tournoi peut accroître la concentration chez les joueuses : tout le monde a fait le maximum pour être au meilleur de sa forme. Le grand public nous a découvert au Championnat d’Europe. Je me souviens très bien de l’entraînement qui a suivi notre victoire contre la Norvège : il y avait tellement de monde ! Des gens avaient pris congé spécialement pour venir nous voir aux Pays-Bas. A donner la chair de poule.

De jeunes générations douées se profilent à l’horizon. Le toucher de balle et la technique se sont beaucoup améliorés chez les filles. Pourtant, ce n’est pas une garantie de résultats. C’est précisément ce qui fait le charme du football : des chevaux de trait peuvent battre des pur-sang. On peut aussi gagner sans être le meilleur.

En même temps, il faut veiller à ne pas dénigrer des joueuses naturellement douées parce qu’elles fournissent moins d’efforts. J’apprécie énormément des joueuses comme Julie Biesmans ou Tessa Wullaert, qui recherchent la beauté du geste. J’aime les joueuses qui n’ont pas besoin d’être roublardes pour survivre.  »

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