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Les oubliées du Soulier d’or féminin

Aurelie Herman
Aurelie Herman Journaliste pour Sport/Foot Magazine

Le cinquième Soulier d’or féminin sera lui aussi décerné à sa lauréate ce mercredi soir. Avec un top 5 quasi trusté par les joueuses d’Anderlecht. Et pourtant…

Laura Deloose, Tine De Caigny, Tessa Wullaert, Kassie Missipo : toutes les quatre figurent parmi les cinq dernières joueuses en piste pour se chausser d’or ce soir. Et toutes les quatre portent le maillot d’Anderlecht cette saison. Seule gagnante potentielle ne faisant pas partie du noyau de Patrick Wachel ? Janice Cayman, vainqueure d’un triplé Coupe de France-championnat-Ligue des Champions avec l’Olympique lyonnais (contrairement à l’édition masculine, les Belges évoluant à l’étranger entrent aussi en ligne de compte), mais condamnée à évoluer dans l’ombre de l’Australienne Ellie Carpenter et de la Française Delphine Cascarino, titulaires sur le flanc droit des Fenottes.

Composé d’un panel de 118 personnes, le jury était censé établir son classement parmi dix noms établis à l’avance (voir plus bas). Une pré-liste composée de dix Red Flames seulement, qui ne laisse donc aucune chance à une joueuse comme Sanne Schoenemakers, meilleure buteuse néerlandaise du Standard avec onze caramels, de se mêler à la course au trophée. Et les exemples sont nombreux, comme notre confrère Maryan Mahieu le soulignait dernièrement sur le site vrouwenvoetbal.be.

Loin des yeux, loin du coeur

Flame ou pas, le jury n’a pas retenu non plus le nom de Davina Philtjens, infatigable back gauche, débarquée il y a six mois à Sassuolo, dans son top 5. Étonnant, quand on sait que les Neroverde réalisent une très belle saison, avec une troisième place derrière le duo AC Milan-Juventus (triple championne en titre) dans le Calcio féminin. Avec son abattage, son expérience et sa régularité, l’internationale n’aurait pas fait tache, elle qui évolue depuis près de trois ans dans un championnat beaucoup plus professionnel que le nôtre, classé dixième au coefficient UEFA, tout en ayant bloqué son couloir gauche en sélection.

Pas de trace non plus de sa coéquipière en club Diede Lemey (qui porte Davina ci-dessus), y compris dans la liste de départ. Troisième gardienne en équipe nationale derrière Justien Odeurs (Anderlecht) et Nicky Evrard (Gent Ladies), la joueuse de 24 ans est pourtant titulaire indiscutable entre les perches de l’équipe lombarde. Débarquée en Italie en 2017, après plusieurs saisons au RSCA, la native de Tielt (Flandre occidentale) brille d’abord sous les maillots de Vérone, de l’Atalanta, avant de rejoindre Sassuolo en 2019. Un club où elle se plaît, sans pour autant monter dans la hiérarchie belge. « J’adorerais montrer ce que je peux faire dans un grand tournoi. J’attends, je travaille et j’espère. C’est le staff qui décide, et le coach qui choisit », déclarait-elle récemment dans Het Laatste Nieuws.

Dans le même ordre d’idée, l’absence dans ce Final 5 de Justine Vanhaevermaet surprend également. Moins médiatique, la milieu de terrain défensive des Red Flames est devenue une vraie cadre de l’équipe nationale durant l’été 2019. Un statut qu’elle a conservé grâce à des prestations de bonne facture sous le maillot de LSK Kvinner, où elle évolue depuis la fin de l’année 2019. Finaliste de la Coupe de Norvège en décembre dernier (le championnat norvégien s’est disputé de juillet à décembre) et qualifiée pour les huitièmes de finale de la Ligue des Champions avec l’équipe de Lillestrom, la numéro 10 d’Ives Serneels a seulement été freinée par une blessure au poignet en tout début de saison 2020.

Pas de Julie Biesmans non plus, malgré son statut de titulaire au PSV, éliminé par Barcelone en seizièmes de finale de Ligue des Champions, mais calé dans le sillage de l’Ajax en Eredivisie. Outre en club, l’arrière centrale est une taulière de l’équipe nationale, où elle verouille l’axe défensif aux côtés de l’Anderlechtoise Laura De Neve. Toujours aux Pays-Bas, Elena Dhont aurait peut-être elle aussi pu prétendre à une place dans les cinq premières, malgré des débuts compliqués chez nos voisins. Las, l’attaquante, arrivée durant le lockdown à Twente en provenance de Gand, s’est cassé la rotule mi-novembre. D’autant plus râlant que la Gantoise commençait à monter en puissance, tant en club qu’en équipe nationale, avec une solide prestation contre la Suisse en septembre, ainsi que trois titularisations et trois buts inscrits en autant de journées sous le maillot de son nouveau club, avant d’être stoppée nette. Opérée dans la foulée de sa blessure, Dhont poursuit actuellement sa revalidation. Rendez-vous en janvier 2022?

Wullaert pour un carré

Voir les Mauves obtenir un maximum de votes n’est pas non plus totalement illogique. Le Sporting domine la Super League de la tête et des épaules (dix victoires sur dix, 61 buts inscrits, seulement deux encaissés). Côté joueuses, De Caigny est en train de prendre une nouvelle dimension après avoir été replacée en attaque (meilleure buteuse des qualifs pour l’EURO avec douze réalisations, une quinzaine en championnat), Missipo poursuit sa progression au poste de numéro 6, avec un passage réussi de Gand à Anderlecht cet été, dans la foulée de son diplôme de com’. Quant à Deloose, son énorme travail sur le côté droit de la défense n’est sans doute pas encore estimé à sa juste valeur, tant elle se montre précieuse dans les offensives bruxelloises et chez les Red Flames. Mais ce top 5 souligne en tout cas la difficulté de suivre les championnats étrangers, faute de médiatisation suffisante.

Tessa Wullaert est favorite à sa propre succession.
Tessa Wullaert est favorite à sa propre succession.© BELGA (LEFOUR-DIEFFEMBACQ)

Et comme chez les messieurs, ce sont souvent les statistiques qui font la différence. Or, à ce petit jeu, la patronne incontestée reste Tessa Wullaert. Avec ses 24 buts et 18 passes décisives, la capitaine des Red Flames a un pied dans quasi 70% des buts inscrits par Anderlecht. Un ratio fou, à relativiser tant il était évident que la Super League se révélerait rapidement trop petite pour la joueuse de 27 ans, qui débarquait à Neerpede essentiellement pour des raisons familiales, à l’issue de son contrat de deux ans à Manchester City. Et alors que des pourparlers s’étaient noués avec l’Atlético, l’un des deux géants espagnols, avec le Barça.

Il n’empêche, la meilleure joueuse de Belgique reste bel et bien Wullaert, dont l’influence durant les qualifications pour l’EURO 2022 (huit buts et treize assists, joueuse la plus décisive de ces éliminatoires) s’ajoute à ses stats un peu folles en championnat. Difficile de voir qui pourrait l’empêcher de gratter une quatrième godasse en cinq ans, la troisième d’affilée. Ça commence à prendre de la place dans le dressing…

La liste des dix nommées*

– Julie Biesmans (PSV, NED)

– Janice Cayman (Lyon, FRA)**

– Tine De Caigny (Anderlecht)

– Laura Deloose (Anderlecht)

– Laura De Neve (Anderlecht)

– Elena Dhont (Twente, NED)

– Kassandra Missipo (Anderlecht)

– Davina Philtjens (Sassuolo, ITA)

– Justine Vanhaevermaet (LSK Kvinner, NOR)

– Tessa Wullaert (Anderlecht)

* Par ordre alphabétique

** En gras, les cinq joueuses restantes

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