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Le dessert tactique #3: la micro-tactique de l’Union et un KVO sauce Mourinho

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Retour en cinq temps sur les observations tactiques du week-end sur les pelouses de Pro League.

Le Standard protège-t-il assez sa défense ?

Difficile, en voyant l’égalisation de Kerim Mrabti, de ne pas penser au dernier but concédé par les Rouches sur la pelouse de Sclessin, signé du pied de Bas Dost une semaine plus tôt. Dans les deux cas, la défense liégeoise est démantelée par une passe trop facilement déposée entre son arrière central et son latéral gauche. Une zone de plus en plus ciblée par les clubs qui dessinent méticuleusement leurs offensives, parce qu’elle oblige les défenseurs à pivoter rapidement et à se replier vers le but dans une course-poursuite forcément démarrée en retard.

S’il y a certainement à redire sur la coordination des mouvements de cette charnière où Kostas Laifis et Noé Dussenne semblent toujours vouloir jouer les pompiers dès qu’ils aperçoivent une étincelle, le problème nait aussi de la facilité qu’ont les milieux offensifs adverses pour adresser ces ballons tranchants. Très impliqués à l’autre bout du terrain, avec des déplacements qui les amènent à explorer la largeur dans tous ses recoins, Aron Donnum et Mathieu Cafaro sont souvent en retard pour refermer les couloirs, où Nicolas Raskin et Merveille Bokadi doivent alors combler les brèches, ouvrant inévitablement un peu les portes de l’axe quand ils tentent d’éviter les courants d’air sur les côtés. La progression adverse devient trop libre, et Laifis et Dussenne n’ont ni l’orientation du corps, ni la puissance athlétique pour dégainer l’extincteur à temps comme Ameen Al-Dakhil avait pu le faire quelques fois contre Eupen.

Il y a souvent le feu devant la défense du Standard, et Noé Dussenne n'est pas le plus fiable des pompiers
Il y a souvent le feu devant la défense du Standard, et Noé Dussenne n’est pas le plus fiable des pompiers© BELGA – Bruno Fahy

Comment l’Union défend son territoire mieux que personne ?

En matière de gestion défensive, c’est l’Union qui donne la leçon. S’il n’est jamais passé pour le plus grand des stratèges offensifs malgré des Saint-Gillois qui remettent la sentence en question, Felice Mazzù n’a pas son pareil pour transformer les idées adverses en champ de bataille. Une gestion micro-tactique qui explique sans doute que les Unionistes ont, pour la quinzième fois de la saison, réduit les opportunités de leur adversaire à moins d’un expected goal (0,47 pour Anderlecht, pourtant l’équipe la plus prolifique en la matière cette saison).

Le profil défensif de Bart Nieuwkoop se mariait à merveille avec la force du flanc gauche anderlechtois, dans un match où le flanc droit de chaque équipe dégoulinait de prudence : Bogdan Mykhaylichenko pour freiner Loïc Lapoussin d’un côté, Nieuwkoop, Ismaël Kandouss et le milieu de l’Union de l’autre, pour enfermer Lior Refaelov à l’intérieur sans laisser d’espace démesuré aux courses de Sergio Gomez. Au coup de sifflet final, l’Espagnol n’avait réussi qu’un seul centre, enfermé dans les tiroirs de la défense coulissante de Mazzù, alors que le Soulier d’or israélien n’a jamais émergé entre les lignes.

Pourquoi Eder Balanta est passé de remplaçant à sentinelle ?

Le contraste saute aux yeux. Lors des cinq premières mi-temps disputées par le Club d’Alfred Schreuder, Eder Balanta n’a eu droit qu’à 4% du temps de jeu. Neuf minutes démultipliées depuis que Casper Nielsen a profité des boulevards offerts une mi-temps durant par un Ruud Vormer dépassé comme une trottinette égarée sur la bande du milieu d’une autoroute allemande. Là, le coach néerlandais a compris qu’il avait besoin d’un agent de circulation. Les trois dernières mi-temps jouées par les Blauw en Zwart ont offert 92% de temps de jeu à l’aboyeur colombien.

Référence nationale dans l’art de bloquer une contre-attaque, Balanta est un atout précieux pour une équipe qui veut s’installer autour de la surface contre des adversaires qui n’attendent qu’une imprécision pour la contrer. Sur les pelouses belges, personne ne tutoie ses 12,5 duels défensifs disputés par match. Surtout, il ne s’arrête jamais de défendre quand le ballon est entre lui et son propre but. Indispensable pour faire la loi devant une défense à trois.

Le retour du Sergent Balanta
Le retour du Sergent Balanta© belga

Le KVO a-t-il trouvé la clé face au pressing du Cercle ?

En voyant les Côtiers arroser la pelouse brugeoise de longs ballons, impossible de ne pas penser à José Mourinho affrontant l’énergique Ajax de Peter Bosz en finale de l’Europa League au printemps 2017. Le Special One avait alors demandé à Chris Smalling de balancer le plus loin possible, et de préférence près du front de Marouane Fellaini, le moindre ballon qui passait par ses pieds. Avec une sentence simple, passée à la postérité : « Si le ballon n’est pas là, qui vont-ils presser ? »

Comme il paraît qu’on n’apprend pas aux vieux singes à faire des grimaces, Ostende n’est pas tombé dans le piège qu’il avait pris l’habitude de tendre à ses adversaires la saison dernière. Les Kustboys ont joué long plus d’une passe sur cinq (20,26% de passes longues), bien au-delà de leur moyenne (14,9%) et ont privé le Cercle de ces récupérations dans des zones dangereuses qui lui permettent de mettre le feu au camp adverse. Aidés par un Guillaume Hubert en verve, les visiteurs ont gardé le zéro, et même gratté les trois points grâce à un coup de patte exceptionnel de Maxime D’Arpino.

Pourquoi Javier Torrente est-il retourné aux sources offensives du Beerschot ?

Parce que Tarik Tissoudali n’a jamais vraiment été remplacé, difficile de revoir au Kiel le Beerschot spectaculaire d’Hernan Losada. Dans les chiffres, pourtant, les Rats sont retournés vers un football bien plus ouvert, après que Will Still, Peter Maes puis Javier Torrente ont commencé par verrouiller le terrain pour prendre des points. Visiblement moins convaincu par cette approche, le coach argentin s’est retourné vers l’offensive, disposant même ses troupes en 3-4-1-2 pour un partage haut en émotions face à Zulte Waregem, histoire d’offrir un maximum de solutions au bout des passes de Raphael Holzhauser, désigné homme providentiel dans la course au maintien.

Offensivement, les Anversois sont plus dangereux que jamais cette saison, avec une moyenne de 1,48 expected goal par rencontre en janvier, contre 1,19 par match jusqu’à la fin du mois de décembre. Le problème, c’est que le secteur n’a ni le talent, ni la réussite de l’ère Losada malgré un total de huit buts qui fait des Rats l’équipe la plus prolifique depuis la reprise. Surtout, l’addition est lourde à l’autre bout du terrain : de 1,70 xG concédé par rencontre, le Beerschot est passé à 2,72. Et affiche la pire défense de l’élite en 2022.

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