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La Pro League, reine de l’intensité ? « Ici, beaucoup d’équipes veulent presser »

Dans son dernier rapport, le CIES place la Pro League à la troisième place des championnats les plus ouverts d’Europe. Que cela signifie-t-il vraiment et quelle importance y accorder ? Décryptage d’une compétition plus exigeante qu’on ne le dit.

Le championnat belge est reconnu par beaucoup comme une compétition tremplin vers des horizons plus prestigieux. Parmi les raisons les plus souvent invoquées, on retrouve son niveau de jeu intermédiaire, derrière le big five, et son emplacement stratégique au centre de l’Europe, idéal pour attirer les scouts des plus gros clubs européens environnants. Et si le football belge oubliait de se vendre en sous-estimant la Pro League ? En croisant les statistiques du nombre d’occasions créées et de temps de jeu effectif, le CIES a classé notre championnat à la troisième place des ligues les plus ouvertes. De quoi redorer sa réputation, entachée par les polémiques successives ?

Devant la Premier League

Avec en moyenne 11,3 occasions par rencontre et 60,47 minutes où le ballon était effectivement en jeu, notre compétition est seulement devancée par la Bundesliga et l’Eredivisie. Elle se classe ainsi loin devant la Premier League ou la Liga, pourtant réputées assez ouvertes. Quelques places plus bas, on retrouve la France et ses deux championnats majeurs, la Ligue 1 et la Ligue 2. La différence est-elle si criante pour autant ? C’est la question que nous avons posée à Jean-Louis Garcia. Après 378 matches sur les bancs de touche français, il est depuis un mois l’entraîneur de Seraing. De quoi déjà noter quelques spécificités de notre compétition : « En terme d’intensité, la différence avec la Ligue 2 n’est pas si évidente. Ce qui me frappe, c’est que les lignes sont plus étirées en Belgique, cela créé plus d’espaces et de facto plus de courses à effectuer« .

Plus qu’un championnat où l’on se crée des occasions, la Pro League est donc aussi une compétition où l’on court beaucoup. Sur base des chiffres de la saison dernière, elle est même la sixième ligue européenne en termes de distance parcourue durant un match et de courses à haute intensité. Ce qui amène Jean-Louis Garcia à pointer une autre caractéristique : « Je constate qu’il y a beaucoup d’équipes qui ont la volonté de presser haut leur adversaire. Cela explique le nombre élevé d’occasions si le pressing marche mais aussi lorsqu’il est contourné car l’équipe est alors en danger derrière« .

La tendance ne semble pas près de s’essouffler avec l’arrivée d’entraîneurs de l’école allemande, adeptes du pressing haut et du jeu rythmé, comme Bernd Storck, Stefan Krämer (jusqu’il y a quelques heures), l’Autrichien Dominik Thalhammer et dans une moindre mesure Bernd Hollerbach. Un contingent auquel il faut ajouter son plus illustre représentant, Alexander Blessin, parti répandre jusqu’en Serie A ses idées de football agressif expérimentées sur nos pelouses. Il est seulement le deuxième coach allemand de l’histoire à se voir ouvrir les portes du championnat italien. La Pro League est donc bien un acteur de l’exportation de la philosophie très en vogue du gegenpressing. Malgré le départ de Blessin, notre pays est, hors Allemagne, celui qui abrite le plus de coaches teutons (trois, jusqu’au départ de Krämer), à égalité avec la Suisse et l’Angleterre, où trois clubs du top (Liverpool, Chelsea et Manchester United) sont dirigés par des tacticiens allemands.

« Ce qui me frappe, c’est que les lignes sont plus étirées en Belgique, cela créé plus d’espaces et de facto plus de courses à effectuer », explique Jean-Louis Garcia, entraîneur de Seraing.© iStock

Un argument de vente

En additionnant ces paramètres de course, de pressing et d’occasions créées, on obtient un cocktail qui fait de la Pro League un championnat où le rythme est élevé. Cela offre aux joueurs qui en émergent chaque semaine une certaine garantie pour leurs futures expériences. Dans le top 15 des plus grosses ventes de joueurs de Jupiler Pro League, seul Wesley n’a pas réussi à s’imposer à l’étranger, au milieu des Ndidi, Oshimen, Fellaini, Tielemans et autres Jonathan David. Jean-Louis Garcia confirme : « C’est un argument de poids, un indice que le joueur peut rééditer ses performances dans une compétition du top mais cela ne fait pas tout non plus. Tous les championnats ne font pas appel aux mêmes qualités, on ne sait pas prévoir de façon certaine si une recrue saura s’y conformer« .

Alors au milieu de tous ces championnats aux cultures footballistiques différentes, quelle importance accorder à l’intensité du jeu ? Le coach de Seraing nuance : « C’est évidemment un facteur à prendre en compte mais ce n’est pas le seul. Globalement, les indices pour estimer le niveau d’un championnat restent les résultats en Coupe d’Europe et les performances des joueurs qui en sont transférés« . Des indicateurs qui, appliqués à l’échelle belge, sont en permanente contradiction, tant notre football continue de fournir les grands championnats européens mercato après mercato mais tremble pour son indice UEFA.

Tel est le lot des championnats tremplins dont la fin de cycle des meilleures équipes se situe en général à mi-chemin entre une saison pleine en championnat et la présence en Coupe d’Europe qui en découle. On est intense ou on ne l’est pas. La Pro League l’est jusque dans ses bureaux. Pour le meilleur et pour le pire.

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