Pierre Danvoye

« L’émotion ne peut pas excuser tous les excès »

Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

On a repensé à François Sterchele ce week-end. Et pas seulement parce ça pleurait à Bruges.

Les minutes d’applaudissement, les t-shirts avec son numéro, les gerbes, les tifos in memoriam, les autres hommages… on a apprécié récemment les derniers adieux du foot belge à Grégory Mertens. Il n’y a pas qu’à Lokeren qu’on s’est souvenu de ce jeune terrassé par une panne de coeur. Très bien.

On a aussi aimé, ce week-end, au Kiel, l’organisation d’une cérémonie du souvenir pour Tim Nicot, le joueur du Beerschot décédé dans les mêmes circonstances. Mais pas tout ! Les fleurs (dont celles déposées par des supporters de l’Antwerp, c’est sûrement ça le geste de fair-play du week-end), les discours de ses proches (son frère :  » Je te donnerais le trophée du meilleur footballeur, le trophée du meilleur danseur en sous-vêtements sur les tables, même le trophée du pire idiot « ), la haie d’honneur formée par des jeunes du club, les longs applaudissements au son de You’ll never walk alone, c’était parfait. Par contre, l’urne (mauve !) avec ses cendres qui a longé le terrain dans une espèce de voiture de cirque, ça c’était un peu too much, un peu cheap. Applaudir, chanter, être en pensées avec la famille et les coéquipiers, ok. Mais amener des cendres dans un stade, non, là on a du mal à suivre.

Des applaudissements, des fleurs, des discours, des chants, de l’émotion… très bien. Des cendres dans un stade, dans une urne flashy et sur une voiture de cirque… ça ne passe pas.

Et donc, on a repensé à François Sterchele. On vient de fêter le septième anniversaire de son décès. En voyant des larmes dans le stade du Beerschot où il avait buté, on a pensé à lui. Et aussi en observant les scènes de joueurs et supporters inconsolables à Bruges, dimanche, après la défaite contre Gand. Synonyme de dernières illusions de titre envolées. Sur la même pelouse, en 2008, il y avait eu un hommage magnifique à Sterchele. On se souvient tous de cette immense bâche sur laquelle il était représenté, de joueurs en pleurs avant un match, dont un Jonathan Blondel qui semblait le plus inconsolable. C’était poignant mais c’était vrai, naturel. Non, cette urne mauve, ça ne passe toujours pas… L’émotion ne peut pas excuser tous les excès. Elle ne peut pas justifier le voyeurisme. Quelle sera la prochaine étape ? Une dépouille qui fera le tour des tribunes ?

Pour en revenir à Sterchele… Il est toujours là, dans les esprits, et pas seulement au travers de cette 23e minute de jeu pendant laquelle les supporters de Bruges continuent à l’applaudir. Il est toujours là, aussi, via la Sterchele Cup, un tournoi pour jeunes dont l’édition 2015 se tiendra à la fin du mois. Ça, c’est un hommage, un vrai. Pur, sain, sans tralalas. Rest in peace, Grégory, Tim, François. Mais sobrement.

Des applaudissements, des fleurs, des discours, des chants, de l’émotion… très bien. Des cendres dans un stade, dans une urne flashy et sur une voiture de cirque… ça ne passe pas.

Par Pierre Danvoye

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