Jacques Sys

L’aptitude à penser en termes collectifs fait partie de l’ADN du Club Bruges

Jacques Sys Jacques Sys, rédacteur en chef de Sport/Foot Magazine.

Michel Preud’homme est enfin parvenu à stimuler l’esprit de groupe et à faire travailler des techniciens tels que Victor Vazquez et Lior Refaelov au profit de l’équipe.

Combien de fois n’a-t-on pas encensé la solidarité et l’amitié sur lesquelles le Club Bruges s’appuie ? Durant son histoire plus que séculaire, ces deux concepts ont été portés haut par des personnalités très fortes, au point que même durant la période la plus mémorable des Bleu et Noir, dans le courant des années ’70, elles s’étaient adressées au légendaire entraîneur, Ernst Happel, qui, après une lourde défaite 6-1 à Anderlecht, avait décidé de pratiquer le marquage individuel. Les joueurs n’étaient pas d’accord et après une certaine résistance, l’Autrichien avait fini par céder.

Il n’y a jamais eu de place pour les footballeurs qui se prenaient pour des vedettes au Club Bruges

Il n’y a jamais eu de place pour les footballeurs qui se prenaient pour des vedettes au Club : le groupe les corrigeait, les remettait à leur place. C’est grâce à cette mentalité qu’un entraîneur comme Henk Houwaart, très peu porté sur la discipline, est resté cinq ans à Bruges et y a connu le succès. Quand il le fallait, les joueurs remettaient tout simplement de l’ordre eux-mêmes.

Le virus de l’individualisme a contaminé le football depuis longtemps. Le Club Bruges en a fait l’amère expérience aussi. L’été dernier, s’il fallait bel et bien renforcer l’équipe, il était aussi nécessaire de prendre congé des joueurs qui, malgré leur talent, perturbaient la vie du groupe.

L’aptitude à penser en termes collectifs fait partie de l’ADN du Club Bruges, qui a accompli d’énormes progrès de ce point de vue durant ce championnat. Le mérite en revient à Michel Preud’homme. Après de longs tâtonnements, il est parvenu à stimuler l’esprit de groupe et à faire travailler des techniciens tels que Victor Vazquez et Lior Refaelov au profit de l’équipe. Le Club est ressuscité: plus de caprices, plus d’égocentrisme mais un bloc de granit qui, dimanche dernier, au Standard, a affiché suffisamment de force mentale pour muer un retard de 1-0 en victoire, même si, en deuxième mi-temps, le jeu brugeois a été trop brouillon et a pu donner l’impression de laisser revenir les Liégeois. Un brillant Mathew Ryan a alors maintenu l’équipe dans le match, comme il l’a déjà fait à plusieurs reprises ces dernières semaines, après un début de saison un peu hésitant.

La série de succès du Club est, comme les bons résultats de Genk, en contraste avec un championnat très capricieux. Il y a dix jours, Mouscron a balayé Anderlecht mais samedi dernier, il ne s’est pas forgé une occasion sur le terrain du Cercle. Son entraîneur, Rachid Chihab, a ensuite parlé d’un manque de stabilité, un écho qu’on entend dans de nombreux clubs.

Ces brusques fluctuations de performances sont manifestes. Si Anderlecht a tenu des mots durs après son revers à Mouscron, le Standard ne parvient pas à se ressaisir, hormis un bref sursaut. Il y a aussi le Sporting Charleroi, qui brille et qui frémit, Westerlo qui tente désespérément d’endiguer sa chute libre, Ostende qui semble fatigué, Lokeren qui manque de fraîcheur, Malines qui change de visage selon qu’il joue à domicile ou en déplacement, ou encore le Lierse et le Cercle, qui oscillent entre espoir et désespoir.

C’est ainsi que cette année civile s’achève, sous les lumières féeriques de Noël. Dimanche, le Gala du Sport nous a rappelé un été footballistique mémorable. Les trophées de Thibaut Courtois, Marc Wilmots, Divock Origi et des Diables Rouges soulignent à quel point 2014 a été une année exceptionnelle, même si l’euphorie s’est déjà quelque peu dissipée.

Il sera plus difficile de confirmer. Avec un Marc Wilmots qui joue les invincibles mais perçoit le doute autour de lui, avec des adversaires qui tissent un réseau de plus en plus serré face aux qualités de l’équipe nationale. Courtois est au-dessus de la mêlée. A Chelsea, il poursuit sur la lancée du Mondial et il affiche sa forte personnalité en dehors du terrain aussi, comme quand, à l’issue du match amical des Diables Rouges face à l’Islande, il avait émis des remarques sur la mentalité d’une série de joueurs. Il n’a pas dû modérer ses propos par la suite. Si quelqu’un a le droit de parler, c’est bien Thibaut Courtois.

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