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Jaques: « Il faudra attendre longtemps avant de voir une femme coacher en D1 masculine »

Aurelie Herman
Aurelie Herman Journaliste pour Sport/Foot Magazine

Treize ans après ses débuts contre… la Suisse, la défenseuse (32 ans, 97 caps) a décidé d’arrêter en sélection après la qualif’ pour l’EURO validée face à la Nati.

1 N’as-tu pas l’impression de louper la meilleure partie?

Oui, mais cette qualification était aussi une belle façon de terminer cette aventure. Évidemment, ce n’est pas la même chose sans public, mais c’était une décision mûrement réfléchie, que j’ai prise par rapport à mes genoux. Ce n’était plus possible parce que c’était trop de pression pour mon corps. Je voulais voir l’Angleterre, mais rationnellement, si je pensais à ma santé, c’était la meilleure chose à faire.

2 Outre ton rôle de défenseuse à La Gantoise, tu te diriges vers le coaching. Ton rôle sur le terrain, à l’arrière, et celui de « grande soeur » que tu occupais dans le vestiaire des Red Flames peuvent-ils t’aider?

Oui, sans doute. Mais pour être une bonne coach, je dois surtout acquérir plus d’expérience sur le banc. Là, j’ai le diplôme UEFA A. J’entraîne déjà des U15 féminines à Gand et un soir par semaine, je coache des garçons U15 et U17 à Knokke. Avec eux, il faut se montrer plus dure, exiger plus de discipline. Car ils vont oublier les consignes plus rapidement que les filles. C’est intéressant de cumuler ces expériences. Ce que je préfère, c’est quand un joueur ou une joueuse prend en compte ce qu’on lui dit et progresse, grandit. Quant à ma position plus reculée sur le pré, je dirais que c’est un avantage, car tu as toujours le jeu devant toi. Mais c’est un avantage à court terme. Une milieu ou une attaquante peut aussi réussir dans ce domaine.

En tant que femme, on se demandera toujours si on est assez forte ou si on a les compétences pour ce boulot.

Heleen Jaques

3 Quelle est ton ambition, à terme?

Je vois grand, mais je ne veux pas aller trop vite. Je pense qu’il faudra attendre encore pas mal d’années pour voir une femme coacher en D1 masculine. En tant que femme, il faut plus se battre pour sa place. On se demandera toujours si on est assez forte ou si on a les compétences pour ce boulot. Serons-nous prêtes à « affronter » les hommes, car ils peuvent parfois être plus durs verbalement. Il faut clairement être costaude pour ça. Aussi, c’est un métier qui te plonge dans une incertitude constante, et pas qu’en tant que femme. Regarde Gand, qui a déjà viré son troisième coach depuis le début de la saison… C’est un job instable, je dois donc vraiment peser le pour et le contre de ce que je veux vraiment pour les prochaines années.

4 En attendant, tu n’es pas encore à la retraite! Tu as encore un championnat à terminer.

C’est mon prochain objectif: finir la saison avec Gand, et après, je déciderai si je continue un an de plus ou si j’arrête. Là encore, ça sera à voir en fonction de mes genoux. Je savais depuis l’âge de vingt ans que j’avais un souci à ce niveau-là et qu’ils décideraient pour moi. Et là, ça se rapproche ( rires). La Super League a vraiment changé de visage depuis mon retour d’Italie cet été. C’est clairement une bonne chose d’être passé de six à dix clubs, histoire d’avoir plus de matches de bon niveau à jouer. La différence reste grande avec Anderlecht. Mais je suis optimiste, car il y a de nouvelles équipes qui gagnent en maturité, on doit en faire plus pour grandir. C’est aussi super qu’ Eleven diffuse les rencontres, que les médias s’y intéressent plus. La qualification pour l’EURO est aussi très importante dans cette optique de croissance. On peut encore aller plus loin, mais les choses bougent dans le bon sens.

5 Et au niveau de l’équipe nationale, quel regard portes-tu sur son évolution, toi qui as entamé ta carrière internationale en 2007?

J’ai surtout vu à quel point le staff a grandi, comment les infrastructures se sont améliorées, comment on a découvert de plus en plus de bonnes joueuses, élargi le panel. Maintenant, le sélectionneur a des difficultés à former un groupe. Aussi parce qu’il y a plus de footballeuses et d’équipes de bon niveau. C’est avec les Red Flames que j’ai vécu le plus beau moment de ma carrière: la victoire contre la Norvège d’Ada Hegerberg à l’EURO 2017, devant tous nos supporters. C’est là que j’ai atteint mon meilleur niveau.

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