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Genk: la joyeuse entrée de Felice Mazzù

Le champion sortant n’a pas raté son départ sous la houlette de son nouvel entraîneur, Felice Mazzù. Grâce aux buts de deux nouvelles recrues, Benjamin Nygren et Ianis Hagi, et aux prestations de quelques joueurs que l’on pensait sur le départ.

Samedi 20 juillet. Il est près de minuit lorsque Sander Berge apparaît enfin dans la  » zone mixte « , l’aire où les journalistes peuvent rencontrer les joueurs. Une heure plus tôt, il a remporté la Supercoupe avec le KRC Genk. Les médias ont très envie de lui demander si ce deuxième trophée avec le club limbourgeois – après le titre de champion conquis en fin de saison dernière – sera aussi son dernier. Et, le cas échéant, quelle sera sa prochaine destination.

Une question logique. Il y a un an, Genk craignait déjà de perdre son milieu de terrain norvégien lors du mercato estival. Berge envisageait également de quitter le navire, mais plus les matches s’enchaînaient, et plus la fin du mercato approchait, moins il avait envie d’aller voir si l’herbe n’était pas plus verte ailleurs. Car il se rendait compte qu’il y avait beaucoup de qualité sur le terrain, que les joueurs avaient faim et que la mentalité était irréprochable.

En mai, après le titre, la direction a annoncé que certains joueurs (Berge, Ally Samatta, Leandro Trossard) pouvaient partir en cas d’offre intéressante. Sander Berge n’a pas prolongé le bail de location de son appartement, ce qui sous-entendait qu’il n’avait pas l’intention de prolonger son séjour dans le Limbourg.

Au retour de vacances, il s’est cependant présenté à l’entraînement, et est parti loger chez Joakim Maehle, qui a le même âge que lui et avec qui il s’entend bien.  » En échange, je dois faire tous les jours la cuisine pour lui « , rigole Berge.

Toujours la même question

Lors de la Supercoupe, le Norvégien a été omniprésent et le meilleur homme sur le terrain, avec le nouveau capitaine Sébastien Dewaest, qui a marqué deux buts. Chaque fois que le rythme baissait, et qu’il ne trouvait pas d’équipier libre à qui céder le ballon, il perforait lui-même les lignes adverses, ballon au pied. Il dribblait un ou deux adversaires, qui tentaient de le déséquilibrer, mais qui se retrouvaient eux-mêmes au sol, sans que Berge ne les ait touchés. Uniquement par ses feintes de corps.

Des ooh et des aah descendaient des tribunes, y compris de la tribune de presse. Le joueur que l’on voyait, ce n’était pas un joueur obligé de rester à contrecoeur, mais un joueur enthousiaste qui posait sa candidature pour le prochain Soulier d’Or. Tout le monde s’est alors demandé si un troisième trophée, sous le maillot limbourgeois, n’était tout de même pas envisageable pour pour Sander Berge.

Celui-ci a éludé les questions concernant son avenir immédiat aussi facilement qu’il avait déstabilisé les milieux de terrain malinois sur la pelouse.  » Cela fait deux ans que l’on me pose la même question, depuis mon arrivée en fait, et aujourd’hui on me la pose encore, alors que je suis toujours là. Le club sait ce que je veux, et je sais ce que le club veut.  »

Et s’il n’y a pas de transfert au bout du compte ?  » Alors, je prendrai mes responsabilités. Jouer la Ligue des Champions, c’est le rêve de tout footballeur.  » Une semaine plus tôt, pendant le stage de préparation à Horst, dans le nord du Limbourg, à une heure de route de Genk, l’espoir de voir Berge rester malgré tout chez les champions de Belgique a commencé à prendre forme. Car il aurait refusé une offre d’un club de Premier League (Sheffield United).

L’homme à neutraliser

 » C’est simple « , affirme le directeur technique Dimitri de Condé.  » Il y a des offres pour Sander, mais il n’a pas envie de se retrouver dans un club qui va lutter pour son maintien en Premier League. Sander n’a pas encore reçu de proposition qui pourrait lui apparaître supérieure à une expérience en Ligue des Champions avec Genk. Si cette proposition devait arriver malgré tout, et qu’elle correspond à nos attentes sur le plan financier, nous le libérerions de ses obligations, mais dans ce cas-là, nous ne le remplacerions pas. Et si cette proposition n’arrive pas, il franchirait un cap supplémentaire ici, en tant que leader sur le terrain, y compris en Ligue des Champions. À son âge, ce sont deux expériences qui méritent d’être vécues. N’oubliez pas que Sander n’a pas encore 22 ans.  »

Ally Samatta a repris le collier avec le Racing. L'avenir dira s'il y est en transit ou non.
Ally Samatta a repris le collier avec le Racing. L’avenir dira s’il y est en transit ou non.© belgaimage

Samedi, contre Courtrai en ouverture du championnat, Berge ne s’est pas infiltré avec autant de facilité dans les lignes adverses qu’il ne l’avait fait contre Malines. Il a directement pu se rendre compte que, désormais, il était devenu l’homme à neutraliser. La saison dernière, c’était le cas d’ Alejandro Pozuelo, de Ruslan Malinovskyi et de Leandro Trossard. Aujourd’hui c’est son tour.

Lorsque notre  » Spécial Compétition  » est sorti dans les kiosques, la semaine dernière, certains ont froncé les sourcils à Genk. Ce guide du championnat était bien le plus épais, mais le plus complet ? On n’y trouvait, en effet, aucune trace d’ Ally Samatta, le meilleur buteur de la Jupiler Pro League.

La sélection, pour ce guide, avait été faite une semaine plus tôt. Sur les 33 joueurs qui figuraient alors dans le noyau limbourgeois, cinq ne pouvaient pas être repris dans le magazine, faute de place. Il a fallu faire un choix. Le club était lui-même parti du principe de s’en tenir à un noyau de 24 joueurs de champ, plus les gardiens de but. Mais on ne savait pas encore qui allait être prêté, et qui allait rester. On se doutait simplement que le jeune Dante Vanzeir, à la recherche de temps de jeu, serait prêté.

Toujours la banane

Ally Samatta venait de rentrer d’une brève période de vacances, après avoir disputé la Coupe d’Afrique des Nations. À ce moment-là, tout le monde, dans le Limbourg, était convaincu que Samatta partirait. Cela lui avait d’ailleurs été promis, en cas d’offre intéressante.

Mais, la semaine dernière, les responsables du club limbourgeois ont senti que le Tanzanien n’était pas aussi pressé de partir qu’on pouvait le supposer.  » Dans le cas d’Ally, je n’ai pas l’impression que, si transfert il devait y avoir, celui-ci soit imminent « , a déclaré De Condé après les premières discussions qu’il a eues avec lui, à son retour.

 » Il n’a jamais dit : je veux partir à tout prix. Pour l’instant, il a toujours la banane et n’arrête pas de poser des questions sur la Ligue des Champions. Ally ne rêve que d’une seule destination : l’Angleterre. Nous lui souhaitons tous un bon transfert en Premier League. Si celui-ci ne se concrétise pas, nous verrons ce qu’il en sera des autres propositions.  »

Si cette proposition émanant de la Premier League se fait attendre, c’est en partie à cause du pays d’origine de Samatta. Contrairement à la Belgique, toutes les nationalités ne sont pas les bienvenues en Angleterre. Seuls les joueurs de l’Union Européenne peuvent revendiquer, du moins jusqu’au Brexit, un accès direct au championnat le plus riche et le plus médiatisé du monde.

Les autres doivent avoir joué au moins deux tiers des matches de leur équipe nationale au cours des deux dernières années. Du moins, pour les pays figurant en haut du ranking FIFA, comme c’est le cas pour Berge : la Norvège figure en 50e position. La Tanzanie, en revanche, ne figure qu’en 137e position, et les joueurs émanant de ces pays-là ne sont acceptés que s’ils obtiennent un salaire très élevé, gage de leur valeur sportive. Ou après approbation d’une commission spéciale qui délibère sur la valeur du joueur.

Trois attaquants compétitifs

Si Samatta devait partir, il serait remplacé par un, voire deux joueurs, assure De Condé :  » Nous voulons avoir trois attaquants compétitifs, en ce compris Ally ou son remplaçant.  » En attendant un transfert éventuel, le buteur figurait, tout comme en Supercoupe une semaine plus tôt, au coup d’envoi du match d’ouverture du championnat. Cela en dit long sur la mentalité du Tanzanien.

Samatta, qui a été éliminé dès le premier tour en Coupe d’Afrique des Nations, ne s’est accordé que 12 jours de congé, avant de revenir à Genk, dans le but de retrouver le rythme le plus rapidement possible. Samedi, il était déjà plus présent dans le jeu qu’une semaine plus tôt. Incisif, quelques fois dangereux devant le but, mais surtout animé d’une folle envie de bien faire.

Au coup d’envoi du championnat, Genk a déjà vendu 17.500 abonnements. L’an passé, à cette même période, ils n’étaient que 15.200 abonnés. Mais en 2013-14, le chiffre se montait encore à 18.000. Une explication à cela : les prix avaient été revus à la baisse suite à la fermeture de Ford Genk.

Ces chiffres démontrent la confiance qu’ont les supporters dans la nouvelle équipe, même s’il faut aussi chercher la raison dans la priorité accordée aux abonnés pour l’achat de tickets pour la Champions League, où Genk doit s’attendre à accueillir l’un ou l’autre ténor.

Au début du match, une certaine grogne était perceptible lorsqu’une action échouait. Mais, au fur et à mesure que l’équipe locale a pris l’initiative, l’ambiance est devenue plus enthousiaste. Le tournant du match s’est situé lors de la montée au jeu de Ianis Hagi, le fils de l’ancienne légende roumaine, qui a marqué sur sa première touche de balle.

La tête sur les épaules

Du coup, la pression qui pesait sur les épaules du jeune milieu de terrain s’est quelque peu relâchée. Les dirigeants de Genk se faisaient quelques soucis à cet égard, car l’attente était énorme. Selon des sources roumaines, son transfert aurait été réalisé sur base de huit millions d’euros. Mais finalement, le transfert de Ianis Hagi aurait été conclu sur base de quatre millions d’euros, soit la moitié du montant annoncé en Roumanie.

Si Viitorul Constanta avait privilégié l’offre la plus intéressante sur le plan financier, le club de Gheorghe Hagi et Gica Popescu aurait sans doute cédé l’international Espoir roumain ailleurs qu’à Genk.

 » Le joueur a opté pour le projet sportif qui lui a été présenté chez nous « , confirme le directeur technique De Condé, qui avait déjà pris contact avec Hagi Sr en novembre, à propos de Ianis. Le transfert ne s’est pas concrétisé tout de suite parce qu’à ce moment-là, le club limbourgeois pouvait encore compter sur Pozuelo et Malinovskyi à cette position.

Lorsque Hagi Sr et Giga Popescu se sont déplacés en personne à Genk, un peu plus tard, De Condé ne s’accordait pas beaucoup de chances de conclure le transfert. Il craignait que les deux anciennes gloires du football roumain ne posent des exigences que Genk n’aurait pas été en mesure de satisfaire, et qu’ils opteraient pour un club européen plus prestigieux. Mais 24 heures plus tard, Genk a tout de même réussi son coup. Grâce au joueur lui-même, insiste De Condé.

 » L’humilité de Ianis s’est révélée prépondérante dans ce dossier. C’est un garçon qui a la tête sur les épaules, qui ne veut pas se voir dicter une ligne de conduite par d’autres, et qui veut se faire un prénom. Ianis sait très bien ce qu’il veut. Et il ne veut pas commettre l’erreur de brûler une nouvelle fois les étapes.  »

À 15 ans, Hagi Jr était parti à la Fiorentina, mais en deux ans, il n’a joué que deux matches avec l’équipe A.  » En Serie A, on n’a pas l’habitude de faire jouer des gamins de 16 ou 17 ans. Et lorsqu’un garçon de cet âge part à Manchester ou Barcelone, c’est avec un autre projet en tête qu’ici.  »

Fidélité au 4-3-3

Dans le onze de base aligné par Felice Mazzù au coup d’envoi du premier match de championnat de la nouvelle saison, figuraient pas moins de huit joueurs déjà présents la saison dernière. Et le système de jeu appliqué était le même que celui de son prédécesseur : 4-3-3. Il aurait même pu y avoir neuf joueurs de l’an passé, si l’ancien entraîneur de Charleroi avait opté pour le Colombien Jhon Lucumi, l’un des piliers de la fin de saison dernière. Mais Lucumi, qui est revenu très tard après avoir disputé la Copa América, est resté sur la touche. Son compatriote Carlos Cuesta, nouvel arrivé et qui a laissé une bonne impression durant la préparation, lui a été préféré.

Genk a conservé ses automatismes, avec toujours Ally Samatta en pointe et Sander Berge un peu plus près de la défense que l’an passé. Sur le flanc gauche, Benson Manuel, titularisé en l’absence de Théo Bongonda blessé, n’a pas encore été en mesure de réaliser les actions dont Leandro Trossard gratifiait le public. Benjamin Nygren, le seul véritable nouveau avec Cuesta dans l’équipe de base, est encore à la recherche de certains automatismes mais a tout de même réussi à marquer pour sa première apparition officielle avec Genk, tout comme l’autre nouveau venu, Ianis Hagi entré au jeu en fin de match.

Ce bon début de championnat apporte un certain crédit à Mazzù, lui qui doit faire ses preuves aux yeux des supporters et du monde extérieur. Ce crédit, il l’avait déjà reçu de la part du club, pour son approche chaleureuse. Le fait que l’entraîneur entend conserver ce qui fonctionnait bien, témoigne d’une évolution et pas d’une révolution. Il préfère aussi se tenir en retrait, et attribuer plutôt les mérites à son prédécesseur et aux joueurs. En agissant de la sorte, il s’assure aussi un certain capital sympathie.

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