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Foot du dimanche: Seraing à la conquête de son glorieux passé

L’histoire du RFC Seraing ressemble à tout sauf à un long fleuve tranquille, mais après avoir connu de grandes difficultés, le club semble prêt à renouer avec ses plus belles heures.

Ces dernières semaines, le RFC Seraing est passé par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Refus des licences professionnelle et amateur dans un premier temps. Passage éclair devant la CBAS ensuite. Et finalement, sauf retournement de situation, une montée en D1B pour remplacer Roulers qui n’a pas obtenu sa licence pour la Proximus League. Pourtant, du côté de Mario Franchi, le président du club, il n’y a jamais eu l’ombre d’un doute: « C’était impossible pour nous de ne pas avoir notre licence. On nous a vraiment embêté pour des broutilles. La preuve, nous ne sommes restés que cinq minutes devant les membres de la CBAS. Nous sommes un club sain et il n’y a aucun doute là-dessus. »

D’autant que les résultats du club cette saison étaient plus que corrects. Seraing occupait la troisième place de D1 amateurs avant l’arrêt des compétitions. Soit son meilleur résultat depuis sa bascule en 2016. Un résultat obtenu en grande partie grâce à la nomination d’Emilio Ferrera comme entraîneur accompagné par Marc Grosjean, de retour au bercail.

Pour le nouveau T1, il n’y a donc pas de raison de considérer la montée de Seraing comme illogique: « Je pense que la montée en D1B est méritée. Le club est bien structuré, il y a un historique avec la D1 et on était troisième, donc je ne pense pas qu’on soit illégitime. D’autres équipes en ont déjà profité par le passé. »

L’histoire des Métallos est faite de remontées fantastiques et de descentes aux Enfers.

Le RFC Seraing est en effet un club historique de notre plat pays. Pensionnaires de D1 dans les années 80 et 90, les Métallos ont même eu rendez-vous avec l’Europe. Le club a vu passer des joueurs à la carrière bien fournie comme Wamberto, Nico Claesen, Juan Carlos Oblitas ou encore Edmilson et Roger Lukaku, respectivement paternels d’Edmilson Jr et de Romelu Lukaku.

Malgré cela, à chaque fois que le club semble atteindre les sommets, la chute l’attend de l’autre côté. Encore en Promotion A (quatrième division) en 1978, le RFC Sérésien atteint la D1 en 1982. Une remontée incroyable qui connaît un fameux coup d’arrêt en 1984. Le club est alors déclaré en faillite.

Une dizaine d’années plus tard, l’histoire se répète. Pour son retour dans l’élite lors de la saison 93/94, Seraing épate et décroche une inespérée troisième place. Alors qu’il disputera la coupe d’Europe, le RFC Sérésien change de nom pour devenir le RFC Seraing. Une appellation qui ne fera pas long feu. En 1996, le Matricule 17 disparaît. Le club est aspiré par le rival du Standard de Liège à la suite d’une pseudo fusion décidée par le président de l’époque Gérald Blaton. Le Matricule 23 de la Royale Union Liégeoise prend alors sa place et déménage du côté du Stade du Pairay. Le club prend le nom de RFC Seraing-RUL. Seraing revit. En 2006, il retrouve même ses couleurs et son nom de l’époque, le RFC Sérésien, suite au retour d’anciennes gloires comme Marc Grosjean, Marinko Rupcic et Peter Kerremans.

L'ancien adjoint du Standard a pris les rênes du club sérésien cette saison.
L’ancien adjoint du Standard a pris les rênes du club sérésien cette saison.© belga

Le retour du RFC Seraing

C’est en 2013 que le président actuel Mario Franchi débarque du côté du Pairay. Il reprend le club en compagnie de Bernard Serin, président du FC Metz. « Le club se trouve à l’époque en première Provinciale et est en faillite. Il nous faut donc redresser le club et l’année suivante, nous rachetons le matricule de Boussu-Dour qui nous permet d’évoluer en deuxième division », retrace Mario Franchi.

Le Matricule 167 déménage donc en terres liégeoises pour devenir Seraing United. La première saison est un succès puisque les Rouge et Noir finissent quatrièmes. En 2015, après de longues batailles judicaires, le club change de nom et redevient le RFC Seraing. Mais il n’y a pas qu’au niveau du nom club qu’il y a des changements. Le football belge est également modifié en profondeur et la D2 devient la D1B, réduisant de la sorte le nombre de clubs professionnels, puisque cette Proximus League passera de 17 clubs à … huit à la suite de la saison 2015/16.

Onzième de D2 lors de la saison qui précède la réforme de la Proximus League, Seraing échoue à six petits points du top 8.

C’est lors de cette saison que Maxime Mignon débarque entre les perches sérésiennes en provenance d’Houtain, un club de P2. « Didillon venait de quitter le club et ils cherchaient un gardien d’expérience, donc ils m’ont pris comme numéro deux. Mais je joue les quatre premiers matchs de la saison avant l’arrivée d’Anthony M’fa en provenance de Metz. Passer de la P2 à la D2, c’était assez incroyable », retrace le portier. La saison n’est pas catastrophique pour les Métallos, mais avec la réforme des compétions, les places sont comptées et le RFC Seraing termine onzième, à seulement six points du maintien.

Le White Star, champion sur le terrain n’obtient pas sa licence et c’est finalement … Roulers qui obtient la dernière place pour la D1B. Le hasard étant parfois étrange, Seraing rejoindra sans doute la D1B la saison prochaine car Roulers n’a pas reçu sa licence pour la saison 2020-2021 de D1B. Mais à l’époque, la bascule est difficile à digérer. « Ça a été compliqué pour nous d’accepter le fait qu’on ait 44 points et qu’on se retrouve en D1 amateurs au lieu de poursuivre avec les huit meilleurs clubs. Je pense que le plus dur, ça a surtout été pour les jeunes de Seraing qui se retrouvaient sans adversaire à leur taille », se souvient Maxime Mignon.

Le stade du Pairay, antre du RFC Seraing
Le stade du Pairay, antre du RFC Seraing© belga

Le poids de l’histoire

Et ce n’est que le début des problèmes pour Seraing, au cours d’une année 2016 à oublier. La FIFA sanctionne le club pour non-respect des règles concernant la Third Person Ownership en ayant vendu une partie des droits économiques de plusieurs joueurs à une tierce partie, le Fonds Doyen Sport. Une pratique interdite depuis 2014. En résulte une période de trois mercatos sans pouvoir affilier de joueur, assortie d’une amende de 136.000€. Une sanction qui a surtout affecté l’école des jeunes selon Mario Franchi: « L’affaire n’est pas encore close puisque nous irons devant la cour Européenne. Pour la FIFA, un manager, un agent peut prendre 10% sur un joueur, mais pas une société, nous ne sommes pas d’accord avec ça. La sanction a empêché près de 200 jeunes de pouvoir jouer. »

Abandonner ne fait pas partie de la mentalité du club. A côté de cela, la solidarité est également un des piliers. En cette période de covid-19, le groupe de supporters « Les Rouge et Noir » a récolté la somme de 16.543€ en faveur du centre hospitalier Bois de l’Abbaye. Pour ce faire, ils ont organisé une vente aux enchères sur les réseaux sociaux composée de divers objets donnés par d’anciennes gloires, mais aussi des joueurs actuels. Et lors de cette collecte de fonds, le gardien Maxime Mignon s’est fait remarquer. Il a offert son maillot dédicacé aux enchères et, avec l’aide de sa famille et d’amis, a rapporté 1500€ à la cagnotte en remportant la mise alors que l’offre la plus haute montait à 300€.

« À Seraing, il y a vraiment le goût du beau football. Et avec l’historique du club en D1, on ne peut pas y faire n’importe quoi. »

Un geste grandement salué par les supporters. Ceux-là même qui font pour le numéro 22 partie intégrante de l’identité du club: « Je crois que le mot qui ressort le plus quand on parle de Seraing, c’est la passion, la ferveur. » De la ferveur, mais aussi du jeu, comme le représentait à l’époque le trident brésilien de Seraing composé de Wamberto, Edmilson et Isaias. « Seraing c’est un football pétillant, attrayant et c’est un club sympathique. Il y a vraiment le goût du beau football. Et avec l’historique du club en D1, on ne peut pas y faire n’importe quoi », souligne Emilio Ferrera.

Mais cette histoire peut s’avérer être un poids car lorsqu’on a touché les sommets, il est difficile de les contempler d’en-bas. Et ça, le président Franchi en est bien conscient: « Les supporters parlent du passé. Ils ont même vécu la coupe d’Europe, donc fatalement il y a d’immenses souvenirs à Seraing. Tout le monde espère revivre ces bons moments. Notre public aime le beau football et ils n’attendent que ça. » Une pression qui ne touche pas que le président. « Quand je vois ce que disent les gens qui suivent Seraing depuis le début, les parents, les grands-parents, c’est assez fort. Mon agent Peter Kerremans a fait partie de la grande époque du club et il m’en parle souvent, donc c’est sûr qu’on le ressent et on est heureux pour eux de retrouver la D1B », assure Maxime Mignon.

Les couleurs du club s'affichent jusqu'à la façade du stade
Les couleurs du club s’affichent jusqu’à la façade du stade© belga

Une collaboration saine

Et pour retrouver les sommets, les Métallos peuvent compter sur un soutien de poids depuis quelques années, celui du FC Metz. Même si cette année, le noyau sérésien ne compte qu’un joueur Grenat (Raouf Mroivili), la collaboration se passe bien pour Emilio Ferrera: « Je me suis rendu là-bas, ils m’ont expliqué leur projet et la collaboration est très saine. On est vraiment maître de notre destin et ils ne nous imposent jamais un joueur. Il y a toujours des discussions quant à l’intérêt d’avoir tel ou tel joueur en prêt ou non. »

Des prêts entrants qui amènent de la qualité supplémentaire au noyau, mais aussi la possibilité pour les meilleurs éléments sérésiens de rejoindre un club de Ligue 1. « Il y a une bonne cohésion entre les deux présidents, Bernard Serin et Mario Franchi. Metz nous prête des joueurs, mais à l’inverse, un joueur comme Sami Lahssaini a pu intégrer le noyau messin. Un club qui reste en Ligue 1, c’est intéressant pour les jeunes qui viennent chez nous », analyse Maxime Mignon.

« On ne désespère pas d’encore grimper d’un échelon »

Avec l’aide des Messins et la probable montée en D1B, Seraing peut penser sereinement au futur. Avec les souvenirs du passé, il est tout à fait légitime de rêver d’un retour dans l’élite et même si Mario Franchi ne se fixe pas de limite, il reste les pieds sur terre: « L’objectif en D1B sera évidemment de se maintenir puisque ce sera notre première saison à cette étage, mais on espère aller le plus haut possible et on ne désespère pas d’encore grimper d’un échelon. »

Du côté des joueurs, la donne est la même, mais avec le côté compétiteur en plus comme l’explique Maxime Mignon: « La direction va fixer les objectifs, mais je pense qu’en tant que joueur quand on nous met dans une série, on fait tout pour passer à celle au-dessus. Honnêtement si je peux monter je le ferai et je pense que tous les joueurs pensent pareil. » Et en cas de montée, le derby liégeois promet des étincelles. « On est heureux de retrouver la D1B et de montrer que Seraing est un club de l’entité liégeoise et qu’il n’y a pas que le Standard », lance le portier sérésien.

La montée de Seraing en D1B ne serait pas sportive et ferait office de petit coup du destin, mais serait aussi une sorte de pied de nez à la descente du club en D1 amateurs suite à la réforme des championnats. Dans tous les cas, elle permettrait à des Métallos qui ont connu l’enfer de se rapprocher du paradis.

Par Jérôme Jordens (st.)

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