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« En élargissant l’Euro à 24 pays, l’UEFA dévalorise son propre tournoi »

Matthias Stockmans
Matthias Stockmans Matthias Stockmans is redacteur van Sport/Voetbalmagazine.

Jacques Sys, rédacteur en chef de Sport/Footmagazine, répond à nos questions sur la peur de Marc Wilmots, l’hooliganisme à l’Euro et le manque de tension dans la phase de groupes de l’Euro.

Des hooligans russes et anglais se sont violemment bagarrés à Marseille. L’UEFA menace d’exclure les deux pays en cas de nouveaux incidents. Une menace justifiée ou qui ne résoudra rien ?

Jacques Sys: C’est un peu extrême d’exclure un pays à cause du comportement de ses supporters. Où met-on les limites ? Après le match Allemagne-Ukraine, il y a eu quelques échauffourées à Lille. En outre, les troubles plus violents entre les Anglais et les Russes ont eu lieu dans la zone très surveillée du port de Marseille. On peut donc se demander si les forces de l’ordre françaises ne sont pas intervenues trop tard. Exclure une équipe sur base du hooliganisme d’une minorité, car c’est de cela qu’il s’agit, peut aussi créer un précédent dangereux. Ce genre de hooligans – qui vient uniquement pour se bagarrer, le foot ne les intéresse pas – cherchent l’attention. Bien entendu, la Russie et l’Angleterre traînent une certaine réputation dans ce domaine, et on ne peut rester les bras croisés. Les troubles laissent entrevoir ce qui nous attend dans deux ans au Mondial en Russie. Même si là, comme au Brésil, on prendra des mesures draconiennes pour éviter ce genre de situation.

C’est surtout très dommage. Ce tournoi est placé sous le signe d’un traumatisme à surmonter collectivement et certains supporters trouvent qu’il faut gâcher la fête. Je reconnais que cela me laisse pantois.

Pour la première fois, l’Euro est joué à 24 pays, ce qui nous permet de voir jouer des équipes comme l’Irlande du Nord et de l’Albanie. Cependant, leurs matchs d’ouverture n’étaient pas très spectaculaires. Un Euro avec 24 pays est-il charmant ou superflu ?

Encore avant le début de cet Euro, j’étais contre l’élargissement. Les matchs où les équipes dépassent à peine la ligne de milieu manquent de charme. L’UEFA dévalorise son propre tournoi, car pour rendre un produit populaire, il faut du bon football et des matchs captivants. Des équipes comme l’Irlande du Nord baissent le niveau et je crois que cela n’a jamais été le but. En outre, on supprime presque toute la tension du premier tour. Autrefois, quand il y avait seize participants, il y a avait toujours au moins un grand pays éliminé dans la phase de groupes. Aujourd’hui, tout est beaucoup plus prévisible, il n’est pas difficile de prévoir qui ne passera et qui pas. Bref, cet Euro à 24 est une mauvaise idée.

Ce soir, les Diables Rouges jouent leur premier match de l’Euro contre l’Italie. Qu’est-ce qui vous frappe à quelques heures de la rencontre?

Le calme et la sérénité autour de l’équipe. Peu d’incidents, peu de rumeurs négatives. Ils se sont bien entraînés, ils sont tous en forme et motivés. Mais il y a aussi un sentiment de doute. Comment les Belges joueront-ils contre l’Italie ? Presque tout le monde espère que la Belgique annoncera enfin la couleur et que cette génération talentueuse de Diables rouges jouera un football dominant et offensif.

Cependant, Marc Wilmots semble vouloir encore miser sur la certitude. Si c’est à nouveau le cas ce soir, on peut difficilement le qualifier de sélectionneur courageux. On a aussi l’impression que Wilmots se laisse mener par l’illusion du moment. Ciman est bon contre la Norvège ? Ok, il participe à l’Euro alors que dans une équipe comme l’Allemagne, il y a également des problèmes de blessures, mais ils conservent certains schémas. Le match contre l’Italie – oserons-nous miser sur nos atouts offensifs ou non ? – donnera le ton pour le tournoi des Belges. Au fond, l’Euro ne commence que ce soir.

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