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Devroe – Frenay : quand les commissions s’envolent

Thomas Bricmont

Si la norme en vigueur veut que les commissions des agents oscillent de 5-7% à 10%, les chiffres peuvent parfois aller bien au-delà, comme pour les transferts de Dimata, Cobbaut, Milic ou Didillon. Toutes des transactions réalisées par Didier Frenay et sa société Star Factory. Explications.

À combien s’élève une commission  » moyenne  » pour un agent de joueur ? Si la FIFA recommande une commission de 3 % du salaire brut par an, cette recommandation n’est quasiment jamais respectée. Sur base des chiffres donnés par plusieurs agents, la norme se situe autour de commissions allant de 5-7% à 10%. Mais l’absence quasi totale de réglementation (et donc de limitation) sur le sol belge permet à certains agents de se payer gracieusement sur le dos de la bête.

Exemple : le passage de Landry Dimata de Ostende à Wolfsburg pour 11,5 millions d’euros en juin 2017 a rapporté très gros à la société Star Factory détenue par Didier Frenay. Si les montants qui suivent sont même fortement à la baisse par rapport à ceux que l’on a pu obtenir, l’agent justifie ces chiffres : « Ostende a payé 500.000 euros au Standard pour un jeune joueur qui n’avait jamais joué avec l’équipe première. Dix mois plus tard, le club côtier a revendu Landry pour 11.500.000 euros. Ostende a touché 70% de ce montant, soit 8.175.000, ce que le club n’avait jamais touché jusque-là, et Star Factory a obtenu la différence, soit environ 3.325.000 euros », précise Frenay. Ostende a dû par la suite rétribuer le Standard, qui avait inséré un pourcentage à la revente, lui permettant de toucher environ 1 million d’euros.

Un montage qui n’est pas à proprement parler choquant si tout le monde s’y retrouve, comme le souligne l’un des dirigeants d’un club de l’élite: « Je ne regarde pas ce que ça me coûte, c’est ce que cela me rapporte qui m’intéresse. » Un agent qui amène un joueur pour zéro franc-zéro centime risque donc de toucher un commission alignée sur la plus-value à la sortie.

D’autres cas sont plus étonnants par contre, comme les commissions attribuées à Star Factory lors des transferts cet été d’Elias Cobbaut, Antonio Milic, et Thomas Didillon vers Anderlecht. Lors de chacun des trois transferts, la société de Didier Frenay a perçu 500.000 euros, sans compter les bonus, et les success fee (primes de succès) à la revente. Autrement dit, une perte sèche de 1.500.000 euros pour le RSCA en commissions d’agents sur trois dossiers.

L’ex-directeur sportif d’Ostende, aujourd’hui à Anderlecht, Luc Devroe explique « que cela correspond à une commission de 10%, un pourcentage en vigueur à Anderlecht. » Sauf que sur cette base de 10%, on arrive difficilement à 500.000 euros de commission pour un joueur comme Cobbaut qui perçoit 12.500 euros brut par mois + 200.000 de prime à la signature par saison. Réponse sèche du directeur sportif d’Anderlecht : « C’est un contrat de 5 ans et vous n’avez pas inclus l’assurance groupe. »

Ne jonglant pas avec cette fameuse assurance groupe, nous avons contacté deux agents habitués à négocier des commissions. Nous leur avons demandé de calculer sur base des chiffres de Cobbaut une com’ de 10%. La réponse est sensiblement la même dans les deux cas : « 59.088 d’assurance groupe + 174.000 de salaire + 200.000 de prime = 433.088 euros/an. Donc 43.000 de commission à 10%. Ce qui correspond à un versement de 215.000 euros pour la totalité du contrat. On est donc très loin des 500.000 euros de commission cités plus haut.

Didier Frenay, justifie, lui, ces chiffres : « C’est une question de négociation, mais aussi de réputation. Star Factory est reconnu depuis 17 ans. Je connais Luc (Devroe) depuis 30 ans. Il y a une confiance qui s’est installée par rapport aux différents transferts. » S’il n’est pas le seul agent à avoir placé un joueur à Anderlecht cet été lors d’un mercato particulièrement mouvementé, Frenay est désormais le partenaire privilégié de la maison mauve. À Ostende, le nouveau boss sportif depuis l’été, Hugo Broos a récupéré d’anciens contrats qui liaient l’ex-direction ostendaise à Star Factory : « Je reconnais qu’il y a des cas exagérés mais c’est de la cuisine interne. C’est un système qui est à revoir. Pourquoi est-ce au club de payer la commission de l’agent ? Alors qu’il est dans le camp d’en face. Pourquoi ce n’est pas au joueur de payer ? » Les montants risqueraient d’être très différents.

Par Thomas Bricmont

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