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Comment Marco Ilaimaharitra est redevenu le patron de Charleroi

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

En quelques mois, Marco Ilaimaharitra est passé de titulaire en perdition avec des envies de départ à capitaine du navire d’un Charleroi plus moderne que jamais. Récit d’une transformation.

A u pied d’une T4 complètement vide, le but est aussi anecdotique que sa célébration est calme. Charleroi réduit l’écart au coeur d’une dernière journée sans enjeu, mais le penalty converti par Marco Ilaimaharitra ne suffira pas à rejoindre Eupen au marquoir. C’est une défaite de plus qui sanctionne une saison devenue interminable. Avant la rencontre, les supporters des Zèbres ont d’ailleurs bravé les frontières sanitaires des stades pour aller à la rencontre de Mehdi Bayat. L’administrateur-délégué promet du changement. Beaucoup se disent alors que le Malgache, dernier buteur de la saison, sera posé sur la case départ à l’aube d’un mercato qui s’annonce mouvementé. Dans l’esprit du milieu de terrain aussi, ce sixième but planté sous les couleurs carolos ressemble à un au revoir.

Dans le vestiaire, on dit que le choix de lui confier le brassard n’a presque souffert d’aucune contestation.

Lors des mois précédents, le CV de Guillaume Gillet, un peu trop prestigieux pour rester sur le banc quand l’équipe commence à moins bien tourner, puis un carton rouge qui précipite une défaite face à Waasland-Beveren transforment le statut d’Ilaimaharitra. Celui qui était si important pour Karim Belhocine que le coach l’avait aligné dès le coup d’envoi du championnat, malgré une préparation tronquée, vit mal la métamorphose. « Il faut dire la vérité, ça n’a pas été évident à vivre tous les jours », confie sans détour l’ancien Sochalien en début de saison. « J’ai eu un temps cette sensation d’avoir perdu mon statut de cadre de l’équipe. »

Habitué à garder ses problèmes pour lui, le numéro 26 des Zèbres évite même de parler démesurément de son spleen à Joris Kayembe ou Gaëtan Hendrickx, ses amis les plus proches au sein du vestiaire carolo. Le départ du second en prêt à Courtrai n’arrange rien, et la fin de saison semble parfois menée en pilote automatique, dans l’attente de jours meilleurs. Quand le coup de sifflet final de la rencontre face aux Pandas est aussi celui de la saison de Charleroi, on imagine mal une poursuite de l’aventure au terme de cette 133e apparition du Malgache sous la tunique zébrée.

DRAGUE PAR TÉLÉPHONE

Si Marco imagine l’avenir sous d’autres horizons, Edward Still n’est pas de cet avis. Déjà lors de sa période brugeoise, ses conversations avec Ivan Leko dérivaient parfois sur le profil de ce milieu défensif. Ilaimaharitra fait ainsi partie des premiers joueurs appelés par Still dans les jours qui suivent l’officialisation de sa nomination comme T1 des Hennuyers. Une trentaine de minutes au téléphone depuis un terminal d’aéroport, pour tenter de convaincre le milieu de terrain d’adhérer au moins une saison supplémentaire à un projet zébré qui se prépare pour un virage brusque.

Au moment de raccrocher, les deux hommes jouent la montre, chacun à leur manière: le joueur ne dit ni oui ni non, et son nouvel entraîneur espère que les premières semaines de la préparation le convaincront de rester à bord. Mehdi Bayat, lui, est plutôt de l’avis de son coach: malgré une saison en demi-teinte, vendre Marco Ilaimaharitra au moment où sa valeur marchande est peut-être la plus faible depuis son arrivée dans le Pays Noir n’a rien du deal intelligent. Dans les bureaux du Sporting, l’espoir réside alors sur le fait que les nouvelles méthodes d’un club qui s’apprête à devenir plus professionnel que jamais suffisent à convaincre le Malgache de poursuivre l’aventure.

LE SUCCESSEUR

La préparation, « complète pour la première fois depuis une éternité » selon les dires de l’intéressé, tourne rapidement au coup de foudre footballistique. Dans un football plus travaillé, y compris une fois que l’équipe entre en possession du ballon, la compréhension des nouveaux principes de jeu ne s’effectue pas à la même vitesse pour tout le monde. Marco, lui, est dans le peloton de tête. La victoire à Ostende pour la première journée de championnat est sa première dans la peau d’un titulaire depuis le 31 octobre 2020. Elle gonfle sa confiance, et son retour en grâce l’amène à outrepasser des douleurs qui tournent à la surcharge musculaire et l’écartent des terrains durant tout le mois d’août.

Le retour dans le onze, fêté lors du match au sommet à domicile face à Bruges, se fait même avec le brassard autour du biceps. Le départ de Dorian Dessoleil pour l’Antwerp en fin de mercato oblige Edward Still et son staff à désigner un nouveau capitaine, et le choix se porte sur Ilaimaharitra. Dans les travées du stade du Pays de Charleroi, le milieu de terrain prend la parole de plus en plus souvent, avec la légitimité de ceux qui ont prouvé sur le terrain qu’ils faisaient partie des patrons. Dans le vestiaire, on dit d’ailleurs que le choix de lui confier le brassard n’a presque souffert d’aucune contestation. Une manière de confirmer aux yeux de tous qu’il a retrouvé son statut de cadre du noyau zébré.

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