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Comment Hans Vanaken est devenu le mec le plus cool de Pro League

En enchaînant deux titularisations de rang avec les Diables début septembre, Hans Vanaken a pris du galon en équipe nationale et fermé quelques bouches. L’histoire d’un homme doublement chaussé d’or, mais qui devra toujours jongler avec les critiques.

On peut être double Soulier d’Or, quadruple champion de Belgique et se retrouver à compter les papillons en tribune lors d’un championnat d’Europe de football. On peut aussi être un homme « plein de jugeote » – dixit Clinton Mata – et ne pas connaître la recette du tiramisu. On connaît finalement assez peu de choses concernant Hans Vanaken, mais le visionnage de ses apparitions dans le talk show flamand  » De Slimste mens ter Wereld » en apprend malgré tout certaines. Déjà, comme le dit encore Clinton Mata, que Hans Vanaken « n’est pas un débile ». Puisque pour le défenseur angolais du Club, « être invité dans ce genre d’émissions, c’est déjà une forme de reconnaissance ».

Il ne sera pas moins bon passé trente ans. Au contraire, chaque année, il gagne en maturité. Pour moi, il sera encore plus fort la saison prochaine. »

Un ancien coéquipier

Une forme d’approbation populaire au nord du pays qui souligne la notoriété de celui qui est entré dans le patrimoine culturel flamand avant d’avoir conquis le coeur de la masse critique footballistique belge, et de Roberto Martínez en tête. Pour voir l’Espagnol lui accorder du crédit, le Limbourgeois aura ainsi dû attendre le mois de septembre 2021 et les forfaits combinés de Kevin De Bruyne, Jeremy Doku et Dries Mertens. Titulaire dans le double pivot devant la défense aux côtés d’ Axel Witsel en Estonie (2-5) et dans le dos de Romelu Lukaku contre la République tchèque (3-0), Hans Vanaken restera, avec Alexis Saelemaekers, le grand vainqueur de ce premier rassemblement de la saison.

Sauf que si le dernier cité a 22 ans et la vie devant lui, Hans Vanaken est lui dans sa trentième année. Et c’est peu dire que l’homme aux 32 sélections, mais aux treize caps seulement, a déjà assez perdu de temps en chemin. L’histoire d’un joueur tombé sur une génération d’intouchables chez les Diables, mais aussi d’un artiste au physique de spectateur. De ceux dont les jambes trop grandes dépassent sur le strapontin du voisin et qu’on préférerait plus souvent voir sur scène.

« Vous avez du sable dans les yeux? »

« Je n’ai jamais vu un joueur si grand (1m95) avec une telle technique », jalouserait presque Onur Kaya, son ancien coéquipier du temps de Lokeren. « En fait, la particularité de Hans, c’est qu’il a le talent aux pieds d’un joueur d’1m70. On peut dire qu’il n’est pas très beau à voir jouer, qu’il est un peu lent, mais il a une intelligence de jeu hors normes. » Des qualités forcément moins tape-à-l’oeil que celles de ces ailiers techniques qui empilent les sélections en équipes internationales d’âge dès l’adolescence.

Hans Vanaken, lui, a toujours avancé dans l’ombre. Pour preuve, il ne compte qu’une titularisation avec les U21 de Johan Walem. C’était en août 2013 contre Israël, à l’occasion d’une large revue d’effectif. Un one-shot arrivé en récompense de ce transfert vers la D1 et Lokeren, bouclé quelques semaines plus tôt. À l’époque, au sortir d’une saison à onze buts et trois assists en D2 avec Lommel, le joueur ne bénéficie pourtant que d’un intérêt tout relatif à l’étage supérieur. « Il y avait tellement de scouts dans la tribune. Je me disais: Mais enfin, vous avez du sable dans les yeux, ou quoi?« , s’interrogeait déjà en mai 2019 Philip Haagdoren, son entraîneur de l’époque, dans Sport/Foot Magazine. « La remarque qui revenait tout le temps, c’était qu’il manquait de vitesse au démarrage », se souvient lui Stefan Cuypers, ancien directeur sportif de Lommel. « Alors qu’il était l’un des rares joueurs à être plus rapide, ballon au pied, que d’autres sans ballon. » Avec Leandro Trossard, Hans Vanaken fait, c’est vrai, la pluie et le beau temps dans le milieu limbourgeois de l’époque, mais ne s’épargne pour autant pas les critiques. « Certains le trouvaient malgré tout trop lent », en avale encore de travers Haagdoren. « Eux pensaient qu’il jouait parce que son père était membre du club… »

« Tous les joueurs de foot veulent avoir un Hans dans leur équipe »

Sa première saison en Pro League met rapidement fin aux discussions de comptoir. En mai 2014, Hans Vanaken soulève la Coupe de Belgique et balaie une partie des doutes le concernant. Pas suffisant encore pour le board limbourgeois de Genk qui voit dans ce longiligne milieu de terrain un joueur doué, mais incapable d’inverser le rythme d’une rencontre. Un an plus tard, les 195 centimètres de Vanaken lui ouvrent finalement les portes du Club Bruges de Michel Preud’homme.

« Je suis arrivé six mois après lui dans le vestiaire ( en janvier 2016, ndlr), mais ça ne changeait finalement pas grand-chose », rembobine aujourd’hui Benoît Poulain. « Parce que Hans n’était pas encore hyper intégré. Ce n’est pas un clown. Il a un caractère assez introverti dans la vie. Parfois, je crois que ça a pu être un frein pour lui. Les gars qui sont hyper à l’aise dans la vie de groupe sont plus facilement acceptés par l’ensemble. À Bruges, il a clairement eu deux périodes. Celle de l’adaptation et celle de l’explosion après le départ de Victor Vázquez. »

Hans Vanaken a été impérial face à la République tchèque, pourtant le gros morceau du groupe de qualifs pour le Mondial des Diables.
Hans Vanaken a été impérial face à la République tchèque, pourtant le gros morceau du groupe de qualifs pour le Mondial des Diables.© BELGAIMAGE

La deuxième lui offrira deux Souliers d’Or et la reconnaissance de la profession. Depuis sa prise de pouvoir sur le football brugeois au début de l’année 2016, ce meneur de jeu qu’on disait trop lent pour l’élite et trop renfermé pour s’intégrer dans un club du top facture 85 buts et 52 assists toutes compétitions confondues avec le Club. Deux phases, mais une quantité de pics de forme, traversés çà et là de quelques passages à vide. Comme lors de ce bref arrêt sur le banc brugeois en cours de PO1 l’an dernier. « Hans, c’est un joueur incroyable, mais sur une saison, on sait aussi qu’il aura des hauts et des bas », tente de décrypter une source proche du joueur par le passé. « Il peut être intraitable pendant un mois et puis ne plus avancer pendant deux autres. Il faut être honnête, son niveau de jeu fluctue terriblement sur une saison. »

Hans, c’est le genre de mec qu’on a envie d’aimer. »

Clinton Mata

Une analyse cash qui expliquerait les doutes récurrents autour de la capacité de Vanaken à se faire une place dans un grand championnat. « Je pense que c’est un faux débat », veut trancher Jelle Vossen, l’un de ses meilleurs amis, qui a l’habitude de se faire cogner au tennis par le Brugeois. « Je crois que même quand il n’est pas au top, il reste hyper important. Tous les joueurs de foot veulent avoir un Hans dans leur équipe. Parce qu’il voit tout sur le terrain et qu’il est toujours dispo. Son image de joueur nonchalant, qui ne serait pas explosif et qui ne veut pas travailler ou qui ne met pas le pied, c’est juste un préjugé. Une perception négative. »

Plus fort que Dele Alli?

Ce que notre ancien proche ne dément pas forcément. « Honnêtement, je pense qu’il est plus fort qu’un Dele Alli à Tottenham. Il est plus maigre et moins beau à voir, mais pour moi, il a sa place dans seize des vingt clubs de Premier League. Son pic de créativité varie, mais ce qui est vrai, c’est que systématiquement, il court comme un fou. C’est simple, à chaque match, il a le record de kilomètres parcourus. »

Une constance dans l’effort qui aura fini par lever les interrogations sur sa capacité à rendre de précieux services aux Diables de Roberto Martínez dans des matches à enjeu. Moins génial qu’un De Bruyne et moins vif qu’un Mertens, Vanaken a pour lui d’apporter son coffre et son intelligence tactique. Appréciable quand il s’agit, comme contre les Tchèques début septembre, ou tout autre adversaire de valeur, de venir tour à tour renforcer le milieu ou apporter une touche créative dans le dos de l’attaquant.

Longtemps pourtant, on a cru que le système en 3-4-2-1 des Diables était la principale raison de la mise au ban de Vanaken. On se disait que si l’homme n’arrivait pas à s’imbriquer dans le schéma de Martínez, c’était parce que contrairement à ceux dessinés par Ivan Leko puis Philippe Clement à Bruges, celui des Diables n’avait pas été conçu pour le faire briller.

« Je suis content que son pic de forme actuelle ait été l’occasion pour lui de se montrer avec les Diables », insiste cet ancien coéquipier qui ne veut pas se dévoiler. « Et je pense que le fait que cela arrive aujourd’hui, alors qu’il a déjà 29 ans, n’est pas un hasard. À partir du moment où ce n’est pas un joueur qui use de son explosivité, il n’y a pas de raison que le temps prenne de l’emprise sur lui. Il ne sera pas moins bon passé trente ans. Au contraire, chaque année, il gagne en maturité. Pour moi, il sera encore plus fort la saison prochaine. »

Laisse parler les gens

De quoi permettre à Vanaken de rêver du Mondial 2022 au Qatar et de préparer petit à petit sa revanche sur un EURO 2020 traversé sur la pointe des pieds. « À l’EURO, beaucoup ont rigolé de lui parce qu’il était en tribune », revient Jelle Vossen, dont la fille a comme parrain le milieu brugeois. « Hans n’est pas touché par ce genre de choses. On a d’ailleurs surtout rigolé de tous ces commentaires de haters à son sujet. Je lui envoyais des blagues ou des captures d’écran par rapport à ça. Il a beaucoup de second degré. D’ailleurs, pendant l’EURO, j’ai aussi reçu beaucoup de vidéos de la part de Dries ( Mertens, ndlr) ou de Jan ( Vertonghen, ndlr) qui se marraient avec lui. Les gens pensent qu’il n’est pas intégré aux groupes, mais il s’y sent très bien. »

« Les gens » aiment surtout parler de ce qu’ils ne connaissent pas. Ou mal. Et force est de constater qu’ils sont peu à bien connaître le joueur. Arrivé à l’été 2018 dans le vestiaire brugeois, Clinton Mata est de ceux qui côtoient le Diable sans y avoir vraiment accès dans le privé. « Nous ne sommes pas amis, mais on s’entend très bien. Suffisamment en tout cas pour avoir souffert pour lui quand il a eu sa période creuse l’an dernier. Hans, c’est le genre de mec qu’on a envie d’aimer. Quand tu entends des gens parler de Soulier d’Or au rabais alors que le gars nous fait gagner neuf matches sur dix, tu te demandes parfois si les gens regardent les matches avant de parler. » Au pire, ils devraient au moins regarder les diffusions de  » De Slimste Mens ter Wereld » en mangeant un tiramisu.

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