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Anderlecht: mais où est passé Marco Kana?

Pierre Danvoye
Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

On ne connaît pas encore vraiment la meilleure position de Marco Kana. Mais on sait que « l’enfant de Dieu » est dans le dur depuis son éclosion spectaculaire à l’automne 2019. Et que son club de toujours compte encore sur lui. Pourquoi?

« Je comprends qu’on me compare à Vincent Kompany. » Et bam, rien que ça! Et c’est sorti de la bouche d’enfant de Marco Kana en novembre 2019. Pour sa première longue interview de footballeur professionnel, à 17 ans et quelques semaines, il fait fort. Il faut dire qu’à ce moment-là, on ne le bouge plus de l’équipe. Le couple attitré en défense centrale, c’est Elias Cobbaut et Marco Kana. Point.

Et donc, il y a cette comparaison avec le Prince. Normal. Il a des racines congolaises, il a grandi à Bruxelles, il a fait ses classes à Anderlecht à partir des U6, il a débuté très jeune en équipe première, il passe sans souci du français au néerlandais, et enfin, il joue dans l’axe de la défense. Tout les rassemble. D’ailleurs, c’est Kompany lui-même qui l’a fait monter dans le noyau pro lors de l’été 2019.

Mais notre infographie montre qu’entre son éclosion lors du dernier trimestre de l’année passée et aujourd’hui, ça a surtout été compliqué pour Marco Kana. Il a enchaîné des semaines, parfois des mois, sans être sur le terrain. Pourtant, tout indique que le club continue à croire en lui. En juin 2020, il prolongeait son contrat jusqu’en 2023. En octobre, il s’engageait jusqu’en 2025. La réalité, c’est que le gamin en a beaucoup sous le capot. Et s’il est dans le dur, c’est pour quelques bonnes raisons.

Défenseur ou médian?

Kana a été formé comme médian, mais si on l’a découvert la saison dernière en défense, c’était une question de nécessité du moment. Si tout le monde avait été opérationnel à temps plein, il n’aurait probablement pas reçu sa chance dans la ligne arrière. L’axe était réservé à Kompany et Philippe Sandler. Kana a profité de leurs soucis physiques, il a saisi sa chance et s’est installé.

Cet été, il y a eu un retour aux sources. Vincent Kompany et Franky Vercauteren ont estimé qu’il pourrait être plus utile dans l’entrejeu, comme récupérateur. C’est dans ce rôle qu’il a fait la campagne de préparation. Ça s’explique notamment par sa taille (1m80) et son poids plume (à peine septante kilos ), qui ne correspondent pas au profil physique type d’un défenseur axial.

Aujourd’hui, Kompany a trois hommes forts pour la récupération en milieu de terrain: Albert Sambi Lokonga est indéboulonnable, Josh Cullen donne le plus souvent satisfaction et Adrien Trebel revient dans le coup. Kana devra être au taquet s’il veut bouger la hiérarchie. Dans les rares matches qu’il a joués cette saison, il n’a pas été impressionnant. C’était surtout pendant la toute première partie de la saison. Aujourd’hui encore, il paie probablement pour ces prestations moyennes.

Pour entrer dans l’équipe, Marco Kana devrait sortir Sambi Lokonga, Trebel ou Cullen.

Une explication universitaire?

L’intello. Ça pourrait être un surnom pour lui. Marco Kana, c’est la tête et les jambes. Pas le type de footballeur qui arrive péniblement au bout de son parcours scolaire en secondaire. Ses parents tenaient à ce qu’il ait une formation de très bon niveau et il s’est retrouvé dans une option avec beaucoup d’heures de maths et de sciences. Peut-être le choix le plus compliqué, celui qui demande le plus de facultés et d’étude. Mais il a assumé avec brio. L’été dernier, il a terminé sa rhéto avec une moyenne de 65%. Il maîtrise donc les chiffres et le domaine scientifique, et il possède également un don en langues. Ses parents l’ont élevé en français. Il a fait son parcours scolaire en néerlandais. Là, il a aussi suivi des cours d’anglais et d’allemand. Et pour son plaisir, parce qu’il trouve que « c’est une belle langue », il s’est mis à l’espagnol. « Dieu m’a donné du talent dans le football, mais aussi des capacités à l’école », a-t-il déclaré l’année passée dans La Dernière Heure. Il a rêvé de quelques métiers de haut vol: architecte, ingénieur, médecin. Il a dû faire un choix lors de l’été 2020 et s’est lancé, à la VUB, dans l’option sciences économiques appliquées. Il est la tête de gondole du petit groupe d’étudiants d’Anderlecht. Rik Vercauteren fait la même chose au même endroit, Lucas Lissens est aussi à la même université en sciences sociales, Loïc Masscho (du noyau U21) est à l’Université de Gand pour devenir ingénieur commercial. Cette combinaison est remarquable, mais elle peut contribuer à expliquer les difficultés de Marco Kana pour se faire une place dans l’équipe.

Anderlecht: mais où est passé Marco Kana?

Trop de pression?

Et s’il était victime d’un surrégime qui a duré quelques mois? Quand il jouait beaucoup la saison dernière, avec notamment une période de deux mois où il a disputé une douzaine de matches complets, il devait donc combiner avec l’école, rater des cours parce qu’il était à l’entraînement puis se remettre en ordre, étudier. Des journées qui commençaient à 7 heures du matin et se terminaient à 19 heures, pour lui, c’était la norme. Au même moment, il jouait avec la sélection U19. Forcément, on parlait beaucoup de lui dans les médias. Et dans le petit monde des agents. On lui a fait la cour, des propositions. Toutes les autres pépites du club avaient leur représentant. Pas lui. C’est toujours son père qui s’est occupé de son parcours, et ils ont tenu bon malgré les avances et les promesses. Mais ça n’a pas toujours été simple. Il y a un an, il a avoué: « Des agents me disaient qu’ils avaient reçu un mandat de tel ou tel club pour me transférer. Il faut être fort mentalement dans des moments pareils. » Et il n’a pas été dragué par n’importe qui. Par exemple, des gens de Roc Nation Sports, qui s’occupent de Romelu Lukaku, Kevin De Bruye et Axel Witsel, ont fait le forcing pour le convaincre de s’engager avec eux.

Tout ça a peut-être mis une petite pression supplémentaire à ce gamin de 17 ans à l’époque. Entre-temps, il y a donc eu l’obligation de boucler ses humanités puis l’entrée dans l’enseignement supérieur, avec une dose de travail encore plus importante. Et deux prolongations de son contrat. Aux moments où il les négociait, des clubs rivaux essayaient de le convaincre. Et sa valeur marchande grimpait en flèche, multipliée par quatre en l’espace de deux mois. Alors, si Marco Kana craque un peu après autant de moments forts en peu de temps et si ça se répercute sur son niveau, c’est compréhensible.

7 bonnes choses à savoir sur Marco Kana

1

Sur son profil Instagram (marco_kana55), il se présente comme joueur d’Anderlecht (logique), athlète Adidas et… enfant de Dieu.

2

Il était habitué à porter le brassard de capitaine en équipes de jeunes et il a de nouveau eu cet honneur en équipe première lors de l’été dernier, en match de préparation contre Saint-Trond.

3

Il a accepté un poste d’ambassadeur d’une association qui soutient des projets au Sénégal (ASBL 2.749 miles d’espoir).

4

Ses modèles dans le foot international: Sergio Busquets, N’Golo Kanté, Virgil van Dijk, Matthijs de Ligt.

5

Il est né au Congo et est arrivé chez nous à l’âge de deux ans. Il n’a obtenu la nationalité belge qu’en 2018. Il pourrait toujours jouer avec l’équipe A congolaise.

6

Au moment où il a signé son premier contrat professionnel à Anderlecht, le Standard et Lille lui proposaient aussi un contrat.

7

En marquant contre Saint-Trond en octobre 2019, le jour de sa première titularisation, il est devenu le septième plus jeune buteur d’Anderlecht en D1.

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