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Anderlecht: la réponse de Vincent Kompany à ses détracteurs

Pierre Danvoye
Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

Sauf catastrophe le week-end prochain, les Mauves vont se qualifier pour les play-offs 1, et c’est une vraie bonne surprise. Et si Kompany réussissait finalement son pari? Explications du parcours d’Anderlecht et de ses contrastes.

« La visite de Bruges sera capitale pour la fin de la saison. Et si je pouvais choisir, je préférerais qu’on affronte le Club dix fois d’affilée. » Vincent Kompany y est allé franco en préface du Topper de dimanche dernier et a aussi joué sur l’une ou l’autre métaphore, comme quand il a commenté la taille moyenne des Brugeois: « Ce sont souvent les petits castors qui font tomber les plus grands arbres. »

Le coach des Mauves y croyait, à ce rendez-vous qui pouvait rapprocher encore un peu plus son équipe du top 4 final et des play-offs. Avec de bonnes raisons car – premier paradoxe – l’Anderlecht de Kompany est bien plus à l’aise contre les monstres que face aux sans-grades. Notre tableau le montre bien: autant Anderlecht a perdu des points (souvent bêtement) dans ses affrontements avec des équipes de bas de classement (deux sur six contre Mouscron, un sur six contre Eupen), autant cette équipe fait le job quand il y a un grand en face. Parce que le Sporting joueur arrive à déployer son potentiel quand l’adversaire accepte la confrontation et ne ferme pas toutes les entrées possibles. Les gars de Kompany sont bien plus à l’aise contre le Genk de John van den Brom ou l’Ostende d’ Alexander Blessin que contre des formations qui refusent le combat. Les Bruxellois ont sorti deux de leurs matches références quand Genk était sur leur route, ce n’est pas un hasard. Mais ces derniers temps, ils ont aussi réussi à percer des murailles, ce qui était si compliqué pour eux en première partie de saison. Ce fut le cas récemment sur la pelouse de l’Antwerp, par exemple. Signe que cette équipe continue à grandir. Et sans doute que son coach continue à s’améliorer en trouvant les bonnes solutions aux bons moments.

Ça n’a pas arrêté de bouger en défense, mais c’est la deuxième plus solide du championnat.

Une victoire qui peut tout changer

Au cours des jours précédant le match contre le Club, Anderlecht en a pris pour son grade dans la presse. Il a été question de la domination brugeoise partie pour durer et aussi des insuffisances présumées de Kompany et de ses joueurs. On sait maintenant que ça les a titillés, ils l’ont montré en célébrant le but de la victoire. Avant les chocs contre l’Antwerp et Bruges, on doutait d’une qualification pour les play-offs 1. Dix jours plus tard, on évoque une possible deuxième place finale et une participation aux préliminaires de la Ligue des Champions.

Bref, un match a tout fait basculer. Sans que ce soit un match référence parce que le Club courait devant depuis le coup d’envoi et doit sa défaite à quelques minutes catastrophiques. On a vu un Anderlecht plus chirurgical et plus réaliste que dominateur. Mais bien plus dans le coup que lors du match aller, en octobre, quand Kompany venait de reprendre l’équipe. Ce soir-là, on n’aurait jamais imaginé que les Mauves allaient signer un bulletin presque parfait contre les meilleures équipes.

Le Sporting a clairement grandi lors des chocs. Avec un coach qui a continué à apprendre son métier, en laissant de côté la naïveté qui a coûté beaucoup de points à certains moments. Anderlecht met par exemple moins de risques dans ses relances de l’arrière. Quand il a repris l’équipe, Vincent Kompany ne supportait pas des longs ballons vers l’avant. Entre-temps, il sait que c’est parfois la meilleure solution parce qu’elle est moins risquée. Le romantisme n’est plus aussi présent qu’il y a quelques mois. Il a évolué dans son approche.

36 joueurs utilisés

Autre paradoxe de la saison du Sporting: la solidité de sa ligne défensive alors que tous les ingrédients étaient là pour qu’elle ne tienne pas la route. Il y a eu des blessures de longue durée de défenseurs qui auraient été dans l’équipe à tous les coups s’ils n’avaient pas eu leurs problèmes physiques: Elias Cobbaut, Hannes Delcroix. Il y a eu des remaniements, des hésitations, des joueurs qui avaient la pleine confiance du coach pendant plusieurs semaines, puis ont subitement disparu pour éventuellement réapparaître dans l’équipe de base du jour au lendemain, ou faire le trajet inverse: Amir Murillo, Kemar Lawrence, Bogdan Mikhaylichenko, Killian Sardella. Et un problème dans le but où Timon Wellenreuther a du mal à supporter la succession temporaire de Hendrik Van Crombrugge. L’Allemand est toujours aussi peu à l’aise dans le jeu au pied et a commis plusieurs erreurs de débutant, dont certaines ont coûté des points. Et donc, malgré tout ça, seul le Club Bruges a encaissé moins que le Sporting. La difficulté de Vincent Kompany pour trouver un onze type est aussi illustrée par le nombre de joueurs utilisés depuis l’été: 36. En comparaison, l’Antwerp a aligné 31 hommes, Bruges 29, Genk 26, Ostende 24.

Majeed Ashimeru, ici au duel avec Eduard Sobol, n'a pas encore vraiment convaincu.
Majeed Ashimeru, ici au duel avec Eduard Sobol, n’a pas encore vraiment convaincu.© BELGAIMAGE

Des transferts de janvier pour du beurre

PeterVerbeke avait annoncé très tôt la couleur: après un marché estival low-cost (moins de cinq millions dépensés), il aurait encore moins de moyens en janvier. Pas de moyens du tout, en fait. Alors, le patron sportif a fait de nouvelles opérations à bas prix, des prêts sous forme de paris, des venues de joueurs à la relance, à la recherche de leurs sensations perdues.

Avec le recul, on se dit que le club aurait carrément pu éviter ces petites dépenses en salaires. Parce qu’aucun joueur arrivé pendant l’hiver n’a vraiment apporté quelque chose à l’équipe. On a du mal à revoir en Abdoulay Diaby l’attaquant percutant qu’on a connu à Bruges. Et on comprend mieux maintenant pourquoi il était surnuméraire à Getafe. Il n’a pas joué un seul match complet avec Anderlecht, même pas lors de petits rendez-vous de Coupe contre l’Union ou le Cercle, par exemple. Et il a juste marqué un but. Dimanche contre Bruges, il est monté au jeu dans le temps complémentaire. Un changement simplement destiné à gagner quelques secondes. Tout un symbole de sa galère. Retour prochain à l’expéditeur.

Anderlecht: la réponse de Vincent Kompany à ses détracteurs

JacobBruunLarsen avait ses petites lettres de noblesse quand il s’est posé chez nous en janvier. Une cinquantaine de matches en Bundesliga et une place dans le noyau de l’équipe nationale danoise. Il était censé dynamiter son flanc et faire oublier sa première moitié de saison tristounette avec Hoffeneim. Pour lui aussi, c’est un constat d’échec en Belgique. Il a certes participé à presque tous les matches, jamais entièrement, mais surtout, il a été très peu productif. Dans une moindre mesure, Majeed Ashimeru déçoit lui aussi. Il est venu parce qu’il est encore un peu tendre pour un club du niveau de Salzbourg. Clairement, il l’est encore un peu trop aussi pour la Jupiler Pro League. On en a eu une nouvelle illustration le week-end dernier. Le marché de janvier est clairement un échec. Heureusement donc qu’il n’a pas coûté grand-chose.

Revue de presse à des moments clés de la saison.

23/08/2020 Anderlecht – Mouscron 1-1

« Avec ses principes de possession (60% en moyenne), Anderlecht donne l’impression d’être trop vulnérable quand il doit défendre. » LE SOIR

04/10/2020 Club Bruges – Anderlecht 3-0

« Deux jours avant le match, Kompany avait dit qu’il refusait de dresser un mur pour contrer le Club Bruges. Le Topper a pourtant ressemblé à un attaque – défense lors duquel Anderlecht n’a pas existé. C’était le premier gros test des Mauves cette saison, il a été raté dans les grandes largeurs. » L’AVENIR

01/11/2020 Anderlecht – Antwerp 1-0

« Anderlecht a établi un nouveau record contre l’Antwerp en n’ayant que 28% de possession. Le chiffre le plus bas pour ce club depuis que la société de statistiques Opta a commencé à mesurer la possession en 2014. Mais ça ne fera pas pleurer Kompany et les siens parce que les trois points étaient au bout du chemin. » HET NIEUWSBLAD

11/12/2020 Anderlecht – Genk 1-0

« Est-ce qu’Anderlecht était si bon ou Genk si mauvais? La bonne explication, c’est la première. Offensivement et défensivement, les Mauves ont joué un match parfaitement abouti, à l’exception des occasions gaspillées. Les supporters qui ont vu cette prestation ne doivent pas désespérer. » HET LAATSTE NIEUWS

15/01/2021 Eupen – Anderlecht 2-0

« Les jeunes de Kompany nous enchantent par moments. Ils font chaque semaine de leur mieux, mais… Il serait grand temps qu’ils se récompensent et récompensent leur coach. Ou au moins qu’ils arrêtent de se tirer chaque fois une balle dans le pied. » HET LAATSTE NIEUWS

22/01/2021 Anderlecht – Waasland-Beveren 0-0

« Kompany avait raison de se méfier, même face à l’avant-dernier du championnat que beaucoup considèrent comme l’équipe la plus faible de Pro League. Le Sporting a raté son examen face à un bloc très bas qui ne pense quasi qu’à défendre. Le béton waeslandien a remis en lumière les limites offensives de ce jeune groupe. » LA DERNIÈRE HEURE

07/02/2021 Genk – Anderlecht 1-2

« Anderlecht a produit une démonstration de pressing. C’était beau à voir et l’équipe d’en face n’avait aucune idée de la stratégie à adopter pour renverser la situation. » HET LAATSTE NIEUWS

21/02/2021 Anderlecht – courtrai 0-2

« Vincent Kompany a voulu courir avant de savoir marcher (…) On a beau être aussi intelligent que lui, il arrive un moment où on surestime ses propres capacités. » SPORT/FOOT MAGAZINE

28/02/2021 Standard – Anderlecht 1-3

« Après avoir proposé l’une de ses prestations les plus solides contre l’Antwerp, début novembre, avec seulement 28% de possession de balle, Anderlecht s’est à nouveau assis sur ses principes dans l’antre des Rouches, abandonnant le ballon à son hôte durant 65% du temps. Une grande partie du mérite en revient à Kompany qui, pour ce match capital, a réussi à se remettre en question. » LE SOIR

05/04/2021 Antwerp – Anderlecht 1-4

« La philosophie romantique et offensive de Kompany a trouvé un parfait terrain d’expression sur le billard anversois. » LA DERNIÈRE HEURE

11/04/2021 Anderlecht – Club Brugge 2-1

« Anderlecht peut encore viser la deuxième place et les préliminaires de la Ligue des Champions, mais le coach ne veut pas aborder le sujet. » HET NIEUWSBLAD

Vincent Kompany de l’enfer au paradis

Une clinche ou un grand coach en devenir? Tout au long de la saison, au gré des résultats parfois / souvent surprenants, Vincent Kompany a provoqué des commentaires dans tous les sens. Parfois élogieux, parfois assassins. Il n’a encore jamais fait l’unanimité, ni dans un sens ni dans l’autre. Dans les médias, dans le public, dans le milieu du foot, Coach Kompany est un personnage clivant. On en a encore eu une belle illustration le week-end dernier, dans la presse de la veille du match contre Bruges. Alors que dans Le Soir et SudPresse, Hugo Broos lâchait « Dans ce contexte, même Pep Guardiola n’aurait pas mieux fait que Kompany », Lorenzo Staelens et Glen De Boeck s’unissaient dans La Dernière Heure pour affirmer « Avec Kompany comme coach, Bruges ne serait pas champion. » Difficile de faire plus opposé.

79% des points contre le top 5

Une question devait encore trouver une réponse avant le coup d’envoi du Topper de dimanche: qui, de Bruges ou d’Anderlecht, allait signer le meilleur bilan en phase classique face aux autres équipes du top 5? La victoire des Mauves leur permet de terminer en tête de ce classement particulier.

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