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« À Sclessin, c’était une action conjointe »

Une révolte des supporters qui fait couler beaucoup d’encre, de moins en moins de monde au stade et des acharnés qui se battent pour pouvoir suivre Anderlecht en déplacement. Insertion au coeur du tumulte mauve.

Vous avez brisé un record de 21 ans, il vous reste 8 matches pour ne pas briser celui de 55 ans. Les prières proférées par la Mauves Army avant le match contre l’Antwerp n’ont pas été exaucées. Sauf miracle, Anderlecht ne sera pas européen la saison prochaine. La colère qui a grondé après la dernière à domicile contre le Great Old (1-2) et coordonnée, selon des insiders, par le groupuscule restant du Brussels Casual Service (BCS) n’était, somme toute, que l’expression d’une frustration qui avait été toujours contenue jusqu’alors.

Stewards complices ?

Serait-ce donc là, à la faveur de cette mini-éruption, qu’aurait germé le plan d’une action de guérilla, à Sclessin, susceptible de réduire à néant tout ce qu’il restait d’espoirs sportifs au cours de cette campagne? Bon nombre d’acteurs, au sein des clubs de fans du Sporting, estiment en tout cas que les débordements qui ont eu lieu au stade du Standard ont été prémédités. Et ce, avec la complicité tacite, ou du moins au su, de quelques stewards, prétend-on.

Ceux-ci, au nombre de 34 au total pour encadrer une meute de 1300 fans anderlechtois, équipés de matériel pyrotechnique dissimulé dans leurs sous-vêtements, auraient de toute façon été impuissants face à semblable révolte. Ils n’étaient pas préparés, semble-t-il, à pareille rébellion. La plupart de ces gilets orange pensaient, en se rendant au match, que les supporters se borneraient tout au plus à un sit-in pour bloquer le bus des joueurs après la rencontre. Peu après l’entame des hostilités sur le parking visiteur, Christelle Boucar, responsable des stewards, s’est toutefois vue obligée de faire battre ses troupes en retraite.

Toute l’Europe en parle

Etant donné que les membres du BCS utilisent surtout la force pour faire valoir leur point de vue, vendredi passé, un doigt accusateur a été pointé en direction de la Mauves Army par d’autres supporters et stewards présents. Le président d’un club de supporters francophone pense que les militants ont voulu soumettre les joueurs et la direction à une thérapie de choc. « Il n’y avait pas de meilleur endroit que le stade de l’ennemi de toujours, le Standard, pour mener une telle action. Et ils ont atteint leur objectif. Toute l’Europe en parle. « 

Déclarations contredites par la Mauves Army. « Nous sommes allés à Liège pour soutenir l’équipe et la pousser à la victoire. Rien n’était prévu contrairement à ce que tout le monde pense savoir. Ce qui s’est passé a été une réponse conjointe du public d’Anderlecht dans son ensemble. « 

Serrer les rangs

Interrogé après coup par Play Sports, Michael Verschueren ventila sa déception face aux agissements qu’il venait de vivre. « Je comprends que les fans soient déçus par la tournure des événements. Mais de là à s’exprimer de la sorte…Nous mettons tout en oeuvre pour tenter d’arracher la quatrième place et, au bout du compte, ce sont quelques énergumènes qui nous en privent. Tout le monde travaille dur pour essayer de sauver cette campagne, le président inclus. On parle parfois d’une rupture de style en évoquant le Sporting actuel. Mais ce qui vient de se passer dégrade l’image que notre club avait façonnée durant tant d’années. On doit à tout prix serrer les rangs et soigner nos plaies. »

Un jour plus tard, le manager sportif se voulait déjà plus conciliant. Il disait même comprendre le mécontentement des fans. Mais ce n’était pas la première fois que le fils de Mister Michel faisait preuve d’une certaine maladresse dans sa com. Après les débordements contre l’Antwerp, il avait déjà réagi de manière laconique aux aspirations des fans.

« Je comprends leur frustration. Ils accumulent tout cela depuis le début de la saison. Mais crier Coucke dehors, c’est émotionnel. Il ne faut pas donner trop d’importance à cela. Si nous jouons bien pendant quelques semaines, l’ambiance changera. Il faut parfois traverser une crise pour changer fondamentalement les choses. »

Différence home/away

Une crise qui pousse une partie du public à déserter le stade Constant Vandenstock mais qui n’affecte pas réellement le nombre de fans présents lorsqu’Anderlecht évolue en déplacement. Lors de la phase classique, le Sporting a été encouragé, en moyenne par 989 supporters, ce qui le classe en deuxième position derrière le Club Bruges et ses 1336 fans.

Il faut dire que la moyenne brugeoise est faussée puisqu’un déplacement du Club a lieu… au Cercle, en présence de 6229 fans Blauw en Zwart. Si on ne tient pas compte de ce match, Anderlecht est, de loin, l’équipe la plus suivie loin des bases. Les mauvais résultats n’ont manifestement pas d’influence sur le degré d’occupation du bloc visiteurs. Les supporters les plus fanatiques sont toujours disposés à payer de 30 à 60 euros pour des déplacements à Mouscron ou Ostende. Mais les anciens qui ont connu les soirées européennes et les VIPS, qui peuvent s’installer à domicile dans des sièges luxueux, restent sagement à la maison.

« Le public anderlechtois à l’extérieur n’est pas le même qu’à domicile », dit Ivan Boelens, président du club de supporters De Gentse Verstandhouding. « De nombreux abonnés ne prennent pas la peine de se déplacer. À l’inverse, il y a des supporters qui ne sont pas intéressés par les matches à domicile et n’assistent qu’aux matches en déplacement. »

Désobéissance civile

En raison des incidents survenus à Liège, les supporters bruxellois craignent d’être bientôt interdits de sortie. De nombreux partisans ont depuis longtemps le sentiment qu’ils ne sont pas les bienvenus dans certaines villes et qu’ils sont délibérément pris pour cibles par les services de sécurité.

Les adeptes de la théorie du complot pensent que le seul objectif est de réduire au maximum le nombre de supporters anderlechtois en déplacement.

Les chiffres démontrent pourtant qu’il n’y a pas de boycott du noyau dur d’Anderlecht -seuls Eupen, Waasland-Beveren, le Club Bruges et le Cercle ont mis moins de tickets à leur disposition qu’à celle de certains autres grands clubs. Anderlecht et le Club Bruges discutent même afin que, la saison prochaine, 1000 supporters du club adverse aient accès au stade Jan Breydel et au stade Constant Vanden Stock.

Si la frustration augmente, c’est parce qu’à Eupen et au Cercle, Anderlecht n’a reçu que, respectivement, 757 et 635 tickets alors que seul un tiers du stade était rempli. Afin de protester contre ce traitement, la Mauves Army a entrepris des actions dans les stades de Courtrai, d’Eupen, de Waasland-Beveren, du CS Bruges et d’Ostende, achetant des dizaines de tickets dans les blocs réservés aux supporters visités et signalant discrètement sa présence.

Une forme de désobéissance civile qui ne prendra pas fin du jour au lendemain. « Le noeud du problème est simple : les blocs réservés aux supporters visiteurs sont de plus en plus petits. Il n’y a pas si longtemps, en déplacement, nous étions 1.300 ou 1.400. Maintenant, nous sommes entre 700 et 900 », dit-on à la Mauves Army.

« Les bourgmestres se disent : moins il y a de supporters visiteurs, moins j’ai de travail. Mais si le football veut rester un sport populaire, nous devons nous en prendre à certaines mesures décrétées par les autorités. Tant pis si le SPF Intérieur nous convoque ou nous inflige des amendes. Mais nous sommes dérangés par le fait que nous sommes convoqués simplement parce que nous voulons suivre notre équipe. »

Par Alain Eliasy

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