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 » Wilmots s’est accroché à des idées bien arrêtées »

Ancien Directeur technique de la Fédération, Benoît Thans analyse les causes de l’échec des Diables en France et dépose ses espoirs d’un avenir meilleur dans les mains de Bart Verhaeghe :  » Il peut dynamiser tout cela. « 

C’est en supporter, avec ses trois fils, que Benoît Thans a vécu en France le parcours des Diables Rouges durant un EURO qui a fait remonter pas mal de souvenirs à la surface du temps de son bref mandat de Directeur technique. Thans a été licencié de son poste en janvier 2013. L’argument principalement mis en évidence par les décideurs de l’époque était son manque d’implication au niveau administratif. En clair, il n’établissait pas suffisamment de dossiers, de rapports qui permettent de laisser une trace de son travail.

Ce job, il ne l’avait pas imaginé comme cela. Lui, il était là pour causer foot, lancer des idées et les mettre en pratique. Et aujourd’hui, c’est un constat qu’il pose à nouveau: « On ne parle de nouveau plus assez de football à l’Union belge. »

LA RESPONSABILITÉ DE WILMOTS

Selon les sondages et la région du pays dans laquelle ils ont été effectués, 75 à 90 % des Belges attribuent l’échec de l’équipe nationale à Marc Wilmots. Thans était encore directeur technique de l’Union belge quand celui-ci a été nommé à titre définitif, après deux matches amicaux.

« Au départ, la commission technique n’en voulait pas mais les pistes explorées à l’époque (Michel Preud’homme, Eric Gerets, Louis van Gaal, Claudio Ranieri, Marcelo Bielsa et Ralf Rangnick) n’étaient pas faisables ou n’avaient pas été retenues. Il a donc été décidé de laisser deux matches amicaux à Marc et à l’issue de celui de Londres, on m’a appelé pour me dire qu’il était confirmé. Je n’étais pas contre son engagement car il en imposait, il avait du charisme et savait où il allait. De plus, il avait le soutien des joueurs.

La première chose qui m’a étonné, c’est qu’il ne voulait pas d’un adjoint comme lui l’avait été à l’époque de Georges Leekens, quelqu’un capable de donner son avis. Il a refusé les pistes Glen De Boeck et Eric Van Meir et a suggéré Vital Borkelmans. Par la suite, il a écarté Philippe Van de Walle et d’autres membres du staff. Moi, je n’ai rien contre le copinage mais il faut qu’on reste dans la compétence. Et cela n’a pas été mieux quand on lui a donné les pleins pouvoirs. « 

D’un point de vue tactique, Thans pense que Wilmots n’a pas exploité toutes les possibilités de cette génération dorée. « A certains postes, nous avons quatre joueurs de valeur mondiale mais Marc s’est accroché à des idées bien arrêtées. Toujours dans le contexte où je pense que cette équipe devait être capable d’imposer son jeu, j’aurais voulu la voir avec deux attaquants et un seul médian défensif, par exemple. »

LA RESPONSABILITÉ DU DIRECTEUR TECHNIQUE

On touche à la corde sensible de la discussion: une équipe nationale, c’est bien plus que vingt-trois joueurs et un staff. Selon Thans, c’est là que la grande partie du travail reste à faire pour que le standing de la Belgique corresponde à son classement FIFA et à la valeur de ses individualités.

A l’Union belge, Thans avait pris la place de Francky Dury qui avait tenu moins d’un trimestre. Après lui, c’est Paul Allaerts qui a été installé dans le fauteuil (une transition avant de lui trouver un job plus en rapport avec ses compétences à la tête des arbitres). Aujourd’hui, le directeur technique de l’Union belge est… Chris Van Puyvelde.

L’a-t-on entendu une seule fois donner un avis ou une explication avant, pendant ou après l’EURO? Quel rôle a-t-il joué dans la préparation de ce rendez-vous? Nul n’en sait rien et cela renforce encore l’idée que ce poste… ne sert à rien, que toutes les décisions sont prises par le politburo qu’est la commission technique.

« Le rôle du directeur technique n’est pas seulement de s’occuper de l’équipe A mais aussi de mettre en place des stratégies à moyen et à long termes », dit Thans. « Ce qui m’ennuie, ce n’est pas que ce soit la Commission technique qui ait le dernier mot lors des prises de décision concernant les Diables -cela a toujours été comme ça et tous les directeurs techniques qui ont travaillé pour l’Union belge ont accepté le poste en connaissance de cause- mais bien que cette Commission technique soit réduite à sa plus simple expression.

Or, le sélectionneur et les joueurs ont besoin de sentir qu’il y a toute une équipe derrière eux. Une équipe qui les soutienne et les place devant leurs responsabilités aussi. Après le Brésil, tout le monde était content d’être arrivé en quarts de finale. Le jeu n’avait pas été de très bonne qualité mais, pour chacun, l’objectif avait été atteint. C’était le moment ou jamais de voir ce qui pouvait être amélioré en vue de l’EURO 2016. L’a-t-on fait? Non! On a discuté du prix de l’hôtel des femmes, du budget, du CEO,…

Et maintenant qu’on cherche (peut-être) un nouveau sélectionneur, on n’envisage pas d’investir, de trouver des solutions pour éventuellement payer un salaire plus élevé à quelqu’un qui apporte une plus-value. Donc, on restreint déjà le champ des possibilités. »

QUELLES SOLUTIONS POUR L’AVENIR?

Si beaucoup d’observateurs estiment qu’en deux ans, l’équipe belge n’a pas progressé au niveau du jeu, le constat de Thans est que, malgré les restructurations, le système n’est pas dépoussiéré non plus. Cela signifie-t-il que la Belgique devra toujours se contenter d’un rôle secondaire?

« Non », dit résolument Thans. « Je fonde beaucoup d’espoirs en Bart Verhaeghe. J’espère que, comme il l’a fait au Club Bruges, il parviendra à transmettre sa passion, à installer une commission technique forte, à changer l’approche, à fixer des objectifs. J’entends parler d’un sélectionneur qui cumulerait ses fonctions en équipe nationale et dans un club. C’est une solution que je soutiens et que j’avais d’ailleurs défendue bec et ongles à l’époque où il avait fallu chercher un successeur à Georges Leekens.

L’idée était alors de faire revenir Michel Preud’homme mais il venait de resigner à Al Shabab et le prince n’avait pas voulu de cet arrangement. Verhaeghe pense-t-il qu’il va déforcer Bruges en agissant de la sorte? Ou qu’il va entrer en conflit avec Gand s’il demande à Hein Vanhaezebrouck de cumuler? Il me semble que les clubs ont, au contraire, tout à gagner dans l’aventure. Plus de visibilité pour notre football, c’est plus de visibilité pour eux et pour leurs joueurs. Sans l’EURO 2016, Thomas Meunier ne va pas au PSG. Et ça, Verhaeghe le sait. »

Par Patrice Sintzen

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