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Pourquoi le Real bat largement le Barça dans le Clasico du futur

Steve Van Herpe
Steve Van Herpe Steve Van Herpe est rédacteur de Sport/Voetbalmagazine.

Alors que les Catalans ne parviennent plus à s’appuyer sur la Masia, le Real a mis en place une stratégie autour de jeunes talents venus du monde entier.

C’est devenu une question de tradition. En Espagne, le titre se jouera une nouvelle fois entre le Real et le Barça cette saison. Et à l’avenir? Le Real semble avoir pris les devants en la matière.

L’affaire est presque passée inaperçu au début du mois, mais le site américain ESPN annonce alors que Barcelone envisage un retour en Catalogne d’Eric Garcia, le défenseur de Manchester City.

Surprenant. Parce qu’en 2017, le même Garcia avait quitté la Masia, centre de formation du géant blaugrana. La raison? Il pensait que ses chances d’obtenir du temps de jeu seraient plus élevées sous les ordres de Pep Guardiola, qui était tombé sous le charme et voyait en lui le nouveau Gerard Piqué.

C’est justement pour cette raison que le Barça est revenu frapper à la porte du jeune défenseur: les Catalans veulent faire de lui le successeur de Piqué. De quoi se poser la question : pourquoi l’avoir laissé partir? À l’époque, Garcia avait l’impression que sa situation au club ne lui offrait aucune perspective. Un sentiment que le Barça aurait pu éviter.

La liste des enfants de la Masia qui ont quitté le navire catalan ne cesse de s’allonger.

Au Barça, on ne semble pas retenir les leçons : la même année que Garcia, Jordi Mboula avait rejoint l’AS Monaco, se sentant barré par la concurrence féroce au sein du secteur offensif au Camp Nou. Un an plus tard, c’était au tour de Sergi Gomez de s’envoler vers Dortmund. L’ailier gauche de 17 ans avait été élu Ballon d’argent du Mondial U17 en 2017, seulement battu par Phil Foden.

Le Barça avait alors affirmé que tout était mis en oeuvre pour conserver Juan Miranda (arrière gauche) et Abel Ruiz (attaquant), deux autres talents vice-champions du monde des U17 avec l’Espagne. Mais qui a quitté la Catalogne au mois de janvier pour rejoindre Braga contre huit millions d’euros? Abel Ruiz. Quant à Miranda, il a été prêté à Schalke, où il a récolté 479 minutes de jeu lors de la saison écoulée, en huit apparitions.

Un manque de patience

La liste des enfants de la Masia qui ont quitté le navire catalan ne cesse de s’allonger. En janvier, c’est Carles Pérez qui a rejoint ses rangs en étant vendu à la Roma. En interview pour Mundo Deportivo, l’attaquant était interrogé sur son départ, alors que Barcelone avait délié les cordons de la bourse pour un profil semblable au sien, celui du Danois Martin Braithwaite.

« Je pense à ce qu’a toujours dit Marc Cucurella (jeune joueur du Barça prêté à Getafe, ndlr). À Barcelone, on veut toujours gagner, mais il n’y a plus de patience avec les canteranos. Je suis un gars qui a tout donné pour le Barça, depuis mon plus jeune âge. Mon rêve était d’atteindre l’équipe première. Je l’ai atteint, mais ensuite ils me l’ont enlevé. Ils parlent beaucoup de formation, mais finalement ils font tout l’inverse. »

La politique sportive du Barça semble aujourd’hui reposer intégralement sur les transferts.

Il est loin le temps où le Barça alignait une équipe dont la plupart des membres étaient sortis de la Masia. À ce titre, le 25 novembre 2012 était une date historique. Lors du match contre Levante, onze joueurs issus du centre de formation du Barça étaient alignés ensemble sur le terrain par le coach Tito Vilanova. De cette levée d’exception, il ne reste aujourd’hui que quatre membres, tous devenus trentenaires: Piqué, Sergio Busquets, Lionel Messi et Jordi Alba. Le club doit désormais préparer leur succession, et la tradition du club voudrait qu’elle sorte de la Masia, mais le président Josep Bartomeu ne semble pas l’entendre de cette oreille.

Tout sur les transferts, c’est visiblement la nouvelle politique du Barça. En empruntant deux voies. Directeur technique depuis l’été 2018, Eric Abidal tente visiblement d’attirer en Catalogne de jeunes talents comme Emerson (loué au Betis), Trincão (Braga) ou Pedri (Las Palmas). Et dans le même temps, l’oeil catalan se tourne vers de grands noms, dont on se demande parfois si leur profil est vraiment étudié en adéquation avec l’école du jeu barcelonais. Aujourd’hui, c’est Miralem Pjanic qui est cité, dans un Camp Nou avait récemment vu débarquer des trentenaires comme Arturo Vidal ou Kevin-Prince Boateng. Des signes qui n’indiquent pas vraiment une politique tournée vers le futur.

Cette absence criante de stratégie sportive sera l’un des points sur lesquels le futur président du Barça sera attendu par les socios. Au bout de la saison prochaine, ce sera l’heure des élections, et Josep Bartomeu ne sera vraisemblablement pas candidat.

Le souffle chaud d’Hakimi

Dans la capitale, l’avenir semble beaucoup mieux planifié. Par rapport à son premier passage à la tête du club, avec son armée de Galactiques, le président Florentino Pérez a changé son fusil d’épaule. Finies les offres mégalomanes pour des joueurs à la réputation déjà faite. Thibaut Courtois et Eden Hazard ont été des exceptions, facilités par leur contrat proche de l’échéance qui plaçait Chelsea en position de faiblesse lors des négociations.

Désormais, l’argent est réservé aux teenagers. En janvier, le Real a encore payé 30 millions d’euros Reinier, et lui a offert un contrat jusqu’en 2025. Le Brésilien est le dernier maillon d’une longue chaîne de supertalents, emmenée par Martin Odegaard et complétée par Eder Militão, Achraf Hakimi, Takefusa Kubo, Rodrygo, Vinicius Junior, Federico Valverde, Andrey Lunin ou encore Brahim Diaz. Une constellation mise en évidence sur la pelouse cette saison, notamment au Bernabeu où Vinicius, Rodrygo et surtout Valverde ont gratté du temps de jeu. Le milieu uruguayen a ainsi vu sa valeur marchande grimper à 54 millions d’euros selon Transfermarkt, alors qu’il était arrivé de Peñarol contre cinq millions d’euros en 2017.

Hakimi, Odegaard ou Reguilón jouent tous un rôle majeur dans le club où ils sont prêtés par le Real.

Pour les autres, le bonheur était dans le prêt. Hakimi est l’une des sensations de la saison de Bundesliga, avec neuf buts et dix passes décisives sous les couleurs de Dortmund. De quoi faire sentir son souffle sur la nuque de Dani Carvajal, titulaire du poste d’arrière droit au sein de la Casa Blanca, même si le système de Lucien Favre offre beaucoup d’occasions au Marocain de se mettre en évidence. Et si un retour ne s’imposait pas, Pérez pourrait profiter de la hype Hakimi pour renflouer les caisses, grâce à un joueur aujourd’hui évalué au-delà des 50 millions d’euros.

Si on ajoute qu’Odegaard est l’un des joueurs les plus importants de la Real Sociedad, que Dani Ceballos fait parfois briller le milieu d’Arsenal et que Sergio Reguilón est titulaire à Séville, troisième de la Liga, le Real semble paré face aux potentiels problèmes d’avenir. Sans même parler des jeunes les plus prometteurs de la Fábrica que sont Cristo González, Fran García ou Alvaro Fidalgo, qui espèrent pouvoir gratter quelques minutes de jeu la saison prochaine.

À Madrid, les succès semblent déjà se conjuguer au futur.

Steve Van Herpe

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