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Pourquoi Eden Hazard doit devenir indispensable

Steve Van Herpe
Steve Van Herpe Steve Van Herpe est rédacteur de Sport/Voetbalmagazine.

Enfin lancé dans sa saison, avec deux passes décisives depuis la reprise, le Diable doit devenir l’incarnation du jeu du Real. Parce qu’il pourrait bien être le dernier des Galactiques.

« Je ne suis pas encore un Galactique. J’espère en être un, un jour. Je suis Eden Hazard, et tout ce que j’ai fait dans le passé ne compte pas. Ici, je démarre à zéro. » Voici les mots délivrés par le roi Eden lors de sa présentation faramineuse au Real Madrid, l’été dernier.

Pas encore un Galactique? L’humilité a beau être un atout d’Hazard, il semble détourner l’attention du fait que, dans les mois à venir, supporters et dirigeants du Real attendront des prestations galactiques de celui qu’ils ont acheté pour un montant à neuf chiffres, malgré la proximité de la fin de son contrat.

Ni Gareth Bale, ni Karim Benzema ne sont parvenus à véritablement prendre la relève après le départ de Cristiano Ronaldo.

Depuis le départ de Cristiano Ronaldo, super-Galactique par excellence, lors de l’été 2018, le Royaume de la Casa Blanca, confortablement installé sur ses trois succès consécutifs en Coupe d’Europe, avait semblé s’effondrer d’un seul coup.

Les projecteurs ont forcément cherché une nouvelle cible, parmi celles qui avaient pris l’habitude d’être tapies dans l’ombre confortable de l’ego majuscule de CR7. Dernier achat gargantuesque du Real avant Hazard, Gareth Bale n’a jamais été le chouchou du Bernabéu, et a surtout traîné comme un boulet une irrégularité qui se mariait mal avec ses émoluments plantureux. Si Karim Benzema a bien tenté de prendre la relève, le Français a reçu trop peu de soutien pour devenir le nouveau porte-drapeau de la Maison Blanche.

Le résultat, c’était une institution qui semblait avoir abandonné son appétit au vestiaire, après le triple festin européen. Le football du Real était devenu ennuyeux, prévisible et peu inspiré.

La pression a été déposée sur les épaules du Belge en même temps que le maillot floqué du mythique numéro 7.

Quelqu’un devait incarner un renouveau. Et cette personne, c’est Eden Hazard. Florentino Pérez a présenté sa recrue belge devant 50.000 fans rassemblés dans les tribunes madrilènes l’été dernier. On n’avait plus vu pareille foule pour une présentation au Bernabéu depuis 2009. Ce jour-là, la Casa Blanca présentait un certain Cristiano Ronaldo.

Comme pour remettre quelques kilos de pression sur ses épaules, le Real y dépose bientôt un maillot floqué du numéro 7. Le chiffre magique du Real, porté par des légendes du calibre de Raymond Kopa, Amancio, Emilio Butragueño, Raúl ou Cristiano Ronaldo.

Ajoutez encore que Zinedine Zidane affiche le sourire de celui qui peut enfin compter sur un joueur qu’il réclame depuis des années, ou que Rafael Martin Vázquez – qui a récolté quinze prix au Real entre les eighties et les nineties – décrit pour The Athletic la signature d’Eden comme un coup dans le mille: « Le Real attend qu’il porte l’équipe et qu’il soit décisif. Il est au sommet de son art. À Chelsea, il montre depuis des années que c’est un crack. »

En bref, tous les regards sont alors rivés sur notre compatriote. Loin d’être perméable à la pression, Eden Hazard doit pourtant en avoir le souffle un peu coupé. Arrivé hors de forme au bout de ses vacances, le Diable rouge peine inévitablement à répondre à ces attentes hors-normes.

Les plus grandes précautions sont prises avec le dernier Galactique, parce que chacun au sein du club est conscient de son importance.

Finalement, la crise sanitaire a été une aubaine pour Eden. Elle lui offre l’opportunité de sauver sa saison, et celle du Real. C’est sans doute ce qui explique que le Belge a géré sa revalidation avec sérieux et maturité. Beaucoup plus concentré sur la diététique, suivi de près par le club et boosté par le temps passé en famille lors du confinement, il est probablement plus affûté que jamais cette saison, que ce soit mentalement ou physiquement.

Avec Zidane, Eden peut également compter sur un coach capable de lui confier les clés de l’équipe, mais aussi de lui permettre de souffler s’il pense que c’est nécessaire. Le fait qu’Hazard soit laissé sur le banc dimanche dernier face à la Real Sociedad, pour ce qui était en principe le match le plus difficile du Real depuis la reprise, en dit long. Ce lundi, notre compatriote a également été laissé au repos. Par prévention, a-t-on soufflé depuis les couloirs de la Maison Blanche. Les plus grandes précautions sont prises avec le « dernier Galactique », parce que chacun au sein du club est conscient de son importance. À Madrid, on le sait indispensable. Ses passes décisives délivrées face à Eibar et Valence ont suffi à le rappeler.

Hazard est deux fois moins décisif que lors de sa dernière saison à Chelsea.

Deux passes décisives qui colorent une feuille de stats bien terne depuis le coup d’envoi de son séjour madrilène. En comparaison avec les chiffres de sa dernière saison à Chelsea, Hazard est deux fois moins décisif par match depuis son arrivée à Madrid (0,4 fois par match, contre 0,8 chez les Blues). Pourtant, il fait presque jeu égal avec ses chiffres londoniens en termes de fautes provoquées et de dribbles réussis, une catégorie où seul l’extra-terrestre Lionel Messi fait mieux que lui.

Cerise sur le gâteau, son association avec Karim Benzema commence à faire des étincelles. Zizou veut transformer son duo offensif en couple royal. Depuis quelques semaines, le Français et le Belge font des étincelles, avec une joie de jouer ensemble qui se marque de plus en plus sur leur visage.

Il y a quelques mois déjà, Hazard avait dégainé les louanges pour son partenaire offensif: « Maintenant que j’ai passé du temps sur les terrains avec lui, je pense que c’est le meilleur attaquant du monde. Il rend les autres meilleurs. »

Les comptes de la Casa Blanca sont affectés par les travaux de rénovation du Bernabéu.

La magie qui semble opérer entre Benzema et Hazard, associée au rétablissement prometteur de la cheville droite du Diable, sont un soulagement pour les staffs médical et sportif de la Casa Blanca. Et donnent le sourire à Florentino Pérez, radieux dans les tribunes du stade Alfredo Di Stefano, où le Real joue ses rencontres à domicile pendant les travaux du Bernabéu. Le président sait que son prochain transfert à cent millions n’est pas pour demain.

Pas besoin d’être un as de la compta pour saisir que la situation financière du Real Madrid n’est pas rose. Le club a emprunté 575 millions d’euros pour rénover son stade, un montant qu’il devra rembourser avec intérêts pendant les trente prochaines années, au rythme de 29 millions par an après une exemption initiale de trois ans (le temps des travaux).

Le transfert d’Hazard pourrait être le dernier deal à cent millions du Real avant plusieurs années.

Ce n’est pas tout, puisque les Merengues ont également dépensé 300 millions d’euros lors du dernier mercato estival, n’en récoltant que 110 en transferts entrants. En outre, la crise sanitaire a également fait souffrir les comptes madrilènes. Selon El Confidencial, le Real a dû contracter un prêt – tout comme le Barça – de cent millions d’euros auprès de plusieurs banques pour pouvoir assumer le paiement du salaire de ses stars pendant cette période.

Quoi qu’il arrive, la saison bancaire de la Casa Blanca se conclura dans le rouge. La question majeure est désormais de savoir à quel point le Covid-19 affectera encore les recettes du club la saison prochaine, entre la poursuite possible du huis-clos et la crainte d’une deuxième vague. De quoi raréfier des transferts teintés de démesure, comme celui d’Eden Hazard, dans la capitale espagnole. Une réalité qui pourrait faire du Belge, pour quelques années encore, « le dernier Galactique ». Et qui placera des attentes importantes sur ses épaules: celles d’être le porte-drapeau du projet sportif madrilène pour les années à venir. Indispensable, vous disait-on.

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