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Ligue des Nations : pour ou contre un nouveau format ?

La première Ligue des Nations touche à sa fin. Les Belges affrontent l’Islande ce jeudi et la Suisse dimanche prochain. L’enjeu : la première place du groupe et la qualification pour la finale début juin, sans doute au Portugal.

La première phase de la première Ligue des Nations s’achève cette semaine. L’UEFA compte organiser ce nouveau tournoi tous les deux ans, dans les mois suivant un EURO ou un Mondial. A l’issue des matches de poules, on dispute du 5 au 9 juin la finale opposant les vainqueurs des groupes de Ligue A.

Ce mini-tournoi se déroule par élimination directe pour désigner le premier lauréat. Deuxième épisode du 26 au 31 mars 2020 : ceux qui ne se sont pas qualifiés pour l’EURO 2020 ont une dernière chance durant ce tournoi.

Qu’apporte cette Ligue des Nations ? Un : de l’argent supplémentaire pour les lauréats. Le vainqueur de son groupe, en Ligue A, perçoit 2,25 millions d’euros, contre 1,5 million pour la Ligue B, 1,25 million en Ligue C et 750.000 euros en Ligue D. Les pays peuvent augmenter ce montant avec les primes et la taxe de solidarité.

L’été prochain, les lauréats de Ligue A pourront encore gagner plus d’argent grâce aux finales. Le vainqueur empoche six millions, le finaliste perdant 4,5 millions, la troisième place vaut 3,5 millions et l’accessit 2,5 millions.

Qu’apporte cette Ligue des Nations sur le plan sportif ? Plus de matches compétitifs puisque de bonnes prestations ne rapportent pas seulement de l’argent mais permettent de monter ou évitent de descendre (A, B, C). Plus un classement. Début décembre, à Dublin, lors du tirage au sort des qualifications pour l’EURO, la répartition des pots se fera sur base des prestations en Ligue des Nations.

Cette pression a déjà entraîné un limogeage. Le 25 octobre, la Grèce a renvoyé Michael Skibbe. L’Allemand avait été engagé en 2015, après l’élimination de la Grèce en qualifications pour l’EURO. Elle a ensuite été éliminée dans les barrages pour le Mondial par la Croatie, future finaliste, mais comme tout le monde était content de son travail, Skibbe avait prolongé son contrat jusqu’en 2020. Ses mauvais résultats en Ligue C (deux victoires et deux défaites) lui ont été fatals.

Plus de pression mais aussi plus de belles affiches. Au lieu de s’éviter pendant deux ans, si ce n’est dans des matches amicaux peu agréables dans la mesure où on procède à des tests, les grandes nations s’affrontent. Nous avons déjà eu deux duels entre la France et l’Allemagne ainsi qu’entre l’Angleterre et l’Espagne et, cette semaine, les matches Italie-Portugal et Croatie-Espagne seront décisifs pour la première place.

Des voix discordantes

C’est justement ce qui dérange les entraîneurs de clubs. Leurs internationaux ont déjà vu leurs vacances écourtées par un grand tournoi et sont de nouveau remis à la disposition de leur équipe nationale. Le Real Madrid impute ses mauvaises prestations de l’automne à un syndrome post-Mondial. En opposant des équipes de niveau similaire dans des matches à enjeu, on accorde encore moins de repos aux joueurs alors qu’avant, ils pouvaient plus aisément déclarer forfait pour des matches amicaux contre des équipes de moindre format.

Le 19 octobre, Jürgen Klopp (Liverpool) a été le premier à critiquer ouvertement la Ligue des Nations.  » Cette compétition est superflue. Un grand boxeur (Klopp a pris l’exemple du poids lourd britannique Anthony Joshua) ne monte pas sur le ring chaque semaine. Il n’y a qu’en football que tout tourne constamment autour de la victoire, de la promotion ou de la descente. J’aime la compétition mais parfois, quelqu’un doit dire stop. On parle d’êtres humains.  » Klopp affirme être partisan du principe de la Ligue des Nations mais pas… en football.  » Il n’y a plus de place au calendrier.  »

La sortie de Klopp n’est pas injustifiée. En octobre, quatre de ses joueurs sont revenus blessés : Keita, Salah, Mané et Van Dijk. Une nuance : les trois premiers sont africains et seul Van Dijk, qui s’était déjà blessé en championnat, a disputé l’intégralité du match contre l’Allemagne.

Jogi Löw a paré la critique de Klopp en rappelant que les entraîneurs n’aimaient jamais perdre leurs joueurs dix jours mais que ça n’avait rien à voir avec la Ligue des Nations. En Allemagne, Löw a pourtant été confronté à un autre inconvénient possible de cette compétition : l’obligation d’obtenir des résultats semble freiner le renouvellement du noyau.

L’Allemagne restait sur une Coupe du monde décevante mais Löw est resté fidèle aux champions du monde 2014. Les Müller, Neuer, Hummels et autres anciens sont restés en poste et n’ont pas retrouvé leur panache. Löw n’a changé son fusil d’épaule qu’après sa défaite 3-0 contre les Pays-Bas, confronté à une possible relégation.

En France, les jeunes ont subitement été titularisés : Leroy Sané, Thilo Kehrer, Serge Gnabry, Niklas Süle, tous âgés de 22 ou 23 ans, plus Nico Schulz (25 ans).

La logique du groupe

Le scénario est identique en France. Jeudi dernier, Didier Deschamps a repris 19 Russes sur 23. Les autres étaient blessés. Le scénario s’était déjà présenté lors des deux premières sélections. La France ne manque pas de talents mais Deschamps ne renouvelle pas son équipe, même si on peut s’interroger sur la fraîcheur de Mandanda, Pavard, Sidibé, Thauvin ou Rami.

Eden Hazard : sur sa lancée du Mondial en Ligue des Nations.
Eden Hazard : sur sa lancée du Mondial en Ligue des Nations.© BELGAIMAGE

L’entraîneur appelle ça la logique du groupe. Il a reconnu que certains internationaux étaient en méforme mais  » ces quelques mois ne vont pas me faire changer d’avis sur un joueur.  »

Le noyau français est encore relativement jeune. Contrairement à Löw, Deschamps n’est pas obligé de le rajeunir mais le constat s’impose : la Ligue des Nations ralentit ce processus. Vincent Duluc, journaliste de L’Equipe, l’a relevé. Jeudi, il a twitté :  » Nous sommes manifestement dans une phase où la concurrence n’existe plus en équipe nationale de France. Il ne sert à rien de briller dans son club si un champion du monde français, même écarté dans le sien, n’est pas blessé.  »

La même discussion fait rage en Espagne. Jeudi, Luis Enrique a dévoilé sa sélection. Avec un seul thème pendant la conférence de presse – sept des 18 questions portaient sur le retour de Jordi Alba (29) -. Il est légitime en soi car Alba est le meilleur à son poste et Enrique, nommé sélectionneur après le Mondial, l’avait dédaigné deux fois (selon les mauvaises langues parce qu’ils s’étaient disputés à Barcelone). Mais là encore, dans les grands moments, tous les entraîneurs comptent sur les joueurs les plus expérimentés. C’est ainsi que le très critiqué Sergio Ramos reste le pion majeur de la défense.

Les visages connus

C’est la même chanson chez les Diables Rouges. Nous avons découvert de nouveaux visages dans les matches amicaux mais en Ligue des Nations, Roberto Martinez s’est rabattu sur ce qu’il appelle les familiar faces. Les visages connus. Même en réserves, il n’y a pas de joueur absent de la Coupe du monde.

En divulguant son noyau vendredi, il a estimé que c’était normal.  » Le délai est trop court pour lancer de nouveaux joueurs. Ce sera possible à partir du mois de mars.  » Dans une première évaluation, il qualifie la Ligue des Nations de  » succès « , de chance supplémentaires de disputer des matches à enjeu, entre les douze meilleures nations.

Il comprend les critiques des entraîneurs de clubs : leurs relations seront toujours tendues. Martinez :  » En ce qui concerne l’éclosion des jeunes, je ne vois pas le moindre péril. Il est beaucoup plus difficile de juger correctement un footballeur dans un match amical.  »

Jürgen Klopp et Joachim Löw : pas toujours d'accord...
Jürgen Klopp et Joachim Löw : pas toujours d’accord…© BELGAIMAGE

L’état des lieux

Où en est-on, à une ou deux journées de la fin ?

Ligue A

La France, championne du monde en titre, a les meilleures chances dans le groupe 1. Vendredi, un point lui suffit, contre les Pays-Bas, pour terminer première. Si les Pays-Bas gagnent leurs deux matches, contre la France et en Allemagne, ils vont en finale. L’Allemagne ne peut plus prétendre à la première place et descendra si les Pays-Bas battent la France. Sinon, le match de Berlin sera décisif pour la relégation.

Dans le groupe 2, les Belges sont maîtres de leur destin. Un quatre sur six suffit. L’Islande descend en Ligue B. Dans le groupe 3, la Pologne est reléguée et on va suivre Italie-Portugal. Une victoire, à Milan ou à domicile contre la Pologne, suffit pour la victoire finale. Le premier du groupe pourra organiser la finale, du 5 au 9 juin.

Le groupe 4 est encore ouvert : l’Espagne, l’Angleterre et la Croatie peuvent encore s’imposer, ces deux dernières nations risquent aussi la descente.

Ligue B

L’Ukraine est première du groupe 1 et assure du même coup sa montée en Ligue A. Lundi, la Tchéquie et la Slovaquie s’affrontent à Prague, pour éviter la descente. La Russie est en tête du groupe 2 mais ne sera assurée de la victoire et de la montée que si la Suède ne gagne pas ses deux matches (Turquie et Russie). La Suède risque la rétrogradation.

Dans le groupe 3, il suffit à la Bosnie-Herzégovine de faire match nul en Autriche pour être première. Si l’Autriche gagne ses deux matches, en Irlande du Nord, qui a zéro point, elle est première. Dans le groupe 4, le Pays de Galles peut être premier s’il bat le Danemark vendredi à Cardiff. Un quatre sur six et c’est le Danemark qui monte. Danemark-Irlande peut être décisif pour la rétrogradation.

Ligue C

Ici, le groupe 1 est le seul qui comporte trois participants au lieu de quatre. Israël (6 points), l’Écosse et l’Albanie (trois) peuvent encore monter. Si l’Albanie prend la mesure de l’Écosse chez elle et que celle-ci bat Israël, les trois pays sont à égalité et le goal-average est décisif. Dans le groupe 2, la Finlande, en déplacement en Grèce, est la mieux lotie tandis que l’Estonie est la plus préoccupée.

Le groupe 3 est passionnant. La Norvège et la Bulgarie sont en tête ex-æquo. Les Norvégiens ont encore deux déplacements, la Bulgarie joue une fois sur ses terres. La Slovénie doit signer un 4/6 pour faire descendre Chypre. Dans le groupe 4, la Serbie, le Monténégro et la Roumanie peuvent encore monter. La Serbie reçoit le Monténégro et la Lituanie et semble favorite. La Lituanie doit gagner ses deux matches pour assurer son maintien. Le plus mauvais troisième de Ligue C est également rétrogradé.

Ligue D

Dans le groupe 1, la Géorgie est déjà assurée de monter. Dans le groupe 2, le leader, le Luxembourg, reçoit la Biélorussie demain. S’il gagne, il est promu. Dans le groupe 3, le Kosovo a deux points d’avance sur l’Azerbaïdjan. Si le Kosovo s’impose à Malte vendredi, il est premier de sa poule. La Macédoine emmène le groupe 4. Un quatre sur six contre le Liechtenstein et Gibraltar suffit pour la montée.

Ligue des Nations : pour ou contre un nouveau format ?
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Le filet de secours européen

Cette semaine, des billets pour l’EURO 2020 sont en jeu en Ligue des Nations. Les qualifications ne débutent qu’en mars 2019 et se poursuivent en juin, septembre, octobre et novembre. Le tirage au sort se déroule le 2 décembre à Dublin. Le Kosovo, déjà en lice en Ligue des Nations, est le nouveau venu. Pour la première fois, aucune nation n’est automatiquement qualifiée. Les deux premiers de chaque poule disputeront le tournoi.

Il restera quatre places et c’est là qu’intervient la Ligue des Nations. Les vainqueurs des poules disputeront les play-offs en mars 2020. Chaque Ligue (A, B, C et D) enverra un participant à l’EURO. Les demi-finales opposent les numéros deux et trois et les numéros un et quatre. Les lauréats s’affrontent ensuite fin mars pour le billet de leur ligue, en un seul match.

L’Ukraine en Ligue B et la Géorgie en Ligue D sont déjà qualifiées. Si elles se qualifient normalement pour l’EURO par la voie classique, ce qu’on peut attendre de la plupart des pays classés en A et B, d’autres nations performantes en Ligue des Nations mais ayant échoué en qualifications bénéficieront un repêchage.

Elles combleront les places vides de bas en haut, de D à A. Mais les lauréats des poules resteront toujours en finale de leur ligue. Si l’Ukraine loupe ses qualifications, elle ne pourra jamais se rattraper contre des équipes de Ligue A, la Géorgie ne pourra affronter des équipes de A, B ou C. C’est aussi pour cette raison qu’il est important, cette semaine, de terminer premier de sa poule.

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