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Les raisons de l’exceptionnelle saison de l’AS Monaco

Maxime Defays Journaliste

Même si le club de la Principauté n’est pas (encore) officiellement champion, les chances que le titre lui échappe sont proches de 0. Un entraîneur audacieux, une attaque de folie, des révélations… Retour sur les raisons d’un succès impressionnant, tant sur la scène nationale que continentale.

Lundi soir, l’AS Monaco a pratiquement tout raflé lors de la cérémonie des trophées UNFP (Union Nationale des Footballeurs Professionnels), qui récompense le meilleur joueur de l’année en Ligue 1, le meilleur entraîneur, le meilleur espoir, le meilleur gardien, ainsi que le plus beau but de la saison. Leonardo Jardim, le mentor monégasque, a été élu, sans grande surprise, meilleur entraîneur de l’élite, Danijel Subasic, meilleur gardien, et Kylian Mbappé, véritable sensation et révélation de la saison, meilleur espoir. Mieux encore, dans le 11 type de l’année, on retrouve 6 Monégasques : Subasic, Sidibé, Glik, Mendy, Bernardo Silva et Mbappé.

Même si Monaco n’a pas pu officiellement soulever son 8e titre de champion de France lors de sa victoire contre Lille le week-end dernier (4-0), il faudrait plus qu’un miracle pour qu’ils ne soient pas sacrés. En effet, les Principautaires comptent 3 points d’avance sur le PSG, avec 1 match à disputer en plus (contre Saint-Étienne mercredi soir), avec une différence de buts impossible à combler (+ 17). Le dernier sacre monégasque en Ligue 1 (qui s’appelait encore D1 à l’époque) remonte à l’an 2000.

Une remontée spectaculaire

Entre 2005 et 2010, l’AS Monaco (qui sortait d’une finale de Ligue des Champions perdue contre Porto), va progressivement s’installer dans le ventre mou de la Ligue 1, avant de connaître plusieurs ennuis d’ordre financier, qui vont le précipiter tout droit vers la Ligue 2, à la fin de l’exercice 2010-2011, après 34 ans passés au sein de l’élite française. En décembre 2011, le club est même dernier de Ligue 2, avant que le club n’accepte d’ouvrir son actionnariat à un milliardaire étranger, Dmitry Rybolovlev. Après plusieurs gros investissements sportifs et une belle 2e partie de saison, Monaco terminera 8e, avec un certain Claudio Ranieri à sa tête, et devra attendre l’année suivante pour regoûter à la Ligue 1, en terminant champion.

Dès sa remontée, le club affiche ses (très hautes) ambitions et fait montre d’une puissance financière impressionnante, avec les recrutements de Moutinho, James Rodriguez, Falcao ou encore Ricardo Carvalho, Jérémy Toulalan, Éric Abidal, Anthony Martial et Geoffrey Kondogbia. Avec cette « armada », le club principautaire terminera 2e derrière Paris et totalisera 80 points, soit le record du club.

L’année suivante, Monaco se sépare de Claudio Ranieri, remplacé par Leonardo Jardim. James s’en va au Real, et les recrutements ne suivent pas vraiment. Le club termine 3e de Ligue 1 et est éliminé en quarts de finale de la Ligue des Champions par la Juventus, après avoir notamment sorti Arsenal, au tour d’avant.

A l’été 2015, Monaco recrute plusieurs jeunes de Ligue 1 comme Lemar, Bahlouli (ex-Standard), Jean ou Saint-Maximin, mais aussi à l’étranger, comme El Shaarawy, Gabriel Boschilia (ex-Standard), Ivan Cavaleiro ou encore Guido Carrillo, après s’être séparés de Carrasco, Martial et Kondogbia. Les Monégasques termineront 3e mais ne rééditent pas leur beau parcours européen de l’année précédente. Eliminés au dernier tour de qualification par Valence, ils sont reversés en Europa League avec, notamment, le Sporting d’Anderlecht, mais se classent 3e du groupe, et sont éliminés.

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2016-2017, une année exceptionnelle

À l’aube de la saison 2016-2017, l’ASM peut compter sur le retour de prêt de son striker Radamel Falcao, mais perd Toulalan, qui file à Bordeaux, et recrute, par exemple, le défenseur robuste du Torino Kamil Glik et fait revenir son attaquant Valère Germain, prêté à Nice, mais aussi les défenseurs latéraux Djibril Sidibé (à droite) et Benjamin Mendy (à gauche).

Le club doit passer deux tours s’il souhaite figurer en phase finale de la Ligue des Champions. Après avoir été battus au match aller au Fener, les hommes de Jardim inversent la tendance à domicile, et retrouvent Villarreal pour le match de barrage. et se qualifient sans trop de problèmes contre le club espagnol (1-3 au cumulé). Les Monégasques seront reversés dans un groupe sans « grosses pointures », avec le CSKA, Tottenham et Leverkusen.

Entre temps, Monaco marque déjà le coup après sa victoire contre Paris à domicile (3-1) lors de la 3e journée, et prouve à tous qu’il faudra bien compter sur eux sur cette saison. Après une grosse défaite à Nice (4-0), les Principautaires vont enchaîner les victoires plantureuses, notamment un 0-7 à Metz, un 6-2 contre Montpellier, un 6-0 contre Nancy ou encore un 4-0 contre l’Olympique de Marseille. Les buteurs sont multiples et se nomment Falcao, Germain, Carrillo, Boschillia, Lemar ou encore… Mbappé.

En Ligue des Champions, les Monégasques terminent finalement premier de leur poule et vont défier Manchester City en 8e de finale. Après un revers 5-3 subi en Angleterre, Monaco s’impose 3-1 au match retour, et retrouve le Borussia Dortmund en quarts, qu’il bat finalement 6-3 au cumul des deux matchs. Monaco devient le premier club à atteindre les demi-finales après avoir commencé son parcours au 3e tour préliminaire. Malheureusement pour eux, ils tombent sur une Juventus bien trop expérimentée, et voient leur rêve européen s’arrêter net.

Les Monégasques ont connu une 2e partie de saison fulgurante, surtout avec la révélation et la montée en puissance du (très jeune) Kylian Mbappé, 18 ans à peine. L’attaquant rouge et blanc aura inscrit 6 buts dans la compétition continentale, et aura attiré sur lui tous les projecteurs et les envies les plus folles des plus grands clubs européens.

En coupes nationales, le parcours de Monaco est tout aussi remarquable. Il s’incline en finale de la Coupe de Ligue contre le PSG et est éliminé contre celui-ci (mais ce sont les jeunes qui ont joué, pour rester « frais » avant la Ligue des Champions) en demi-finale de Coupe de France. Mais en championnat, les hommes de Jardim impriment un tempo d’enfer et enchaînent les succès. Les Monégasques en sont actuellement à 10 victoires d’affilée. Le nul arraché en toute fin de match à Paris fin janvier aura peut-être été le tournant de la saison.

Les 100 buts dépassés

Le dispositif installé par Jardim cette année (un 4-4-2, voire un 4-2-4) s’est voulu résolument offensif, avec une possession de balle importante et une vitesse d’exécution vers l’avant impressionnante. Les Monégasques, après 36 journées (28 victoires, 5 nuls et 3 défaites), affichent un bilan de 102 marqués pour 29 encaissés, soit une différence de buts de + 73. Sur le Rocher, tout le monde peut scorer, et ce n’est pas étonnant si 9 joueurs différents ont marqué plus de 6 buts: Falcao en compte 21, Mbappé 14, Germain et Lemar 9, Bernardo Silva et Fabinho 8, Carrillo 7, Boschilla et Glik 6 chacun.

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Jardim, la clé de voûte du succès monégasque

Leonardo Jardim, débarqué du Sporting Portugal en 2014, est arrivé à Monaco avec la réputation d’être un entraîneur aux défenses « très regoupées », ce qui lui a valu certaines critiques par le passé. « Après avoir reçu la truelle d’or en 2014 et 2015, c’est une progression » a dit dans un sourire celui qui avait la réputation de bétonner, jusqu’à cette année, après avoir été désigné meilleur entraîneur de Ligue 1, lundi soir.

Le coach portugais s’est révélé comme la clé de voûte de l’excellente saison de Monaco, grâce à sa stratégie résolument offensive, mais aussi par sa proximité avec ses joueurs. L’avenir du Lusitanien s’écrit pourtant encore en pointillé, car les intérêts des grandes écuries européennes ne manquent pas, comme celui du PSG, par exemple.

Les révélations et les confirmations

Cette saison, Monaco aura réussi à combiner puissance de feu offensive et organisation défensive sérieuse. Derrière, Jemerson (recruté en janvier 2016) et Glik (engagé cet été) ont réussi à donner une stabilité défensive au jeu monégasque. Danijel Subasic, désigné meilleur gardien du championnat, a gardé ses cages inviolées à 16 reprises, en 35 matchs. Les arrivées de Djibril Sidibé de Lille et de Benjamin Mendy de Marseille, récents « Bleus », auront donné de l’allant aux « backs » droit et gauche de la défense.

Au milieu de terrain, Fabinho, « Monsieur pénalty » (7 cette saison), est devenu le grand dépositaire du jeu monégasque. Déjà auteur d’une bonne saison l’année dernière, le Brésilien s’est affirmé à la récupération, aux côtés de Tiémoué Bakayoko, peu utilisé lors de ses deux premières saisons à Monaco, et qui a été appelé par Didier Deschamps pour la première fois en mars dernier. Thomas Lemar, arrivé au club princier en 2015, et déjà, lui aussi, intéressant lors de sa première année, s’est véritablement révélé au grand public cette saison, sur son flanc gauche, et totalise actuellement 9 buts pour 6 passes décisives. Il est appelé pour la première fois en sélection nationale en novembre 2016.

Bernardo Silva, prêté dans un premier temps par Benfica, est définitivement acquis par Monaco en janvier 2015. L’aisance technique et la vision du jeu de l’ailier Portugais se sont encore plus affirmées cette saison. Auteur de 8 buts et 6 passes décisives, il était, au trophée UNFP, en course pour le titre de « meilleur joueur » de Ligue 1, récompense qui a finalement été attribuée à Edinson Cavani.

Radamel Falcao, après une grave blessure il y a trois ans et deux expériences à Manchester United et Chelsea peu concluantes, revit littéralement cette année, avec 21 buts marqués en championnat.

Mais la plus grande révélation cette saison, c’est bien sûr celle de Kylian Mbappé. Le natif de Bondy, en banlieue parisienne, aura complètement explosé en 2e partie de saison, après un triplé inscrit contre Metz et surtout 6 buts marqués en Ligue des Champions. Lancé en décembre 2015 sans avoir 17 ans, le jeune attaquant français marque son premier but en février 2016. Cette année, il affiche à son compteur 14 buts et 8 passes décisives en Ligue 1. Le rêve se poursuit pour lui quand il est appelé pour défendre les couleurs de son pays, pour la première fois, en mars 2017.

Jardim aura réussi à tirer le meilleur de ses joueurs, en n’hésitant pas à aller contre sa philosophie des années précédentes pour imposer une tactique très offensive à son équipe.

Les joueurs et le coach se sont montrés assez prudents après la rencontre face à Lille, en ne criant pas déjà victoire, mais il ne subsiste aujourd’hui plus aucun doute sur leur victoire finale. Pour que la fête soit maintenant officielle, il ne reste plus à Monaco qu’à prendre un point contre Saint-Étienne, mercredi soir, au Stade Louis-II, pour venir mettre un point final à une saison exceptionnelle.

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