« La question est de savoir si Anderlecht a le matériel nécessaire pour le projet de Kompany »

Supposons que vous soyez entraîneur d’Anderlecht. Après un 2 sur 12, vous vous rendez à Genk, champion en titre, pour le premier match au sommet de la saison.

Alors que votre équipe éprouve déjà des difficultés à marquer, vous alignez Samir Nasri en pointe tout en sachant qu’il préfère toucher souvent le ballon (et va donc décrocher). En défense, vous mettez un droitier ( Sieben Dewaele) à gauche afin de tenir l’homme en forme de Genk, le Japonais Junya Ito.

La question est donc de savoir si Anderlecht a le matériel nécessaire pour le projet de Kompany.

Vous perdez, votre équipe n’a placé qu’un tir cadré et votre attaquant a déçu. Comme prévu. N’importe quel entraîneur d’Anderlecht qui ferait ça serait fortement critiqué. Mais pas Vincent Kompany. Ça prouve qu’il a du crédit, qu’on croit en son projet. Mais quel projet ? Et cette foi est-elle justifiée ?

Les fans et les amateurs de bon football estiment qu’Anderlecht doit jouer de cette façon. C’est l’école néerlandaise. Même si, pour le moment, on s’ennuie. Car en possession de balle, Anderlecht a encore d’énormes lacunes. Individuellement, chaque jouer a de la technique mais l’ensemble n’est pas suffisamment fort pour repartir de sa ligne de but et éliminer l’adversaire. Tout ça, parce que la vitesse d’exécution n’est pas suffisamment élevée.

Les autres clubs l’ont compris et pressent haut. Anderlecht fait circuler le ballon latéralement ou en arrière, il a la possession de balle mais ne crée pratiquement aucun danger. Cette vitesse d’exécution sera-t-elle meilleure lorsque les joueurs auront acquis des automatismes et de la condition physique ? Ou le projet de Kompany, dont les prestations individuelles sont favorisées par ce style de jeu, en restera-t-il au stade des bonnes intentions ?

Le deuxième problème se situe plus haut. En faisant circuler le ballon, Anderlecht permet à l’adversaire de se regrouper. Et en pratiquant par des changements d’aile, il favorise les duels. À Genk, Kompany y est parvenu quelques fois en adressant un long ballon aérien à Nacer Chadli. Mais le Liégeois est-il capable de jouer rapidement en un contre un ? Et à droite, il n’y a personne.

Troisième problème : qui doit jouer dans le rectangle ? La question est donc de savoir si Anderlecht a le matériel nécessaire pour le projet de Kompany. Le club n’est-il pas confronté à un dilemme insurmontable parce qu’il ne peut pas à la fois pratiquer du beau football et gagner ?

Les choses sont bien différentes à Bruges qui s’est donné les moyens de mettre sans cesse la barre plus haut. Depuis que Bart Verhaeghe a lancé son projet en 2011, le chiffre d’affaires a été multiplié par trois. Cet été, le Club a beaucoup transféré. Ce mercredi, l’équipe pourrait encore gagner 20 millions en se qualifiant pour la phase finale de la Ligue des Champions, ce qui permettrait à notre pays d’avoir deux représentants en phase de poules. Cela n’est plus arrivé depuis la saison 2005-2006 (Anderlecht et le Club Bruges). Les nouvelles règles de qualification et un tirage plus favorable ont certes donné un coup de pouce mais le Club ne devrait avant tout cette performance qu’à lui-même.

Hans Vanaken
Hans Vanaken© belgaimage

Bruges se veut également ambitieux au niveau européen. L’objectif est de sortir des poules de la Champions League. Avec, en toile de fond, la prochaine réforme des compétitions européennes (voir page 60). À l’heure où les géants européens prennent de plus en plus d’avance, Bruges veut accrocher le deuxième wagon et faire figure de partenaire fiable. Les sources de rentrées européennes sont toujours instables. Qu’en sera-t-il après 2024 ? Mieux vaut donc faire un effort dès maintenant. C’est ainsi que Hans Vanaken s’est vu proposer un salaire qu’aucun club de Bundesliga (hormis Dortmund, le Bayern et Wolfsburg) ne pourrait lui offrir. Et le contrat de Simon Mignolet est digne de ce que Benfica et Porto peuvent proposer.

La puissance d’un projet, les dirigeants du hockey belge pourraient vous en parler aussi. Il y a dix ans encore, on disait que les Belges étaient trop faibles mentalement. Aujourd’hui, ils sont champions du monde et d’Europe. Ils sont aussi favoris pour les Jeux Olympiques. Les gagnants, ça se forme. Tout projet peut aboutir mais à long terme seulement. Dix ans pour le hockey, neuf ans pour le Club Bruges 2.0.

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