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La Lazio, club de fachos ?

Pour lutter contre un stéréotype profondément enraciné qui fait de l’équipe romaine un club aux tifosi uniformément d’extrême-droite, des groupes de supporters se sont organisés et défendent la possibilité d’une identité « laziale et anti-fasciste ».

L’aigle emblématique de la Lazio qui brise le faisceau, symbole du parti fasciste de Mussolini, sous le slogan « Love Lazio, Fight Fascism »: c’est l’un des stickers, élément central de la culture Ultras, distribués gratuitement par le groupe « Laziale e Antifascista » avec pour mission d’en recouvrir d’autres, racistes, antisémites ou fascistes.

Créé en 2011, « Laziale e Antifascista » (LAF) a pour objectif « de détruire le stéréotype du laziale fasciste en Italie et dans le monde », a expliqué par écrit à l’AFP un des administrateurs de la page Facebook du collectif ayant demandé l’anonymat, le groupe ne souhaitant pas être « représenté par une personne ».

LAF revendique plusieurs milliers de sympathisants, plusieurs centaines de membres actifs, et dit poursuivre un double objectif: « effacer du nom de la Lazio toute étiquette politique infamante » et « empêcher que des mouvements néo-fascistes continuent à utiliser le virage Nord pour faire du prosélytisme et endoctriner des jeunes qui étaient entrés au stade uniquement pour soutenir la Lazio ».

Mais la mission n’est pas simple dans un contexte pesant, qui voit le club romain régulièrement sanctionné pour les débordements politiques d’une partie de ses supporters.

Bras tendus

Jeudi, lors de la réception du Celtic Glasgow en Ligue Europa, une rencontre pour laquelle des mesures de sécurité exceptionnelles ont été prises, la Curva Nord du Stade Olympique sera ainsi fermée, l’UEFA ayant puni les saluts fascistes remarqués lors du match contre Rennes.

Au match aller en Ecosse, des supporters romains avaient de nouveau défilé bras tendu en centre-ville puis avaient été accueillis au stade par une banderole des fans du Celtic représentant Mussolini pendu par les pieds à côté du message « Follow your Leader ».

Au mois d’avril à Milan, des supporters romains avaient justement rendu hommage au dictateur avec une banderole « Honneur à Benito Mussolini » déployée Piazzale Loreto, là où son cadavre avait été exposé puis suspendu tête en bas en 1945. La banderole était signé « IRR » comme Irriducibili, le principal groupe Ultra de la Lazio.

« La Curva Nord est sous l’hégémonie des Irriducibili depuis 30 ans. Ils l’ont conquise avec l’aide de la criminalité organisée aux dépens des Eagles Supporters », explique le responsable de LAF, en référence au groupe peu politisé qui a dominé le virage de la fin des années 1970 à celle des années 1980.

Chez les Irriducibili, « si on parle de militants réellement actifs politiquement, on parle en dizaines, ça n’est même pas une centaine », avait expliqué en 2017 à l’AFP Sébastien Louis, sociologue spécialiste du supporterisme radical en Europe.

Mais le poids de cette frange suffit à effacer largement de la mémoire collective tout ce qui dans l’histoire de la Lazio l’éloigne justement du fascisme, notamment son refus de participer à la fusion de différents clubs romains souhaitée par Mussolini et ayant entraîné la naissance de l’AS Rome en 1927.

Menaces

De leur côté, les antifascistes tentent donc de faire vivre une autre image, avec le soutien de supporters d’autres clubs, à l’image de la soirée organisée mercredi à Rome par des fans du Celtic et par le groupe Laziali di Sinistra (Laziale de gauche, ndlr) dans un centre social de la capitale.

« Parmi nous, sont actifs des communistes, des anarchistes, des socialistes, des sociaux-démocrates, des libéraux et d’autres qui n’en ont rien à foutre. Ca n’est pas l’idéologie politique qui compte mais la façon dont on vit activement son antifascisme », détaille le responsable de LAF.

Mais peuvent-ils faire entendre cette voix au stade ? « Plusieurs groupes sont présents à l’Olimpico, dans différents secteurs, mais pour l’instant sans signes de reconnaissance », reconnaît-il, faisant état de « menaces continuelles ».

« Mais cela montre que ce qu’on fait est utile et leur pose des problèmes. Nous nous opposons au prosélytisme dans le stade, qui est le principal instrument de soutien dont disposent les partis néo-fascistes romains », assure-t-il.

Un phénomène qui ne serait pas circonscrit à Rome, puisque selon lui « la grande majorité des virages italiens est aux mains de groupes néo-fascistes ». Les incidents du week-end à Vérone autour de Mario Balotelli en sont une illustration.

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