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La justice américaine, nouvelle terreur des terrains de sport

Après le cycliste Lance Armstrong ou le comité d’organisation des JO-2002, la Fédération internationale de football (FIFA) fait depuis mercredi les frais d’une justice américaine implacable, habituée à exposer les côtés sombres du monde sportif.

Après avoir inculpé 14 personnes, dont neuf actuels et anciens élus de la FIFA, pour corruption, racket et blanchiment, le procureur fédéral par intérim de Brooklyn, Kelly Currie, a prévenu le monde du football. « C’est le début de notre effort, pas la fin », a-t-il lancé alors que l’acte d’accusation entend démontrer que les 14 inculpés ont « corrompu les affaires du football mondial pour servir leurs intérêts et pour s’enrichir personnellement ».

La justice américaine a obtenu que la police suisse intervienne au petit matin dans un hôtel de Zurich, où sont logés les principaux dirigeants de la FIFA avant le comité exécutif de l’instance internationale vendredi. Sept personnes ont été placées en détention et font l’objet d’une demande d’extradition américaine: pourtant, aucun n’est Américain ou n’a commis de délit aux Etats-Unis.

« Il suffit qu’il y ait une connexion même minime avec les Etats-Unis pour que la justice puisse intervenir dans un dossier », explique Jessica Tillipman, professeur de droit à l’université George Washington. « On a vu des affaires où le seul lien avec les Etats-Unis était le transit par un serveur américain d’un courrier électronique entre deux ressortissants étrangers utilisant des adresses électroniques étrangères », rappelle-t-elle. « Dès qu’il y a la moindre petite entrée, la justice américaine n’hésite pas à intervenir », résume l’universitaire.

Les 47 chefs d’inculpation retenus par la justice américaine dans le scandale de la FIFA portent sur une période de 25 ans et des sommes d’un montant global de 150 millions de dollars en pots-de-vin et rétro-commissions en échange de droits TV et marketing pour des tournois internationaux.

« Le but pour le ministère de la Justice est de voir qui parmi les inculpés est prêt à coopérer en échange d’une peine réduite ou d’une simple amende », explique Jessica Tillipman. « Leur cible ultime, ce sont les gros poissons », prévient la professeur de droit.

Cette nouvelle procédure contre une instance sportive rappelle celle lancée en 1999 par les autorités fédérales contre des membres du comité d’organisation des jeux Olympiques d’hiver de Salt Lake City de 2002. Deux des responsables, Thomas Welch et David Johnson, ont été inculpés de corruption avant d’être blanchis en 2003.

Mais la justice américaine a donné un coup de pied dans la fourmilière et conduit le Comité international olympique (CIO) à revoir ses procédures d’attribution des JO pour limiter toute possibilité de corruption.

La justice américaine s’est montrée encore plus efficace dans les affaires de dopage. Elle a démantelé le réseau organisé autour du laboratoire Balco à San Francisco et fait tomber plusieurs champions de renom comme Marion Jones, triple championne olympique d’athlétisme déchue de ses titres et condamnée à six mois de prison pour parjure, ou la star du base-ball Barry Bonds.

L’ancien « boss » du cyclisme professionnel, Lance Armstrong, est tombé lui à cause d’un ancien coéquipier, Floyd Landis, devenu taupe de la justice américaine qui l’a piégé avec une caméra et un système d’enregistrement miniature.

Le procédé a été utilisé à nouveau dans le cadre de l’enquête sur la FIFA: Chuck Blazer, ancien membre du comité exécutif de l’instance internationale, a enregistré pour le compte du FBI des conversations avec certains des 14 inculpés en marge des JO-2012 de Londres. Un travail de longue haleine, digne d’une enquête contre un réseau mafieux, qui n’a sans doute pas fini de porter ses fruits.

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