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L’icône Bjorn Ruytinx évoque les vingt ans d’OHL: « King Power a compris qu’il faut aussi construire quelque chose au niveau local, et pas seulement au niveau international »

Matthias Stockmans
Matthias Stockmans Matthias Stockmans is redacteur van Sport/Voetbalmagazine.

Le 16 avril dernier, OHL a célébré son vingtième anniversaire. Il sera fêté en grande pompe cet été. Sport/Foot Magazine a rencontré le meilleur buteur de l’histoire du club, Bjorn « El Toro » Ruytinx, pour revenir sur la courte histoire mais mouvementée de l’équipe louvaniste ?

Après des années de discussions, le 16 avril 2002, le Stade Leuven, le Daring Leuven et les Zwarte Duivels d’Oud-Heverlee s’unissaient pour former un grand club à Louvain. Tous les trois étaient des clubs avec du potentiel et une académie de jeunes qui travaillait bien. Séparément, ils ne parvenaient pas vraiment à s’extirper des divisions régionales du championnat belge de football.

L’un des noms les plus emblématiques de l’histoire du jeune club fusionné est sans doute celui de Bjorn Ruytinx. Il est devenu un véritable héros populaire en raison de son tempérament fougueux, de son sens du but et de sa proximité avec le public. De 2004 à 2014, il a porté les couleurs louvanistes, disputant un total de 249 matches et marquant 77 buts. En 2018, quelques années après sa retraite footballistique, Ruytinx, actuellement entraîneur de joueurs chez Stirr Associates, a même été nommé ambassadeur d’OHL. Nous sommes revenus avec lui sur quelques moments importants des 20 ans d’histoire d’Oud-Heverlee Louvain.

Mai 2005 : promotion de la troisième à la deuxième division, grâce à François Sterchele et Guido Brepoels.

BJORN RUYTINX : « Lorsque je suis passé en 2004 de Kermt qui évoluait en quatrième division à OHL en troisième division, c’était un pas en avant. Tout le monde connaissait les ambitions des Louvanistes et j’ai immédiatement senti que c’était un club chaleureux. J’ai remarqué très peu de clans entre les différents groupes de supporters. Le nombre de spectateurs était plutôt faible au début. Je pense que nous avions rarement plus de 1 000 au stade. Les supporters ont commencé à arriver lorsque nous avons joué des tours finaux en deuxième division et certainement lorsque nous avons été promus en première division. Lors de ces premières années, nous ne jouions pas encore à Den Dreef, où des travaux de rénovation étaient en cours. Notre terrain se trouvait à Oud-Heverlee. »

« Nous sommes restés en tête du championnat pratiquement toute la saison. Avec François Sterchele, nous avions dans nos rangs un attaquant de premier plan. Il a poursuivi sur sa lancée de La Calamine en quatrième division où il marquait tout le temps, tout comme moi. Nous étions d’ailleurs tous les deux devenus les meilleurs buteurs de cette série. Lors de la période avant la trêve hivernale, je me souviens qu’il a eu une baisse de régime, mais à la fin de la saison, il était de nouveau en peline forme et a été décisif dans la finale pour la promotion. J’ai moi-même eu besoin de plus de temps pour m’adapter, en partie à cause d’une blessure que j’avais eue en début de saison et parce que la concurrence de Swa n’était pas des moindres. C’est une équipe qui s’est formidablement bien entendue, grâce à notre entraîneur Guido Brepoels, qui a bien géré tout cela. Limbourgeois, Wallons, Louvanistes, jeunes et moins jeunes… Nous étions une seule famille. Tout le monde mettait l’ambiance. Une vraie formule de la réussite. Sur le plan personnel, je me souviens aussi de belles campagnes de Coupe, avec des victoires en série contre le RWDM et le Beerschot lors desquelles j’ai marqué. »

Limbourgeois, Wallons, Louvanistes, jeunes et moins jeunes… Nous étions une seule famille. Tout le monde mettait l’ambiance.

Ruytinx sur la promotion d’OHL en deuxième division.

24 avril 2011 : promotion en première division et des scènes folles à Den Dreef

RUYTINX :« Un retour au plus haut niveau, après 61 ans d’attente… Je n’ai pas besoin de vous dire quel genre d’euphorie cela a provoqué (rires). Je n’oublierai jamais le moment où nous sommes revenus à Den Dreef avec le bus des joueurs après ce match nul sur le terrain de l’Antwerp. Une foule folle nous attendait. Ce sera toujours le point d’orgue de ma carrière. Avant cela, nous avions connu deux années de crise jusqu’à l’arrivée de Ronny Van Geneugden. Avec le nouveau président Jan Callewaert, un sponsor important a renforcé le club, ce qui a permis de disposer du budget nécessaire pour réaliser nos objectifs. Ce n’était pas vraiment la même ambiance les années précédente où nous étions laissés à nous-mêmes. Sous Marc Wuyts et Jean-Pierre Vande Velde, il n’y avait pas assez de qualité de qualité dans le groupe avec les joueurs arrivés libres et ceux en prêt. Van Geneugden avait pour sa part une vision claire et a insufflé du professionnalisme au club.« 

Ruytinx:
Ruytinx: « Je n’ai que du respect pour ce que Ronny Van Geneugden (à droite) a accompli à Louvain. »© belga

« On pouvait également sentir l’impatience de toute la ville d’évoluer au plus haut niveau. Il y avait même un nom de projet :  » Leuven 2010 « , un projet de cinq ans pour atteindre la première division. Avec Van Geneugden, on a ressenti à nouveau de bonnes vibrations. Le noyau avait déjà été constitué pendant la préparation et plus tard, avec l’arrivée de Jordan Remacle entre autres, de la qualité supplémentaire a été ajoutée. Les relations se sont un peu tendues entre Ronny et moi par la suite, mais je n’ai que du respect pour ce qu’il a accompli à Louvain. Il s’assurait que tout le monde se sentait bien, organisait toutes sortes d’activités en dehors du football, y compris avec nos femmes, car il pensait que c’était important. Avec le groupe, nous allions régulièrement en ville… J’en garde beaucoup de bons souvenirs. »

« En fait, je pensais, car j’étais également capitaine de l’équipe à l’époque, que le lien avec le public et la ville était tout aussi important que ce qui se passait sur le terrain. Ces gens paient beaucoup d’argent pour venir nous voir et mettent tellement d’âme pour nos soutenir qu’il faut être capable de leur rendre la pareille. Ce genre de choses ne se fait presque plus dans le football contemporain, je pense ; tout est devenu tellement commercial et cadenassé. Mes collègues et mes adversaires m’ont déjà dit qu’ils ont aimé jouer à Den Dreef, en raison de la bonne ambiance qui y règne. Anderlecht voulait même gagner le toss de début de match pour nous empêcher de jouer la première mi-temps en direction de notre kop. C’est beau, n’est-ce pas ? »

2014 et 2016 : relégation en D1B à deux reprises, l’OHL joue les ascenseurs.

RUYTINX :« En 2014, c’était ma dernière année en tant que joueur d’OHL. Cette relégation n’aurait jamais dû arriver. Nous restions sur deux belles années en première division et on avait même gagné les Playoffs 2. Tout semblait parfait, nous étions bien partis pour être un club stable. Mais lors de cette troisième saison parmi l’élite, tout a soudainement dérapé. Certaines personnes ont obtenu trop de pouvoir et le noyau était déséquilibré. Nous avions plus de 30 joueurs et pour le poste d’arrière droit, par exemple, nous avions… cinq possibilités. Ce n’est jamais une situation saine. Nous avions aussi des joueurs du clan Dejan Veljkovic, ou encore Mazin, un Saoudien qui devait avoir des minutes de jeu… Pas besoin de vous faire un dessin. L’histoire n’avait plus aucun sens. J’ai trouvé cela très étrange, car OHL s’était toujours construit de manière très réfléchie aussi bien pour développer sa structure que pour composer son noyau. Un noyau de 21 joueurs maximum, complété par trois jeunes joueurs. C’était l’idéal. »

OHL a enchaîné deux relégations en peu de temps.
OHL a enchaîné deux relégations en peu de temps.© iStock

Mai 2017 : OHL parvient à se sauver de justesse en D1B, les fans prennent leurs distances avec le club.

RUYTINX : « Je ne joue plus au club à cette époque et j’étais dans un camp qui avait pris ses distances avec la direction. J’avais quitté le club quelque peu frustré. On m’avait promis un rôle après ma carrière de joueur. Comme il n’y avait plus de place pour moi, je suis parti à Ostende. Pendant ce temps, j’ai vu comment la situation au club se détériorait. Financièrement aussi, car finalement, le conseil d’administration a dû vendre le club à des investisseurs étrangers… Difficile dans ces conditions d’affirmer que vous avez mené une bonne politique ? »

Été 2017 : King Power, l’empire commercial de l’entrepreneur thaïlandais et propriétaire de Leicester City, Vichai Srivaddhanaprabha, prend le contrôle d’OHL

RUYTINX : « Ce que King Power a bien compris, c’est qu’il faut créer un lien local et ne pas seulement penser à l’international. J’étais en effet très critique lors de ce rachat. Je ne le comprenais pas. Mais je dois reconnaître qu’ils réalisent du bon travail, qu’ils construisent petit à petit, y compris du côté des infrastructures, avec la rénovation du complexe dédié à la formation. Pour moi, le moment déterminant a été celui où j’ai remarqué qu’un certain nombre de sponsors, qui étaient partis sous la précédente direction, sont revenus lorsque King Power a pris le pouvoir. King Power a lui-même contacté ces personnes pour les convaincre de leur projet. C’était un signal important. De nombreux supporters sont évidemment un peu déçus des résultats de cette saison, mais je pense que cela n’est pas justifié. OHL a confirmé sa place parmi l’élite et c’est un pas important pour sa stabilité. »

L'entrepreneur thaïlandais et propriétaire de Leicester City, Vichai Srivaddhanaprabha, prend le contrôle de OHL pendant l'été 2017.
L’entrepreneur thaïlandais et propriétaire de Leicester City, Vichai Srivaddhanaprabha, prend le contrôle de OHL pendant l’été 2017.© belga

Saison 2020-21 : OHL atteint un nombre record de points (45) en Jupiler Pro League sous la direction de Marc Brys

RUYTINX :« J’ai connu Marc Brys au Beerschot. Je peux vous dire qu’à 35 ans, j’ai sérieusement souffert là-bas ! (rires) Marc est un vrai professionnel pour lequel j’ai beaucoup de respect. Il sait ce qu’il fait et s’entoure bien, avec des joueurs de premier plan comme Issame Charaï et Bram Verbist dans son staff. En bref, je suis très confiant pour l’avenir d’OHL. Depuis 2018, le club joue à nouveau avec le matrice 18 du Stade Louvain, mais pour moi ce n’est pas important. Il s’agit d’OHL et des initiateurs du projet comme Eddy Vandezande et Michel De Pauw, des gens de différents clubs qui ont écrit ensemble une nouvelle histoire. Si OHL a vécu autant de grands moments en seulement 20 ans, c’est grâce à de nombreuses personnes. Le Stade Leuven est mort, Oud-Heverlee est mort, le Daring est mort, l’histoire doit maintenant être écrite par Oud-Heverlee Leuven. »

Lors de la saison 2020-2021, OHL a obtenu 45 points, soit son record en D1. Notamment grâce aux buts de Thomas Henry vendu quelques semaines plus tard pour 6 millions à Venezia.
Lors de la saison 2020-2021, OHL a obtenu 45 points, soit son record en D1. Notamment grâce aux buts de Thomas Henry vendu quelques semaines plus tard pour 6 millions à Venezia.© belga

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