© BELGAIMAGE

Julian Nagelsmann, l’entraîneur du futur

Maxime Defays Journaliste

Le très jeune coach allemand (29 ans), encore inconnu il y a quelques mois, a réalisé l’exploit de propulser le club d’Hoffenheim en Ligue des Champions pour la première fois de son histoire.

Après sa victoire à la dernière minute contre Francfort lors de la 31e journée de championnat, le club de la petite ville d’Hoffenheim (à peine 3000 habitants) s’est officiellement qualifié pour la Ligue des Champions pour la première fois de son histoire. En fonction de sa place finale (3e ou 4e), elle devra disputer, ou non, un barrage pour accéder à la phase de poules. Son adversaire dans la lutte pour la 3e place n’est autre que le Borussia Dortmund, qui s’est justement imposé face à Hoffenheim ce week-end (2-1). Avec cette victoire, les hommes de Tuchel prennent deux points d’avance à deux journées de la fin.

Le plus jeune entraîneur de l’histoire de la Bundesliga

Julian Nageslmann est officiellement nommé entraîneur fin octobre 2015 mais ne devait, à la base, prendre la tête de l’équipe qu’au début de la saison 2016-2017, Huub Stevens n’ayant signé que jusqu’en juin 2016. Mais les choses ne vont pas tout à fait se dérouler comme prévu.

En février 2016, Hoffenheim est très mal en point au sein de l’élite du football allemand. 17e à 5 points du premier non-relégable qu’est le Werder Brême à l’époque, le club de Bade-Wurtemberg voit en plus son entraîneur Huub Stevens démissionner pour des raisons médicales, 5 mois à peine après son arrivée. Les dirigeants du club décident alors d’accélérer le processus et confient déjà les rênes de l’équipe première à Julian Nagelsmann, 28 ans à l’époque, et entraîneur des U19. Il devient alors le plus jeune coach de l’histoire de la Bundesliga. Pour comparaison, la moyenne d’âge des techniciens allemands actuellement en place est supérieure à 45 ans.

« Nous voulions rester centrés sur le club et nous appuyer sur les personnes les plus impliquées », avait expliqué la direction. « Je relève un sacré défi que la situation actuelle de l’équipe au classement alourdit bien sûr encore. Mais cela ne me fait pas peur du tout. Je suis prêt… », avait déclaré un jeune homme confiant mais lucide.

Après sa prise de fonction, Nagelsmann parviendra à sauver in extremis le club de la relégation, en terminant 15e (à une place des barrages pour ne pas descendre) avec 37 points. Avant qu’il n’arrive, Hoffenheim n’avait gagné que 2 matchs. Il parvient, lui, à remporter 7 succès sur les 14 dernières rencontres et soulage toute une région. « J’ai été très rapidement convaincu que nous pourrions mieux jouer et que nous pourrions nous maintenir » avait-il dit. Il a eu raison.

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Une saison 2016-2017 remarquable

Le début de saison d’Hoffenheim est assez discret, avec 4 matchs nuls sur les 4 premières rencontres. Par la suite, Nagelsmann et son équipe enchaînent les victoires, notamment contre Schalke et Leverkusen. Il faudra attendre la 18e journée pour que les « Bleu et Blanc » subissent leur première défaite -mais avec les honneurs-, 2-1, sur le terrain de Leipzig, étonnant 2e de Bundesliga. Hoffenheim se permet même le luxe de décrocher un superbe match nul sur le terrain du Bayern. Quelques mois plus tard, ils battent ces mêmes Bavarois à domicile, 1-0. À 2 matchs de la fin du championnat, l’équipe n’a connu la défaite qu’à quatre reprises (la dernière à Dortmund ce week-end) et possède la 3e meilleure défense de l’élite, derrière le Bayern et Leipzig. Mieux encore, Hoffenheim est l’équipe des six grands championnats qui a réalisé la plus longue série de matchs sans défaite.

Julian Nagelsmann a prouvé ses compétences à la tête d’une équipe qui ne compte pas réellement de très grands joueurs, à tel point qu’il est élu en mars dernier entraîneur de l’année 2016. En regard de ses performances de fin de saison 2016 et de la superbe campagne qu’il est en train de réaliser, il y avait peu de doute que ce trophée lui échappe.

Une carrière stoppée dès ses 20 ans

Nagelsmann débute en jeunes du côté d’Augsbourg avant de rejoindre Münich 1860 de 2002 à 2006, où il ne joue pas une seule rencontre avec l’équipe réserve. Il décide de retourner à Augsbourg mais est contraint de mettre prématurément un terme à sa carrière à seulement 20 ans, à cause de blessures à répétition. Il pense alors que son rêve est brisé, mais l’entraîneur de l’époque n’est autre que Thomas Tuchel, l’actuel T1 du Borussia Dortmund, qui décèle en lui des qualités de manager, même à son jeune âge. Il retourne à Münich 1860 avant d’atterir à Hoffenheim en 2010 où il coache les équipes de jeunes, notamment les U19, avec qui il remporte le titre national, avant d’être officiellement appelé pour prendre les rênes de l’équipe première.

Julian Nagelsmann, avant le match face à Dortmund.
Julian Nagelsmann, avant le match face à Dortmund.© Reuters

L’homme des records

Nagelsmann a réussi à sublimer le jeu d’Hoffenheim en adoptant une tactique résolument offensive avec un jeu propre et léché, proche de celui d’un Jürgen Klopp. Mais à cela le jeune technicien allemand ajoute une touche de « football total » préconisé par Thomas Tuchel, basé sur une grande possession de balle et un changement de tactiques régulier, même pendant les matchs. Il n’hésite pas à démarrer d’un 3-5-2 vers un 4-2-3-1 en passant par un 4-4-2 plus classique. Il parvient également à garder l’assise défensive qu’avait inculquée Huub Stevens avant lui, et base sa stabilité sur une maîtrise physique impressionnante. Les entraînements sont réputés très « durs », et le discours de l’entraîneur est très fédérateur. La motivation et la confiance qu’il a réussi à faire naître au sein d’une équipe en perdition la saison passée expliquent aussi les résultats obtenus cette année. Aucune star (seul Kramaric était vraiment « connu ») n’a été recrutée lors de l’intersaison par le club. Pourtant, les joueurs ciblés se sont parfaitement fondus dans le système de jeu mis en place par Nagelsmann. Tous germanophones et forts de leur expérience en Bundesliga, des joueurs comme Hübner, Rupp, Demirbay, Wagner ou Vogt auront grandement contribué à la réussite des « Bleu et Blanc ».

9e entraineur d’Hoffenheim depuis sa montée en D1 en 2008, le jeune Bavarois bat déjà tous les records de ses prédécesseurs. Il est celui qui détient la meilleure moyenne de buts marqués par match, la plus longue invincibilité (17 matchs), la plus grande série de victoires et la plus longue série de matchs sans défaite à l’extérieur. Encore mieux: depuis qu’il a repris l’équipe, seuls le Bayern et Dortmund ont pris plus de points qu’Hoffenheim.

Son niveau de coaching depuis plus d’un an, conjugué à sa précocité, ont forcément attiré les regards. Certains le voient déjà comme le successeur d’Ancelotti au Bayern, comme Lothar Matthaüs, l’ancienne gloire du club bavarois, ou Ralf Rangnick, ancien coach d’Hoffenheim et actuel directeur sportif de Leipzig, qui déclarait en janvier au Bild: « Je pense que la prochaine destination de Nagelsmann sera l’Allianz Arena de Münich. »

Nagelsmann surprend par son intelligence et sa précocité. Sa philosophie offensive aura fait d’Hoffenheim une équipe redoutable cette année, et surtout très difficile à battre. Malgré son jeune âge, le Bavarois semble garder la tête sur les épaules et nul doute qu’il réfléchira à deux fois avant de s’engager directement avec une plus grosse cylindrée l’année prochaine. Il possède, en tout cas, à 29 ans seulement, toutes les qualités pour devenir l’entraîneur de l’avenir.

Hoffenheim, la grande ascension

C’est après l’arrivée de Dietmar Hopp, un entrepreneur milliardaire et ancien joueur, au début des années 1990, qu’Hoffenheim va vivre une ascension fulgurante. Le club va connaître 5 montées en 11 ans avant de s’installer progressivement dans la troisième division allemande. Ralf Rangnick prend la tête de l’équipe en 2006, et la fait directement monter en division 2. L’année suivante, le club est encore à la fête et accède pour la première fois de son histoire au plus haut échelon national, la Bundesliga. Le club termine la saison à une magnifique 7e place, dynamitée notamment par les très belles prestations de Vedad Ibisevic et Demba Ba.

Dès le début de son arrivée en Bundesliga, le club d’Hoffenheim reçoit de nombreuses critiques. car le club ne se serait créé qu’uniquement grâce à un (gros) coup de pouce d’un milliardaire, et sans avoir connu véritablement une grande histoire.

Néanmoins, le club arrive à se maintenir chaque saison depuis son accession en première division allemande et réalise cette année le meilleur classement de son histoire. Les « Bleu et Blanc » termineront la saison au minimum à la 4e place.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire