De Kill Bill à Kilman

Découvrez la chronique de Frédéric Waseige, qui comme souvent fleure bon le foot anglais.

L’avantage d’une chronique, c’est qu’elle n’oblige à rien. Elle est le symbole de la liberté de ton, de temps, de thème. Elle peut mêler les « je t’aime » avec les « je t’aime un peu moins », voire les « je te hais ». Exemple avec celle-ci. Je veux vous parler d’un joueur qui s’appelle Kilman. Du coup, je pense à  » Kill Bill« . Rien à voir avec Kilman, mais j’en fais mon titre. Du coup, j’ai envie de parler de Quentin Tarantino. Qui aux dernières nouvelles, n’a absolument rien à voir avec le foot.

En quelques mois, Kilman passe de la D5 à la Premier League lors de la même saison. Il découvre même l’Europa League. Fabuleux!

Quoique l’art a ce don de rassembler des talents dans des domaines complètement différents. On retrouve des uns, dans les oeuvres des autres. Exemple: je trouve qu’il y a du Bielsa dans Tarantino. La même anarchie. Le même respect de ses propres idées, qui envoient un gros fuck aux idées des autres. Les soi-disant bien-pensants. Il y a aussi du Cruijff dans l’esthétisme de la mise en scène. Il y a un peu de Mou pour la rigueur. Quoique, non! Tarantino joue et fait jouer pour le plaisir de tous. José, ce n’est que pour lui à travers les autres. Un peu de Pep, aussi, pour la mise en place « anarcho-classieuse ». Un peu de Megan Rapinoe, aussi. Pour le génie de rendre les femmes encore plus belles, et surtout plus indispensables que les hommes. Sans oublier un peu de Mbaye Leye, pour nous rappeler la classe exceptionnelle de Samuel L. Jackson. On va saupoudrer le tout d’un peu de Klopp pour la qualité des castings. En fait, vous prenez les acteurs fétiches de Tarantino et vous avez certainement le meilleur onze de base du cinéma mondial.

Revenons à l’objet de notre plaisir du jour. Un mec qui intègre de plus en plus souvent le onze de base et dont la base et ses étages en font un personnage de chronique. Il joue en Premier League. A un nom pour jouer dans un film de Tarantino. Mais un style pour apparaître dans un Bergman. Sobre, discret et omniprésent à la fois. Un prénom pour jouer un fou dans un film de George Miller. Mon héros du jour se nomme Max. Max Kilman. 23 ans, joueur pro à Wolverhampton. Un parcours comme on les aime: surréaliste, unique, beau. Un genre de scénario qui sent la fiction, mais qui pue bon la réalité. Ce type arrive en Premier League en débarquant de cinquième division. Après un passage en septième division. Être prêté en D7, j’adore. Loué pour deux bacs de Guiness? En attendant, il est repéré à l’âge, tellement avancé pour un footeux, de 21 ans. Il porte le maillot de Maidenhead United. Traduction: « L’union des têtes de jeunes filles ». Délicieux. Un vrai titre de film. Ce club occupe la même adresse depuis 1871: York Road. Ahurissant. 150 ans. Ce qui en fait le club anglais qui joue au même endroit depuis le plus longtemps. Il fait même partie des quinze clubs qui ont disputé la première FA Cup, en 1871.

Soit, revenons à Kilman. En quelques mois, il passe de la D5 à la D1 lors de la même saison. Découvre même l’Europa League. Il devient le premier joueur à passer de « Non League » à Premier League depuis un certain Chris Smalling, passé de… Maidenhead à Fulham, avant de tout gagner avec ManU. Mais le plus fabuleux, c’est qu’à l’époque de son transfert, notre Max était déjà international. 25 sélections avec l’équipe nationale anglaise de… futsal.

Ce « sport-frère », sans boue et avec plus finesse. Ce qui, d’après lui, est pour beaucoup dans sa réussite. « J’ai l’impact physique d’un joueur de « Non League » avec la technique d’un joueur de futsal. » On ajoutera que ça doit sacrément développer le cerveau pour prendre des décisions rapides. Chose très utile sur un terrain de football. D’ailleurs, dès son sixième match en PL, il est élu Homme du match. Et se voit proposer un contrat pro jusqu’en 2025. Elle est pas belle la vie? Surtout qu’il la prend à la cool. « Ce qu’il m’arrive est tellement incroyable que je ne fais aucun projet. »

Il y a quand même une chose qui le titille, un épisode de plus dans son parcours de fou. Tenez-vous bien: il aimerait devenir international russe. De foot, hein. Et pourquoi pas? Il parle déjà la langue. Grâce à papa, à moitié russe, et maman, à moitié ukrainienne. Beaucoup de moitiés qui ne font pas de lui un quart de huitième. Cela dit, l’accueil du chef de la fédé russe de foot est plutôt « sibérien ». Il lui propose de d’abord se faire naturaliser russe, de venir habiter en Russie et de jouer dans un club russe. Après, on verra. Voilà qui est clair. Peu importe. On s’en tape. L’histoire de Kilman me tue. Trop belle. Tellement que Tarantino en ferait bien un chef-d’oeuvre.

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