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De Bruyne : « Je n’ai aucune raison de douter « 

Sur les traces de Kevin De Bruyne, à nouveau numéro dix contre l’Irlande, de Knokke à Bordeaux.

Jeudi 12 mai. Marc Wilmots dévoile sa sélection pour l’EURO et associe quelques noms à des positions.  » Kevin De Bruyne est mon numéro dix.  » Une semaine plus tard, la préparation débute, à Knokke. Kevin De Bruyne revient dessus plus tard, dans un premier contact avec la presse :  » Il m’a été très pénible de me recharger mentalement à Knokke, après une longue saison. Une blessure au genou m’a écarté un moment des terrains, mais j’ai quand même disputé 45 matches. Mais bon, c’est encore long, sept ou huit semaines ensemble. Je suis patient, je ne vais pas me prendre la tête si un match est moins bon qu’un autre.  »

Samedi 28 mai. D’un joli tir tendu, De Bruyne offre à la Belgique la victoire contre la Suisse. Du droit, un tir qui retombe, un mouvement qu’il exerce depuis des années. Techniquement, l’envoi n’est pas simple. Il a beau jouer avec un bonheur égal des deux pieds,  » le mouvement est trop compliqué du pied gauche « .

EN CONFIANCE

Quelques jours plus tôt, à Lausanne, il a affiché sa motivation. Pendant un petit match d’entraînement, il a crié à Divock Origi de se replier en perte de balle. De Bruyne revient sur la scène à Genk :  » Je trouvais mon intervention nécessaire. Les gens le perçoivent-ils mal ? Eh bien, tant pis pour eux. Tout le monde me connaît, maintenant. Je ne pense pas que ce soit un problème. Vous aussi, vous savez ce qu’il en est. D’ailleurs, l’affaire est close : on ne m’en parle plus.  » Dans le groupe, ses meilleurs amis sont Dries Mertens et Mousa Dembélé mais même avec eux, il ne s’ouvre jamais complètement.

Lundi 30 mai. Entraînement à Genk. Un léger. A son terme, De Bruyne s’attarde avec Simon Mignolet. Il tire au but. Il entraîne les phases arrêtées pendant que, dans le rond central, les artistes bavardent. Plus tard le soir, à la conférence de presse, il déclare :  » Si je veux être la vedette du tournoi ? Je l’espère car ça voudrait dire que j’ai joué un bon EURO. Pourquoi pas ? Les gens en doutent peut-être, je n’en sais rien. Je ne doute pas de moi-même. Je n’ai aucune raison de le faire puisque ces dernières années, je n’ai fait que progresser. Je suis empreint de confiance, même après quelques mauvais matches. Je sais ce dont je suis capable ou non. Mentalement, je suis très fort pour le moment.  »

DES CHIFFRES ÉLOQUENTS SUR L’AILE

Dans les bras de Romelu.
Dans les bras de Romelu.© BELGA

Cette assurance a pris un premier coup la semaine suivante. Le 5 juin, après une première mi-temps difficile contre la Norvège, Hazard s’empare du numéro dix et De Bruyne se retrouve sur le flanc.

En soi, ça ne lui pose pas de problème, a précisé De Bruyne à Genk plus tôt dans la semaine.  » Mon style de jeu ne change pas selon que je joue sur le flanc ou dans l’axe. En fin de compte, c’est la même chose.  » Ses statistiques à City révèlent qu’il est plus performant de la droite. En onze matches sur l’aile droite, il a inscrit quatre buts et délivré sept assists. Médian central à huit reprises, il a marqué deux buts et n’a délivré aucune passe décisive. De la gauche, il a été à la base d’un but et de deux assists.

Mais en son for intérieur, il bouillonne. Il alimente l’idée selon laquelle les uns peuvent se permettre davantage que les autres sans que Wilmots n’intervienne. Il ne s’agit pas du brassard. Le groupe est surpris qu’Hazard l’enfile. Il le verrait plutôt au bras de Jan Vertonghen ou de Thomas Vermaelen, mais ce genre de choses n’intéresse pas De Bruyne.  » Je suis un leader dans ma manière de jouer mais régler des tas de choses en dehors du terrain, ce n’est pas mon truc « , déclare-t-il à Genk.  » Je joue au football. C’est ce qui m’amuse. Le reste ne serait qu’une charge pour moi. En dehors du terrain, il faut s’amuser.  »

POURQUOI TOUJOURS SE PLAINDRE ?

Contre l’Italie, il n’est toujours pas dix, pas plus qu’Hazard. Wilmots opte pour Marouane Fellaini. De Bruyne, dimanche après la victoire contre l’Irlande :  » J’ai brièvement parlé avec le sélectionneur la veille du match. Il m’a dit que j’allais jouer. Pour l’EURO, il était convenu que je joue au dix puis je me suis retrouvé sur le flanc. C’est comme ça depuis des années et ça ne changera pas, quoi que je dise et que je fasse. Si quelque chose peut se produire, c’est bien qu’on me change de place. C’est régulier.

Me plaindre ? Alors, je pourrais me plaindre pendant toute ma carrière mais ça ne changerait rien. Je dois essayer d’aider mon équipe d’une manière ou d’une autre. En me plaignant constamment de ma position… J’ai assez souvent dit où je préférais jouer mais le répéter chaque fois ne sert à rien. Les gens le savent.  »

SURPRIS PAR LES CRITIQUES

Il abat ses kilomètres – douze – mais ce n’est pas son meilleur match. A son issue, il doit encore subir le contrôle antidopage puis les critiques, qu’il accepte avec réalisme.  » Ce n’était pas mon meilleur match, ça peut arriver. Comment j’ai trouvé mon jeu avec Romelu et Eden ? Il est très difficile de se trouver quand on est aussi éloignés les uns des autres.  »

De Bruyne est surpris par le débat qui éclate après l’Italie. Il est remis en question après un moins bon match. Dimanche, il déclare :  » Il est normal qu’on m’ait critiqué pour mon match contre l’Italie. Mais de là à vouloir m’éjecter… Personnellement, j’ai trouvé ça rapide. J’ai beaucoup d’assurance et je ne pense pas devoir avoir peur de perdre ma place, même après un moins bon match contre l’Italie. Je sais ce dont je suis capable en tant que footballeur et comment aider cette équipe.  »

A nouveau, il ne parle guère avec Wilmots. Après une semaine d’essais, il en revient finalement à son idée du 12 mai : De Bruyne au dix, avec toute latitude en possession du ballon, et Hazard sur la gauche.

À SA MANIÈRE

La déception contre l'Italie
La déception contre l’Italie© BELGA

Il y a un beau mot pour ça en France : la cohabitation. On l’utilise en politique, quand le président et le Premier ministre ont une couleur politique différente et sont obligés de gouverner ensemble.

Peut-on parler de cohabitation entre Hazard et De Bruyne ? D’une collaboration contrainte ? Ce serait aller trop loin. Contre l’Irlande, ils ont tous les deux eu beaucoup de contacts avec le ballon. Avant le repos, compte tenu de la composition irlandaise, ils ont souvent été dans le compartiment offensif du terrain, les trente derniers mètres. Hazard a touché le ballon à 28 reprises en une demi-heure, De Bruyne 24 fois.

De la 46′ à la 75′, quand le score est passé de 0-0 à 3-0, De Bruyne a eu 21 contacts avec le ballon, Hazard 25. Sur l’ensemble du match, Hazard a cherché à combiner avec De Bruyne à onze reprises. C’est la quatrième meilleure combinaison du match, après Witsel-Hazard (15), Witsel-Vertonghen (13) et Vertonghen-Hazard (12).

Dimanche, De Bruyne s’est montré satisfait de son match. Il avait moins couru que contre l’Italie – 11 kilomètres – , il souffrait moins des ischiojambiers et tout s’était bien passé. De Bruyne :  » Je pense avoir répondu à ma manière, la seule possible. Je peux vous dire ce que je veux mais en fin de compte, c’est sur le terrain que je dois m’exprimer. Nous sommes ici pour gagner en groupe, pas seuls.  »

PATIENCE

Ce ne sera sans doute pas différent contre la Suède ce soir : on jouera la possession du ballon. De Bruyne :  » Depuis deux ans, beaucoup d’équipes jouent très défensivement contre nous. La première parole qui me vient à l’esprit, c’est : patience. Est-ce beau à voir ? Pas vraiment. Est-il agréable de jouer ainsi ? Pas vraiment non plus, mais on finit toujours par trouver une brèche. Nous devons prendre les bonnes décisions au bon moment et marquer. Dès que c’est fait, nous disposons de plus d’espaces et nous devenons plus dangereux.  »

Par Peter T’Kint et Thomas Bricmont à Bordeaux

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