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Charge émotionnelle, gratte-ciels et mauvais airs de Ligue des Champions: analyse du tirage au sort des Diables rouges

Pour ce qui devrait être sa dernière danse internationale, la génération dorée de la Belgique devra pédaler contre les vents de fraîcheur du football international.

Le réflexe est devenu celui des géants. Un nom qui sort en haut du groupe F, et des yeux qui scrutent plutôt sur les côtés que vers le bas. Le Diable ne sait pas encore ce que lui réservera l’entrée de la première Coupe du monde automnale de l’histoire quand il constate que son huitième de finale lui fera croiser une route aux airs de voie sans issue potentielle. Sur le banc d’à côté, Roberto Martinez risque alors de croiser un homme dont les paumes ont déjà empoigné les grandes oreilles les plus célèbres du football. Luis Enrique avait emmené son Barça sur le toit de l’Europe en 2015, imité un lustre plus tard par le Bayern d’Hans-Dieter Flick.

Deux des trois derniers champions du monde, dont le sacre mondial a toujours précédé un grand reset. Conséquence d’un échec fracassant, et parfums rappelant l’Italie de Roberto Mancini : pour construire un nouveau projet, il faut presque toujours que les vieux murs s’effondrent d’eux-mêmes. L’Espagne avait fondu avec ses champions dans la chaleur brésilienne, puis avait vu son toque frigorifié par la patience des Russes. Les Allemands, eux, ont sombré en Russie puis quitté Wembley la tête basse lors du dernier EURO, avant d’entamer leur renouveau. Plus tardif que celui des Ibères, mais pas moins menaçant. Les édifices espagnols et allemands se construisent avec l’ambition de gratter le ciel, pendant que la Belgique hésite encore entre des travaux de rénovation de ses vieux murs et l’entame d’un nouveau chantier.

Si les dix dernières années ont fait décoller l’ambition nationale et permettent de sortir la longue-vue au moment du tirage au sort, il faudra d’abord sortir de la poule F. En ouverture, le Canada de Jonathan David aura l’euphorie contagieuse du Panama version russe, avec une bonne dose de talent supplémentaire. En 2018, Roberto Martinez avait prévenu des dangers de l’enthousiasme de ce nouveau venu sorti d’Amérique centrale. Si le pays à la feuille d’érable connaît déjà la saveur d’un Mondial, les 36 ans écoulés depuis son unique participation donneront au voyage qatari des airs de première fois.

Le deuxième match aura le parfum des retrouvailles. Celles avec le Maroc des Belgicains Tarik Tissoudali ou Selim Amallah, désormais dirigé par un certain Vahid Halilhodzic dont le plan algérien inaugural avait fait souffrir les Belges de Marc Wilmots huit ans plus tôt. Un match également chargé sur le plan symbolique, un duel de plus où l’expérience du groupe diabolique devra surtout servir à garder la tête froide. Un exercice réussi l’été dernier dans l’antre à fleur de peau de Copenhague, face à un Danemark survolté par l’accident cardiaque de Christian Eriksen.

Apothéose et potentiel point d’orgue du groupe, le duel face aux Croates se jouera-t-il avec une calculatrice ? La partie d’échecs s’invitera en tout cas inévitablement au coeur du jeu, là où les derniers finalistes mondiaux multiplient les pièces-maitresses, entre le Ballon d’or 2018 Luka Modric, l’actuel champion d’Europe en titre Mateo Kovacic et le maître à jouer de l’Inter Marcelo Brozovic.

Préparée à la hâte, avec des championnats qui ne s’arrêteront qu’à une semaine du coup d’envoi de la compétition, la Coupe du monde qatarie aura finalement des airs de Ligue des Champions, avec ces matches qui s’enchaînent dans un calendrier surchargé sans même avoir pris le temps de souffler. Sur la piste aux étoiles du Vieux Continent, on dit désormais dans les bureaux des plus grands clubs d’Europe qu’un bon tirage au sort ne se mesure pas à la taille du client qu’on affronte en poules. Au contraire : plus il est gros, mieux c’est, vu que la suite des évènements rend alors impossible un duel à la mort dès le début de la phase finale. À ce petit jeu-là, la Belgique semble avoir perdu. Dès la sortie de son groupe, elle pourrait croiser la route de deux sélectionneurs anciens vainqueurs de la reine des compétitions de clubs, celle que Roberto Martinez n’a jamais vue qu’à la télévision ou depuis les gradins. Pour inverser la tendance, il faudra plonger la tête la première face aux pressings les plus efficaces du monde des sélections, et prier pour que les pieds soient assez agiles et vifs afin d’éviter la noyade.

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