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Nibali : comment la sardine est redevenue requin

Pendant trois semaines, au Giro, on l’a qualifié de sardine mais in extremis, le requin en Vincenzo Nibali est ressuscité. Pour la plus grande joie d’un prince arabe.

Au Tour du Trentin, la dernière course de préparation au Giro, Vincenzo Nibali a été largué en côte. Quelques jours plus tard, à Liège-Bastogne-Liège, il a craqué. La Botte a sérieusement douté de sa condition physique. Son entraîneur Paolo Slongo, lui, ne se tracassait pas : son poulain revenait d’un stage en altitude.

Les doutes ne se sont pas évanouis au Giro : après le contre-la-montre ; le Requin de Messine a sombré. Les observateurs ont cherché la cause de ses maux : les longues dents utilisées par Nibali (175 au lieu de 172,5 mm), l’impact mental de la mort de Rosario Costa, un gosse de 14 ans, qui fait partie de l’équipe de juniors de Nibali et a été renversé par un camion, ou encore ses relations difficiles avec le patron d’Astana, Alexandre Vinokourov.

Nibali lui-même s’est plaint de la pression infligée par les journalistes italiens, de son allergie au pollen et de problèmes intestinaux. Les médecins de l’équipe ont même cherché d’autres problèmes médicaux pendant son jour de congé, en vain.

Mais voilà : deux jours après le décès du prêtre Francesco Pieraccini à Mastromarco, son ancien foyer toscan, un prêtre qui faisait sonner les cloches de l’église à chaque succès de Nibali, l’Italien est ressuscité, dans l’ascension finale de Risoul. Le lendemain, il a refait son retard de 4 minutes 40 secondes pour enfiler le maillot rose.

C’est une renaissance miraculeuse par les temps qui courent mais, indépendamment de la chute de Steven Kruijswijk, jusque-là invincible, elle n’est pas dénuée de fondements : dans les nombreux cols de plus de 2.000 mètres, Nibali ne souffrait plus d’allergie. Il a repris ses anciens crans à 172,5 mm dans les deux dernières étapes. Il n’a pas non plus livré de performance surhumaine, du moins par rapport au Tour 2014 quand, le maillot jaune sur les épaules, il avait franchi le col de Risoul en deux minutes de moins.

Donc, la Gazzetta a rebaptisé le flop Nibali en Nibaleone. Un lion dont le retour est applaudi à Bahreïn, par le prince Nasser bin Hamad Al Khalifa.  » Bien, champion. Un des plus grands retours de tous les temps dans un grand tour « , a-t-il posté sur Instagram. Ce n’est pas un hasard : le lendemain, Nasser, responsable du comité olympique de Bahreïn, a annoncé la naissance d’une nouvelle équipe professionnelle, qui brigue le WorldTour.

Pour faire de son royaume une nation de cyclisme. Budget : de 15 à 18 millions d’euros. Le leader de cette équipe sera plus que probablement Vincenzo Nibali, qui s’assure ainsi un très gros salaire. D’après le Bahreïn Center for Human Rights, le prince Nasser a fait torturer des manifestants pour la paix en 2011. Il a été brièvement poursuivi en Angleterre, sans jamais être condamné. Un problème ? Non, une anecdote. Même un requin danse pour l’argent.

Par Jonas Creteur

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