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La vache à lait du Tour de France

Le faible nombre de kilomètres contre le chrono de l’édition 2015 est en partie dû à la chute des audiences télévisées.

Après le contre-la-montre par équipes de 28 km de dimanche prochain, les rouleurs du Tour pourront déjà rentrer au placard. Samedi dernier, ils ont juste eu droit à 13,8 km contre-le-chrono. Ces spécialités ont été introduites au Tour en 1934. Mais jamais encore elles n’avaient été aussi peu nombreuses que cette année.

S’agit-il de ne pas hypothéquer les chances des chouchous français Thibaut Pinot et Romain Bardet ? Sans doute ! Mais ce n’est pas la raison principale. La tendance actuelle consiste en effet un peu partout à réduire le nombre de kilomètres contre-le-chrono. Les organisateurs du Tour ne sont pas seulement chauvins, ce sont aussi des as en matière de marketing. La vente des droits de télévision reste la vache à lait d’ASO.

Chaque année, elle rapporte un peu moins de 60 millions d’euros, dont 25 millions versés par France Télévision. C’est pour cela qu’en 2007, ASO a nommé Christian Prudhomme, un ancien journaliste de télévision, à la direction du Tour. Et c’est aussi la raison pour laquelle au quartier général d’ASO, à Paris, on n’a d’yeux que pour l’audience.

Avec une moyenne de seize millions de téléspectateurs par jour pour le direct – trois fois plus que Paris-Roubaix et Liège-Bastogne-Liège, les deux autres courses cyclistes les plus suivies – le Tour reste de loin la course la plus populaire. « Mais bien qu’il soit leader du marché et que la télévision allemande en achète de nouveau les droits de retransmission, le Tour doit faire face à un grand défi », dit Daam Van Reeth, économiste du sport à la KUL. « De moins en moins de gens regardent la télévision. »

Van Reeth a examiné à la loupe les audiences du Tour dans sept pays : la Belgique, la France, les Pays-Bas, l’Italie, le Royaume Uni, les Etats-Unis et l’Australie. « Depuis le pic historique de 2011, elles baissent de façon systématique. En 2014, on approchait les 9 % de moins qu’en 2011. Si on retire les téléspectateurs français, on arrive même à une chute de plus de 17 %. Sur l’ensemble des sept pays, cela fait 700.000 téléspectateurs de moins par jour : on est passé de près de 8 millions à un peu moins de 7,3 millions. »

Même la Belgique, où le cyclisme est roi, n’échappe pas à la tendance. « En Flandre, où les classiques printanières battent des records, on est passé de 586.000 téléspectateurs par étape du Tour en 2011 à 467.000 l’an dernier (moins 20 %). Et c’est pire en Wallonie avec une chute de 33 % (de 294.000 à 198.000). »

Van Reeth a également étudié les audiences par genre d’étapes pour la Flandre sur la période s’étendant de 1997 à 2014. Comme on pouvait s’y attendre, ce sont les étapes de montagne qui réalisent le meilleur score avec 30 à 40 % de téléspectateurs de plus que lors des étapes de plaine.

Mais les contre-la-montre sont, de loin, les moins populaires. Les épreuves individuelles font 10 % (en moyenne) à 20 % (maximum) moins bien que les étapes de plaine tandis que lors des courses par équipes, on arrive à des audiences 25 % (en moyenne) à 45 % (maximum) inférieures.

Pour ASO, les chiffres sont sacrés car ce sont eux qui attirent les chaînes de télévision, les sponsors et les villes à la recherche d’une plateforme marketing intéressante. Cela vaut bien le sacrifice d’une tradition.

Par Jonas Créteur

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