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Dans le cyclisme règne l’insécurité

Dimanche, lundi… Deux jours à priori banals. Mais deux noms resteront dans les annales : Antoine Demoitié et Daan Myngheer. Le premier est décédé, après avoir été percuté par une moto, à la suite d’une chute à Sainte-Marie-Cappel lors de la classique Gand-Wevelgem. Le second a été victime d’un infarctus lors de la première étape du Critérium international autour de Porto-Vecchio (Corse). Deux drames en autant de jours, aux circonstances drastiquement différentes, qui posent question…

Depuis peu, une technologie « GPS » a fait son apparition dans le milieu du cyclisme. Une puce, placée sous la selle des vélos, permet de localiser les coureurs, calculer leur vitesse moyenne ou encore mesurer leurs différentes accélérations. Selon Europe 1 , les données sont alors recueillies et retranscrites sous forme de schémas, de graphiques. Ainsi, en juillet 2015, lors du Tour de France, les chiffres nous apprenaient que sur une aire de ravitaillement, le peloton évolue à une vitesse moyenne de 20 kilomètres/heure. Mais surtout que « certains coureurs ont atteint, sur certaines étapes des Pyrénées les 100 kilomètres par heure en descente » ! Si cette vitesse est exceptionnelle, elle révèle tout de même des soucis sécuritaires.

En effet, à cette allure, la moindre erreur peut être fatale pour les cyclistes. Et ce n’est pas un simple casque qui permettrait d’épargner la vie des sportifs en cas de chute. Les vélos peuvent donc connaître des vitesses propres à des motos… Et tandis que les motards sont équipés de combinaison en cuir pour éviter les brûlures et amortir les chocs. Alors bien entendu, prendre une telle mesure, alourdirait les coureurs et « dénaturerait » quelque peu le sport, mais certainement cela sauverait-il des vies.

Au-delà de cette inadéquation entre la vitesse des coureurs et les mesures de sécurité établies par l’Union Cycliste Internationale (UCI), d’autres déficits quant à la protection des sportifs sont à déplorer.

Comme on peut le lire dans l’Avenir , le matériel est également soumis à critiques. Les freins à disque des vélos peuvent contribuer à faire d’une chute, a priori banale, un accident mortel. Il n’est également pas rare que les fourches s’endommagent lors d’une chute et que les coureurs passent par-dessus le vélo. Les bicyclettes se voient fabriquées des matériaux les plus légers possibles et dont la fragilité est négligée. Tant de problèmes récurrents sur lesquels l’UCI tarde à se pencher.

« La dernière intervention de l’UCI date du port du casque en 2003… »

Sur sa page Facebook, à la suite du décès d’Antoine Demoitié, le coureur allemand Marcel Kittel dénonce ce phénomène : « (…) Les thèmes de la sécurité devraient recevoir la priorité pour lutter pour un sport plus sûr. Non seulement parce que des vies peuvent être perdues, mais aussi parce qu’il ne s’est pas passé grand-chose jusqu’à présent. La dernière intervention majeure dans le protocole concerne les conditions météo extrêmes, introduit l’an dernier. Sinon, nous devons remonter à 2003, quand l’UCI a imposé le port du casque et seulement parce qu’Andrei Kivilev était mort. »

Priorité à la lutte contre le dopage

On le sait, l’un des plus gros problèmes du cyclisme est lié au dopage, comme le confirme Kittel. « C’est clair: le plus gros problème du cyclisme était le dopage et il doit toujours être combattu ».

La consommation de produits dopants, si elle fausse le sport et ses résultats, conduit inévitablement à des problèmes de santé. Et il n’est pas rare d’observer des problèmes cardiaques chez bon nombre de coureurs. Parfois, amenant à la mort. Alors, certes, tous les coureurs victimes de la « maladie » ne sont pas des consommateurs de stupéfiants, mais des questions peuvent se poser quant au suivi médical des sportifs de haut niveau. La mort de Daan Myngheer, des suites d’un infarctus à l’âge de 22 ans, ne vient que remettre au goût du jour une inquiétude quant à la santé des coureurs, existante depuis la nuit des temps. Si l’on s’en réfère à la liste des décès en course, on peut constater que quatre des 24 coureurs décédés le sont des suites de problèmes cardiaques.

La priorité de l’UCI dans la lutte contre le dopage est légitime, mais celle-ci doit être accompagnée d’un suivi bien plus abouti de l’état de santé des « artistes ».

Le plus gros danger : les véhicules

Un autre problème et pas des moindres : la présence de véhicules dans les courses.

Le cyclisme n’existerait certainement pas sans sponsors et médias. L’UCI en est consciente, tout comme les différents organisateurs des évènements. Dès lors, ils leur octroient souvent la possibilité d’intégrer la course aux abords de véhicules quels qu’ils soient. La course prend alors des allures de cortège, à la sécurité négligée. Les médias se pressent pour obtenir les meilleures images et ne rien rater de la course ; les sponsors essayent, quant à eux, de s’offrir la meilleure visibilité possible.

Alors c’est très bien. L’argent coule à flots. Mais en attendant, les accidents de coureurs impliquant des véhicules sont de plus en plus fréquents ! Dans la nuit de dimanche à lundi, Antoine Demoitié en est décédé . Le Liégeois de 25 ans avait été percuté par une moto, à la suite d’une chute à Sainte-Marie-Cappel lors de la classique Gand-Wevelgem.

Sudpresse déplore le côté récurrent de ce type d’accident en en répertoriant les victimes. Ainsi, en février dernier, Stig Broeckx avait été renversé par une moto à quelques kilomètres de l’arrivée de Kuurne – Bruxelles – Kuurne. En été 2015, c’est Greg Van Avermaet qui avait été fauché par un véhicule.

« Il y a tant de choses qui se passent en course sur lesquelles les coureurs n’ont aucun contrôle: les arrivées dangereuses, les autres véhicules qui suivent les courses, les spectateurs et la météo, par exemple. Les coureurs sont occupés à se concentrer sur la course (…) », explique Marcel Kittel.

Si l’on s’en tient à nouveau à la liste de décès de cyclistes causés par la course, on peut remarquer que six des 24 regrettés sont morts des suites d’une collision avec un véhicule ! Si un accident peut arriver dans les sports comme dans la vie, la mise en place de mesures de sécurité n’est en rien une option.

Toc, toc, toc… Y a-t-il quelqu’un ? Il est temps de réagir !

Quentin Droussin

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