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Wayde dreamer

La logique a été respectée, Wayde van Niekerk (25 ans) a remporté mardi son deuxième titre mondial sur 400 mètres. Jeudi, le Sud-Africain espèrait décrocher l’or sur 200 mètres et signer ainsi un doublé historique. Il a dû se contenter de l’argent. Voici l’histoire de la nouvelle star de l’athlétisme mondial.

Dimanche 14 août 2016. Parti au couloir 8, Wayde van Niekerk, remporte le 400 m. des Jeux Olympiques de Rio en battant de 15 centièmes le record du monde établi en 1999 par Michael Johnson. Le public brésilien, peu connaisseur et venu avant tout pour voir la finale du 100 m. avec Usain Bolt, se rend à peine compte qu’il est en train d’assister à un moment historique. Bolt, lui, sait que Van Niekerk lui a volé la vedette. Il interrompt même une interview du Sud-Africain pour le féliciter. « Je t’avais dit que tu pouvais le faire », dit celui avec qui il s’est entraîné pendant plusieurs mois.

Michael Johnson, consultant pour la BBC, n’en revient pas. « Après Bolt, Wayde va devenir la nouvelle superstar de l’athlétisme », dit-il. Odessa Swarts, la mère de Van Niekerk, met plusieurs jours à s’en remettre. Elle sait que son fils vient d’accomplir un exploit historique. Plus jeune, elle était considérée comme un grand espoir. A 16 ans, on l’appelait « La fille qui courait aussi vite qu’un cheval. »

Suite au boycott de l’Afrique du Sud en raison de sa politique de l’apartheid, elle n’a cependant jamais pu ni voulu prendre part aux grandes épreuves internationales. Elle n’a participé qu’à des épreuves anti-apartheid, comme les « Jeux Olympiques des Opprimés », au Cap.

Elle venait de mettre un terme à sa carrière lorsque le régime de l’apartheid a été levé. Le titre olympique de Van Niekerk est donc d’autant plus symbolique.

Prématuré

Wayde Van Niekerk, la nouvelle star de l'athlétisme.
Wayde Van Niekerk, la nouvelle star de l’athlétisme.© AFP

Van Niekerk est né le 15 juillet 1992. Ce jour-là, sa mère n’aurait jamais imaginé qu’il allait devenir un des meilleurs athlètes du monde: il a en effet pointé le bout de son nez avec 11 semaines d’avance et ne pesait qu’un kilo. Le gynécologue réservait d’ailleurs son pronostic de vie pour 24 heures et pensait qu’il conserverait de toute façon un handicap. Ce ne fut pas le cas mais il passa plusieurs semaines en couveuse. Aujourd’hui, sa mère en rigole: « A l’époque, déjà, il était le plus rapide. »

C’est à l’adolescence que ses talents de sprinter éclatèrent. Il était alors étudiant à Kraaifontein, dans la banlieue du Cap. A 18 ans, il se classait quatrième du championnat du monde juniors et était sacré champion d’Afrique du 200 mètres chez les seniors. Un an plus tard, en 2012, il s’inscrivait en marketing à l’University of the Free State à Bloemfontein et demandait à l’entraîneur de s’occuper de lui.

Anna Sophia Botha, surnommée Tannie Ans – Tante Anne, a déjà 69 ans. Elle a été sauteuse en longueur et en hauteur mais, depuis 1968, elle entraîne des athlètes. Et elle se met en tête de faire de Van Niekerk un athlète de haut niveau. Avec ses parents, elle met en place un plan à long terme qui doit veiller à ce que le corps de l’athlète ne franchisse jamais les limites. Car il est fragile. Elle lui conseille dès lors de se consacrer davantage au 400 mètres plutôt qu’au 200.

Intenable

Wayde van Niekerk lors de son record du monde à Rio.
Wayde van Niekerk lors de son record du monde à Rio.© BELGAIMAGE

L’athlète et son coach s’entendent bien. Tannie prône une discipline de fer -« Arriver cinq minutes à l’avance à l’entraînement, c’est déjà être en retard »- mais veille sur son élève comme une grand-mère. Elle considère d’ailleurs ses athlètes comme ses propres enfants et leur apprend à mieux se connaître eux-mêmes, tant sur le plan physique qu’au niveau psychologique. C’est pourquoi elle assiste à tous les entraînements de Van Niekerk, du début à la fin.

Bien qu’elle ait peu d’expérience avec des athlètes de top niveau, son approche fonctionne. En 2014, Van Niekerk décroche la médaille d’argent aux Jeux du Commonwealth et un an plus tard, alors qu’il n’a que 23 ans, il est champion du monde en 43.48. Ce jour-là, il va si loin qu’on doit l’évacuer du stade en civière.

Depuis, il est intenable. En mars 2016, il passe pour la première fois sous les 10 secondes sur 100 mètres (9.98). Mais ce n’est qu’à Rio qu’il surprend le monde entier. Après la course, Anna Sophia Botha tente de rejoindre la piste pour le féliciter mais elle se fait refouler par les services de sécurité. Personne ne croit qu’une vieille dame de 74 ans aux cheveux blancs soit l’entraîneur du nouveau recordman du monde.

Amour-haine

Van Niekerk rêve du doublé 100-200 mètres.
Van Niekerk rêve du doublé 100-200 mètres.© AFP

Et ce n’est sans doute pas fini. Cette année, Van Niekerk a encore amélioré ses chronos sur 100 et 200 mètres (9.84 et 19.84). Il a également battu le record du monde de Michael Johnson sur 300 mètres. S’il avait signé le doublé, c’eut été historique car seul Michael Johnson l’a fait, à deux reprises (Mondial 1995 et J.O. 1996).

Mais le grand rêve de Wayde Dreamer (son surnom sur Twitter), c’est le doublé 100-200 m., comme Bolt. Il entretient en effet une relation d’amour-haine avec le 400 m., qui lui a valu ses plus grands succès mais qui est tellement exigeant. C’est la raison pour laquelle il court aussi vite: il veut souffrir le moins longtemps possible.

Wayde van Niekerk en bref

Sa mère, Odessa Krausse, est séparée de Wayne Van Niekerk, le père de Wayne, un ex-sauteur en hauteur universitaire. Elle s’est remariée avec Steven Swarts, ex-athlète lui aussi et coach dans une école de Bloemfontein.

Son cousin, Cheslin Kolbe, a décroché une médaille aux Jeux Olympiques de Rio en rugby à sept, avec l’Afrique du Sud.

Après les Jeux, Van Niekerk est devenu le visage de la marque de montres suisses Richard Mille, comme Rafael Nadal, Natalie Portman et Pharrell Williams.

Le Sud-Africain n’a jamais oublié les bons soins reçus à la section prématurés du Groote Schuur Hospital au Cap : en mai 2016, il a offert 500.000 dollars au service. Cette année-là, il a également lancé la Wayde Dreamer Foundation, qui soutient les jeunes athlètes sud-africains.

Il était déjà le plus rapide à sa naissance puisqu’il a vu le jour avec 11 semaines d’avance.

Par Jonas Creteur

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