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Quand le « Jardin des Dieux » veut devenir celui des Dieux du stade

Dans moins de trois mois, le Mouvement Olympique européen s’est donné rendez-vous à Bakou, dans le Caucase. La capitale de l’Azerbaïdjan organise la première édition des Jeux européens.

Du 12 au 28 juin, pas moins de 6.000 athlètes représentant les 50 comités olympiques du vieux continent vont se mesurer dans 31 disciplines issues des 20 sports retenus, dont 16 figurent au programme olympique. La Belgique prendra part à 17 d’entre de ces sports avec une délégation qui devrait être forte d’environ 110 athlètes. Tous peuvent s’attendre à subir « l’effet Waouww » en arrivant sur les bords occidentaux de la mer Caspienne. Car si Bakou signifie « la ville battue par le vent », en vieux persan, un autre sens plus poétique lui est parfois donné: « le Jardin des Dieux ». Et les autorités sont bien décidées à en faire le « Jardin des Dieux du stade ». Elles en ont les moyens.

Dans ce pays de moins de 10 millions d’habitants, devenu indépendant en 1991 après la disparition de l’URSS, les deux tiers de la population ont moins de 35 ans. Le sport est un élément fédérateur pour cette nation et sa jeunesse. Reste à lui donner les moyens. L’Azerbaidjan a été le premier pays au monde où le pétrole, découvert au milieu du XIXe siècle, fut exploité industriellement. En 1900, la moitié du pétrole de la planète provenait de Bakou. Aujourd’hui, les revenus des hydrocabures (le pétrole et le gaz découvert depuis) pour les 20 années à venir sont estimés à 200 milliards de dollars. Le taux de croissance du PIB du pays a été de 13,5% dans la dernière décennie. La chute du cours du pétrole a toutefois ralenti fortement celui-ci.

L’argent généré a permis au pays de se développer notamment avec la construction du 2e plus long oléoduc du monde (1.776 km). Il relie depuis 2006 Bakou, Tbilissi et Ceyhan, sur la côte turque méditerranéenne. Bakou, peuplée de 2,5 millions d’habitants a récemment vu fleurir une série de bâtiments aux architectures d’avant-garde confiées aux plus grands architectes. A commencer par les trois célèbres Flame Towers réalisées en 2012. Hautes de 190 mètres, elles sont entièrement recouvertes de lampes Led qui imitent, la nuit, les flammes, symbolisant la terre du feu qui surgissait lors des forages pétroliers. Les tours ont été conçues par les Américains Hellmuth-Obata-Kassabaum et ont coûté 350 millions d’euros. Le Centre Heudar Aliyev, tout blanc aux formes douces, est un autre symbole de la nouvelle Bakou.

Consacré aux congrès et expositions, il est l’oeuvre de la Britannico-irakienne Zaha Hadid, première femme à avoir obtenu le Prix Pritzker, le Nobel d’architecture. La ‘Ville Blanche’ est un des plus grands projets urbanistiques du monde. Il devrait s’achever au plus tôt vers 2020. Il s’étend sur 221 hectares et s’inspire beaucoup du quartier de la Défense à Paris. Le front de mer, rénové lui aussi, fait désormais de Bakou la ‘Cannes de la Caspienne’ tant il rappelle les charmes de la cité méditerranéenne.

Le sport n’a pas été oublié en dépit de deux échecs à la candidature à l’organisation des jeux Olympiques (2016 et 2020). Les dirigeants de l’Azerbaïdjan continuent à voir grand. La construction d’un nouveau Stade National de 68.000 places (multifonction avec piste d’athlétisme) a été lancée le 6 juin 2011, en présence de Joseph Blatter et Michel Platini, les présidents de la FIFA et de l’UEFA. Imaginé par le bureau sud-coréen d’architectes Heerim, il a coûté 710 millions d’euros et était inauguré officiellement mercredi par le président de la République à la veille des festivités de Novruz, le Nouvel An en Azerbaïdjan qui correspond au retour du printemps.

La décision d’octroyer les Jeux européens à Bakou le 8 décembre 2012 a accéléré le processus. La piscine (trois bassins) de l’architecte espagnol Pujol est sortie de terre en 15 mois et sera opérationnelle à temps. L’Arena de gymnastique, confiée au bureau Broadway Malian, a coûté 165 millions d’euros et a été inaugurée en 2014. Elle a déjà accueillie l’Euro de gym rythmique. Le Village des athlètes aux immeubles à appartements soignés et spacieux en est aux ultimes finitions.

« Mon impression est identique à celle de septembre dernier. Je suis, comme tous les gens qui sont venus ici, impressionné par la qualité à la fois des personnes qui s’occupent des Jeux, qui vont les organiser, et par la qualité des infrastructures qui sont mises en place », a estimé Luc Rampaer, responsable de la Communication du Comité Olympique et Interfédéral Belge présent sur place en ce début de semaine. Franchement, je pense que ce seront des Jeux de qualité avec des infrastructures de qualité olympique, rien de moins, avec des gens qui veulent faire bien et montrer à l’Europe et au monde, puisqu’ils vont diffuser les Jeux européens au-delà des frontières du continent européen, qu’ils sont compétents et capables d’organiser des jeux d’envergure ».

Pas moins de 18 sites, dont cinq entièrement neufs, seront disponibles. Le projet des dirigeants azeris est de disposer à terme de 41 complexes sportifs olympiques à travers le pays.

« Ils veulent utiliser ces Jeux comme un véritable tremplin en organisant un événement majeur multisports, alors qu’ils ont déjà organisé d’autres événements majeurs mais monosport », a précisé William Louis-Marie, le responsable de la Communication du comité organisateur (BEGOC), lors du séminaire organisé sur place en début de semaine. « Tout aura été fait pour que les athlètes, les journalistes, les spectateurs puissent avoir une expérience unique de ces premiers Jeux européens et de cette découverte de l’Azerbaïdjan et se dire ‘c’était un super choix de venir à Bakou’. On veut créer le « Waouww effect » à travers un événement sportif qui n’a pas encore eu lieu et qui va positionner l’Europe et le sport en Europe d’une manière entièrement nouvelle à partir de Bakou ».

On le sait déjà, la Formule 1 va débarquer dans les rues de la cité dès 2016. Le circuit d’Azadliq Square est inspiré de celui de Monaco. Long de 4,379 km, il bénéficiera de la plus longue ligne droite de la saison avec 2,2 km tracés sur la Neftchilar Avenue, les Champs-Elysées de Bakou. Notre compatriote Laurens Vanthoor y a remporté en 2013 et 2014 les épreuves des Blancpain Sprint Series.

En 2017, ce seront les Jeux de la solidarité Islamique et leurs sportifs de 57 pays qui rejoindront la presqu’île d’Abseron. Et pour 2020, l’UEFA a déjà octroyé à Bakou quatre rencontres, dont un quart de finale, de l’Euro-2020. Pas mal pour un pays qui ne figure qu’au 50e rang européen (sur 53) au classement FIFA. Nul doute que l’UEFA a été sensible à l' »effet Waouww » qui ne demande qu’à s’étendre. « Ces Jeux européens sont l’occasion de montrer que l’Azerbaïdjan est une nation moderne et ils permettront d’établir le pays comme une destination majeure du sport en Europe », a déclaré le Ministre des Sports Azad Rahimov qui est aussi le Président du comité d’organisation. Avec, bien sûr, l’espoir d’étendre cette aura au monde entier grâce à des jeux Olympiques, le jardin d’Eden de la planète sport.

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