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Philip Mestdagh: « C’est le moment de se montrer sous son meilleur jour »

Matthias Stockmans
Matthias Stockmans Matthias Stockmans is redacteur van Sport/Voetbalmagazine.

Pour la première fois, les Belgian Cats n’aborderont pas un tournoi avec le statut d’underdog. Après la médaille de bronze au Championnat d’Europe 2017 et la 4e place à la Coupe du Monde 2018, elles font même partie des favoris à l’EURO qui se disputera du 27 juin au 6 juillet en Serbie et en Lettonie. Seront-elles à la hauteur?

Le plus beau basket au monde : c’est l’avis de bon nombre de consultants et d’observateurs. Les Belgian Cats ont conquis les coeurs, lors de la Coupe du Monde disputée en septembre 2018, par leur enthousiasme, leur esprit d’équipe et surtout par leur jeu de passes dynamique. Conséquence : un an plus tard, lors du Championnat d’Europe en Serbie et en Lettonie, la barre est placée bien plus haut.

Une place dans le Top 6, c’est l’objectif officiel. Pour une raison bien simple : elle donnerait accès au tournoi pré-olympique pour les Jeux de Tokyo en 2020, l’ambition ultime de cette génération. Mais, on le sait, l’appétit vient en mangeant, comme le confirme le sélectionneur Philip Mestdagh : « Lorsqu’on atteint les quarts de finale (les vainqueurs de chaque poule sont qualifiés directement, les deuxièmes et troisièmes disputent des barrages, ndlr), il faut oser ambitionner une médaille… et de préférence de la plus belle couleur. Pour cette génération, c’est le moment ou jamais de se montrer sous son meilleur jour. Et tant pis pour la pression. »

Depuis que Philip Mestdagh a pris le relais de Daniel Goethals en 2015, la progression de nos Belgian Cats a été crescendo. « Notre statut a clairement changé », reconnaît l’architecte du succès. « Avant, on espérait tout au plus battre une grande nation en l’une ou l’autre occasion, mais depuis nos exploits à l’EURO et à la Coupe du Monde, nous sommes nous-mêmes devenus une cible. Les adversaires ne vont plus nous sous-estimer. »

La timidité affichée avant l’EURO 2017 a laissé la place à l’ambition d’une génération dorée qui s’appuie sur des vedettes de niveau mondial comme Ann Wauters et Emma Meesseman. Mestdagh : « Lorsque l’on visionne les vidéos de nos entraînements et de nos matches amicaux qui ont précédé le Championnat d’Europe 2017, on voit la différence avec aujourd’hui. L’intensité, surtout, est beaucoup plus élevée. Meesseman a encore progressé, après une année supplémentaire au sommet en Russie et une nouvelle victoire en Euroleague, Julie Allemand s’est beaucoup améliorée à Lyon, tout comme Kim Mestdagh grâce à ses expériences en Turquie et récemment en WNBA avec les Washington Mystics. »

Mais ce n’est pas tout, poursuit Mestdagh : « On a effectué la première partie de notre préparation sans nos trois joueuses majeures, et j’ai constaté qu’on avait progressé sur le plan collectif. On a gagné en maturité, en confiance en soi et en lecture du jeu. Le groupe s’est aussi familiarisé avec un certain style de basket : on n’a ni la taille, ni la puissance physique d’autres nations, on doit donc compenser avec plus de créativité. On va poursuivre dans cette voie, avec nos valeurs sûres qui ont encore progressé et un noyau qui s’est élargi. »

Les bienfaits de l’étranger

Ce changement de mentalité est, en partie, lié au départ de la majorité des Belgian Cats vers l’étranger. Le championnat de Belgique n’est, malheureusement, toujours pas à niveau, car une bonne partie des équipes de première division est encore amateur. En atteste le fait que la jeune joueuse de 21 ans de Wavre Sainte-Catherine, Laure Resimont, élue Joueuse de l’Année deux saisons d’affilée, n’a pas réussi à se faire une place de la sélection définitive pour le Championnat d’Europe. « Laure a eu la malchance de se blesser pendant le stage au Japon, au moment où nous sommes passés des entraînements individuels aux entraînements collectifs et tactiques », relativise le sélectionneur. « Elle a donc raté une grande partie de la préparation alors qu’elle doit encore progresser sur ce plan. La saison prochaine, elle jouera à Tarbes, c’est une bonne chose. Elle apprendra beaucoup dans ce championnat de France en pleine expansion et tactiquement très costaud. C’est pareil pour Antonia Delaere, qui s’en va à Nantes, un club en reconstruction, et pour Kim Mestdagh, qui jouera à Charleville. Julie Allemand reste à Lyon, club avec lequel elle a remporté le titre de championne de France et qui participera à l’Euroleague. Elle y travaille sous la direction d’un très bon coach. Jana Raman passe de deuxième en première division espagnole à Valence. Kyara Linskens construit sa carrière étape par étape : après Nymburk en République Tchèque, et Grozow en Pologne, elle rejoindra Krasnoïarsk, un bon club russe. Je constate avec plaisir que toutes les internationales qui ont franchi le pas en allant jouer à l’étranger, en reviennent meilleures. »

Les seules joueuses du noyau qui évoluent encore dans le championnat de Belgique sont l’expérimentée Marjorie Carpréaux (Kangoeroes Malines), la benjamine de l’équipe Serena-Lynn Geldof et l’ailière Hanne Mestdagh (toutes les deux Namur Capitale), la fille cadette du sélectionneur.

L’expérimentée Wauters

Et il reste un cas à part : Ann Wauters. À 38 ans désormais, elle n’a pas joué en club de toute la saison. Elle a consacré tout ce temps à soigner son genou. Lors de la Coupe du Monde l’an passé, son impact psychologique sur le groupe était grand, mais physiquement, elle n’a pas pu cacher qu’elle n’était pas au top. Pourtant, la quintuple Joueuse Européenne de l’Année n’a pas envie de raccrocher. Elle a un objectif bien précis en tête : les Jeux Olympiques de Tokyo en 2020. Cela doit être le point d »orgue de sa fantastique carrière.

Philip Mestdagh avait déjà annoncé, en début d’année, qu’il emmènerait de toute façon Wauters au Championnat d’Europe en Serbie et en Lettonie, quel que soit son état physique. Pendant la préparation, elle a réussi son come-back sur le terrain. Mestdagh : « Physiquement et mentalement, elle m’apparaît plus fraîche que l’an passé à la même époque. Elle souffrira évidemment d’un manque de rythme, mais son impact ne peut pas être sous-estimé, quel que soit le nombre de minutes qu’elle passe sur le terrain. Lorsqu’elle parle dans le vestiaire, tout le monde écoute. »

La nouvelle positive concernant Ann Wauters compense un peu la déception de ne pas avoir pu boucler à temps le dossier de naturalisation de Celeste Trahan-Davis, la pivot américain de Castors Braine. « C’est très dommage », regrette Mestdagh. « Elle aurait apporté beaucoup à l’équipe, en raison de sa taille notamment, car c’est l’un des domaines dans lesquelles nous souffrons. »

Le sélectionneur se méfie d’un possible excès de confiance. Le basket féminin est plus imprévisible que le basket masculin, estime-t-il. Dans cette optique, c’est un bon signe que la fédération ait déjà prolongé son contrat jusqu’au Championnat d’Europe 2021. Si les Cats devaient échouer dans leur quête du graal olympique, la continuité du projet serait garantie. Ces dames n’ont pas encore écrit le dernier chapitre de leur histoire. Les personnages prêts à prendre le relais sont déjà connus. « On a encore beaucoup de talent en préparation : Hind Ben Abdelkader, Laure Resimont, Elise Ramette et les soeurs Billie et Becky Massey de Wavre Sainte-Catherine. Elles entreront en ligne de compte pour l’avenir », conclut l’architecte du succès.

Philip Mestdagh:
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