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Julie Allemand, une rookie dans l’histoire: « Je veux progresser tous les jours »

Matthias Stockmans
Matthias Stockmans Matthias Stockmans is redacteur van Sport/Voetbalmagazine.

Cet été, Julie Allemand a surpris tout le monde pour ses débuts en WNBA. Il y a deux ans, elle était devenue la meilleure passeuse du Mondial et la semaine dernière elle a mené les Belgian Cats à l’EURO. En d’autres termes: le basket féminin belge ne se limite pas à Emma Meesseman.

Elle ne s’est finalement pas qualifiée pour les play-offs avec son équipe de l’Indiana Fever. Mais sur le plan personnel, Julie Allemand (24 ans) a parfaitement négocié sa première expérience en WNBA. Avec une moyenne de 8,5 points, 4,5 rebonds et 5,8 assists par match, la joueuse belge s’est montrée au niveau statistique, au point de devenir la meilleure rookie de tous les temps dans la prestigieuse ligue américaine. Et à l’entendre, le meilleur est encore à venir…

« Cette expérience outre-Atlantique m’a permis de gagner en confiance », affirme Allemand depuis la France. Depuis septembre, elle joue pour le Basket Lattes Montpellier. « J’y occupe un rôle de leader, mais je dois également prendre mes responsabilités sur le plan offensif lorsque le moment s’y prête. J’ai toujours été du genre à plutôt alimenter mes partenaires et j’essaie toujours de rendre les autres meilleures. Mais en même temps, je sais désormais que je suis capable de prendre les tirs décisifs lorsque c’est nécessaire. »

Je veux montrer à quel point j’ai progressé comme floorleader, y compris verbalement, car je devais aussi m’améliorer dans ce domaine-là.

Julie Allemand

Cette évolution, la Liégeoise la doit au travail intensif effectué aux États-Unis, où elle a dû observer deux semaines de quarantaine dès son arrivée, et où elle a dû se rendre quotidiennement toute seule à la salle de fitness. Elle a pu profiter d’appareils spécialement conçus pour le shoot, la passe et le dribble. « Mon tir à trois points, surtout, s’est beaucoup amélioré, ce qui m’a donné confiance et m’a aussi permis de gagner la confiance de mes partenaires. Ce travail a directement porté ses fruits, que ce soit à Indiana (où son taux de réussite à trois points était de 47,8%, le deuxième meilleur ratio de la ligue, ndlr), à Montpellier et, espérons-le, avec les Belgian Cats prochainement. J’attends avec impatience les prochaines échéances avec l’équipe nationale, ce mois-ci contre l’Ukraine et le Portugal. Je veux montrer à quel point j’ai progressé comme floorleader, y compris verbalement, car je devais aussi m’améliorer dans ce domaine-là. Auparavant, je jouais trop souvent avec le frein à main, j’essayais surtout de ne pas commettre d’erreur. Depuis mon retour de la WNBA, mes craintes ont disparu et j’éprouve du plaisir à prendre l’équipe en mains. »

Patience et caractère

Allemand a commencé à jouer au basket à quatre ans. Elle a effectué ses premiers dribbles à Alleur, avant de débuter en première division à quinze ans, avec Sprimont, puis a été transférée à 18 ans au Castors Braine, avec qui elle a remporté trois titres de championne de Belgique. Elle est ensuite partie en France, d’abord à l’ASVEL Lyon – le club de l’ancienne vedette de NBA Tony Parker – et évolue désormais à Montpellier. Dans un premier temps, elle a éprouvé des difficultés avec le jeu plus physique pratiqué dans l’Hexagone. Mais elle est tout de même devenue championne de France et a été sélectionnée dans le Cinq Majeur du championnat en 2019. Ce furent ensuite les débuts fracassants en WNBA.

Elle doit cette évolution à son caractère. Chez les Belgian Cats, le sélectionneur Philip Mestdagh loue sa force de travail et sa détermination. Allemand aime s’entraîner, souvent et longtemps. Depuis six ans, elle travaille avec un personal coach, Dominic Rossi, fondateur de Corodo, une académie d’entraînement à Mol. « Dominic m’encourage à travailler également des aspects qui me conviennent moins. Mais toujours avec une approche positive, avec une grosse attention portée au mental. Il joue un rôle très important dans mon développement. Y compris dans mes choix de carrière. Nous pesons toujours le pour et le contre. C’est ainsi que j’ai refusé une offre en Russie, parce que je ne la sentais pas et que je pouvais encore beaucoup apprendre en France. Je veux continuer à progresser comme athlète, être meilleure tous les jours. C’est pour ça que j’aime autant m’entraîner. C’est souvent répétitif, mais pour progresser, on n’a pas le choix. Lorsque j’ai quelque chose en tête, je n’arrête pas aussi longtemps que je n’ai pas atteint mon but. J’ai besoin de ça pour me fixer sans cesse de nouveaux objectifs. Je suis dans une bonne période, à ce niveau-là, car quasiment tout ce que j’ai entrepris ces dernières années a réussi. »

Julie Allemand sous le maillot des Belgian Cats.
Julie Allemand sous le maillot des Belgian Cats.

Cette détermination, elle l’a également démontrée dans la construction de sa carrière. Chaque choix est mûrement réfléchi. En 2017, par exemple, elle a fait l’impasse sur l’EURO en République tchèque, où les Belgian Cats ont fait parler d’elles pour la première fois en décrochant la médaille de bronze. Un an plus tard, elle était bien présente à la Coupe du monde en Espagne, où elle a livré des prestations éblouissantes et a largement contribué à la quatrième place de la Belgique. Avec 8,2 assists de moyenne par match, Allemand s’est classée au top des meilleures passeuses du tournoi. Alors qu’elle avait déjà été draftée en 2016 par Indiana Fever, elle a choisi de ne rejoindre la WNBA que quatre ans plus tard. Allemand s’en explique: « En 2017, je trouvais plus important de soigner mon genou endommagé, afin de pouvoir vivre ma première expérience à l’étranger en étant à 100%. J’aurais pu, effectivement, rejoindre la WNBA plus tôt, mais je ne me sentais pas encore prête. En vivant d’abord seule en France pendant quelques années, j’ai gagné suffisamment d’indépendance pour me lancer dans l’aventure américaine. Cet été, j’ai senti que le moment était venu. C’était une saison très particulière, en raison de la crise du coronavirus, mais pour moi c’était peut-être un avantage. En plus, comme ma concurrente au poste de meneuse était indisponible, j’ai eu davantage de temps de jeu qu’espéré. Je me suis sentie très bien sur le terrain. Au moment où l’on se rend compte que l’on a le niveau, on a le sentiment que rien ne peut vous arrêter. »

Le rêve olympique

Le seul coup dur dans cette ascension linéaire, elle l’a encaissé à la fin de la saison dernière, lorsqu’elle a appris que Lyon ne prolongerait pas son contrat. Et c’est en revancharde qu’elle a pris l’avion pour les States. « Au départ, j’étais déçue de ne pas pouvoir rester, je trouvais même que c’était injuste, mais avec le recul, je me dis que c’était peut-être mieux ainsi. J’étais trop dans ma zone de confort à Lyon, alors que je peux remplir un autre rôle à Montpellier. Avec une bonne équipe et un bon coach, le Belge Thibaut Petit. C’est lui qui m’avait fait venir à Braine, à l’époque. Je trouve qu’il est important de connaître le coach avec lequel on travaille, surtout comme meneuse. »

Son coach en équipe nationale, Philip Mestdagh, compte aussi sur la progression de la stratège liégeoise. Avec Emma Meesseman et Kim Mestdagh, elle devra prendre l’équipe en mains l’été prochain, aux Jeux Olympiques de Tokyo. Du moins si ceux-ci sont maintenus. « Je l’espère de tout coeur », dit Allemand. « Car c’est mon rêve. Ce sera un été très chargé, avec l’EURO, les JO et peut-être encore la WNBA. Je n’ai aucune idée de la manière dont je pourrai combiner tout ça, mais j’ai encore le temps d’y réfléchir. Tout dépendra de toute façon de l’évolution du coronavirus. Quoi qu’il en soit, les Jeux constitueront mon objectif principal pour 2021. » Et on le sait, lorsque Julie Allemand se fixe un objectif…

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