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Classé à l’Unesco, l’alpinisme espère prendre un nouvel essor

Et si le classement au patrimoine culturel de l’Unesco donnait un nouveau coup de projecteur sur l’alpinisme ? C’est tout l’espoir de la communauté montagnarde des Alpes, déjà encordée pour assurer l’avenir de sa passion.

« Ce label va positiver une pratique trop souvent associée à l’accident et en expliquer le joli côté », estime Bernard Prud’homme, qui était chargé de coordonner le dossier côté français.

« La société a besoin de l’alpinisme », ose même le guide. « Le fait d’apprendre la gestion du risque veut dire que la société est dynamique », estime-t-il.

Trouver de nouveaux adeptes est l’une des « mesures de sauvegarde » mises en avant dans la candidature portée par la France, l’Italie et la Suisse et adoptée lors de l’assemblée générale de l’organisation à Bogota jeudi.

Car cette distinction n’est pas « un pin’s » à arborer fièrement sur une veste mais bien une distinction qui oblige à « continuer l’aventure », rappelle Eric Fournier, maire de Chamonix.

Les clubs alpins comptent actuellement 327.000 membres italiens, 150.000 suisses et 95.000 français.

« Pour un alpinisme vivant, il faut former les nouvelles générations », souligne Luc Thibal de la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM).

A Chamonix, capitale française de l’alpinisme, « 150 lycéens découvrent chaque année depuis cinq ans l’alpinisme durant deux jours », cite-t-il en exemple.

L’idée serait de passer à la vitesse supérieure, en relançant les classes vertes et de neige, délaissées en raison des freins administratifs, selon Christian Jacquier, président du Syndicat national des guides de montagne (SNGM). Le ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer aurait marqué, selon lui, son intérêt pour les « valeurs éducatives de la montagne ».

Côté italien, Renato Veronesi du Club alpin italien (CAI) parle aussi de « former les enseignants sur le respect de la montagne » et d’en promouvoir la culture – sa sobriété, son sens des responsabilités – « à travers les musées, les festivals de cinéma, les écoles, l’édition… »

Le grand défi: le changement climatique

Un autre grand défi de l’alpinisme est le changement climatique.

La haute montagne en subit les effets en accéléré: recul glaciaire, fonte du permafrost et déstabilisation des terrains, écroulements rocheux.

Classé à l'Unesco, l'alpinisme espère prendre un nouvel essor
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« S’adapter ? C’est l’essence même de notre pratique! On le fait depuis que l’alpinisme existe », assure Pierre Mathey, secrétaire général de l’Association suisse des guides de montagne (ASGM).

« Des itinéraires doivent être abandonnés, contournés; des refuges déplacés », énumère-t-il.

Et surtout, la saisonnalité va devoir évoluer. « On est vraiment la génération où il y aura plein de +cartons+ (accidents, ndlr) si on ne s’adapte pas. Il va falloir oublier juillet/août car les glaciers ne sont plus en condition », analyse Lara Amoros, jeune guide de 32 ans.

Mais l’extension de la saison au printemps et à l’automne va demander aussi que les refuges, les dessertes, les remontées mécaniques suivent le rythme.

Pour la jeune femme, c’est aussi une opportunité de « promouvoir les différentes facettes de l’alpinisme: plus seulement atteindre un sommet mais faire une course d’arête, et en changeant d’altitude ».

Et les guides vont avoir « un rôle pédagogique sur l’environnement auprès de leurs clients », estime Georges Unia, de la commission environnement/climat du SNGM. « Ce classement, c’est une nouvelle trajectoire possible pour les professionnels ».

Mais tout cela n’aura de sens que si les trois Etats lauréats respectent leur engagement de « préserver le libre accès à la haute montagne », principe fondamental pour les alpinistes.

« Les Alpes sont le seul massif d’importance qui est gratuit. Partout ailleurs, en Argentine, aux USA, au Canada, au Japon, dans l’Himalaya, il y a un ticket d’entrée », rappelle M. Mathey.

« Il ne faut pas que des épiphénomènes de sur-fréquentation comme à la voie normale du Mont-Blanc amène les Etats à tout réguler », met-il en garde.

Car « sans les rêves des hommes, les montagnes ne sont qu’un tas de pierres », rappelle Fabrizia Derriard, ex-maire de Courmayeur.

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