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Cassure inédite autour des JO-2018 entre les sportifs et les politiques russes

Depuis la décision du Comité international olympique (CIO) de suspendre la Russie des JO-2018, une ligne de fracture inédite est apparue en Russie entre les mondes sportif et politique sur l’attitude à adopter.

Mercredi soir, le président Vladimir Poutine a finalement annoncé que la Russie ne boycotterait pas les jeux Olympiques d’hiver 2018 et « n’empêcherait pas » les sportifs qui le désirent d’y participer. Cette décision a été saluée par le président du CIO Thomas Bach et était attendue par l’immense majorité des sportifs russes.

Mais jusqu’alors, la classe politique russe dans sa quasi-intégralité s’était emportée contre la décision de l’instance olympique d’exclure la Russie des JO d’hiver organisés en Corée du Sud du 9 au 25 février prochain, appelant à un boycott pur et simple de la compétition.

Le député du parti LDPR Igor Lebedev, vice-président de la Douma (chambre des députés) russe, estimait dès mardi soir que la seule solution était « le refus total de participer aux jeux Olympiques » tandis que Vladimir Jirinovski, le leader de ce parti nationaliste, condamnait une décision « sportivement et politiquement raciste », selon des propos publiés par l’agence de presse Ria Novosti.

Sur VK, l’équivalent russe de Facebook, la députée et ex-procureure de Crimée Natalia Poklonskaïa estimait de son côté que les athlètes russes ne pouvaient défiler à Pyeongchang que « sous le drapeau de notre grand pays ».

– ‘Sales petits jeux politiques’ –

Début novembre, Vladimir Poutine avait insinué que les accusations de dopage contre les sportifs russes étaient orchestrées par les Etats-Unis, un thème repris par plusieurs responsables russes.

« Nous sommes pour que le sport sorte de la sphère des sales petits jeux politiques. Nous espérons que cette approche prévaudra à Washington tôt ou tard », a ainsi déclaré le vice-ministre des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, cité par l’agence TASS.

Une position répétée par la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova, pour qui la décision du CIO est « une attaque massive liée au fait que la politique d’isolation de la Russie ayant échoué », on s’en prend maintenant à la sphère sportive.

Mais pour beaucoup de sportifs russes, faire un trait sur les jeux Olympiques et quatre ans de travail est tout simplement impensable.

La passe d’arme entre le vice-président de la Douma Piotr Tolstoï et l’ancienne détentrice du record du monde de triple saut Yolanda Chen sur la chaîne publique Pervy Kanal, qui diffusait en direct l’annonce du CIO, a illustré l’opposition entre sportifs et hommes politiques.

– ‘Vrais traîtres’ –

« Les vrais traîtres sont ceux qui n’ont pas levé un petit doigt pour défendre nos sportifs pendant deux ans », a asséné l’ex-championne du monde en salle, devenue commentatrice pour une chaîne sportive de la télévision russe, dans une séquence abondamment reprise par les réseaux sociaux.

« C’est une confrontation sans précédent entre les politiques et les sportifs. Il est évident que les hommes politiques sont à blâmer (…) pour la décision du CIO et maintenant, ils essaient de transformer en traîtres ceux qui se préparent à aller aux Jeux », a précisé Yolanda Chen mercredi à l’AFP. « Ils crient au patriotisme mais nous sommes les vrais patriotes, pas eux. C’est nous qui sommes prêts à aller aux Jeux sans drapeau et sans hymne, pour défendre l’honneur de la Nation », a ajouté l’ancienne championne du monde.

Ce constat était partagé par l’immense majorité des sportifs interrogés par les médias russes, et aussi par les anciennes stars de l’olympisme russe. « Si j’étais à leur place, j’irais aux JO », a déclaré la légende du patinage artistique Evgeni Plushenko, se disant même « content de la décision du CIO, car elle aurait pu être pire ».

Le nombre et l’identité des athlètes russes susceptibles de participer aux jeux Olympiques ne seront connus qu’après la prochaine réunion du Comité olympique russe (ROC), prévue le 12 décembre.

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