©  inge kinnet

Billet senior pour le Qatar

C’est parti! Match et cérémonie d’ouverture à couper le souffle dans le stade Al Bayt situé en plein désert, entièrement démontable, présenté fièrement par l’émir en charge de l’organisation comme n’ayant provoqué la mort d’aucun ouvrier. Alors déjà bravo, gommette verte pour l’organisation qatarie pour avoir concentré ses 6.500 morts sur le restant de ses stades. Ça mérite une mention, vous ne trouvez pas?

Oui, je suis en boucle parce que, décidément, ce Mondial est une blague qui ne me fait pas rire. Elle aura par contre l’avantage de détourner un peu l’attention sur les manquements de notre sélectionneur. Roberto a si bien préparé l’avenir qu’il risque de nous aligner la défense qu’il avait établie pour son premier match officiel avec les Diables en 2016, à Chypre, à Vermaelen près: Meunier, Alderweireld, Vertonghen, Vermaelen. Est-ce que Qatar Airways fait des billets senior? Si oui, Boyata embarque et pourra faire un concours de mauvaises relances avec plus-si-sterke-Jan. Sinon, Denayer est déjà presque sur place, pratique. Ou bien Zeno Debast, le fils caché de Martínez?

J’en ai marre d’essayer de comprendre comment on a pu laisser se produire un truc pareil.

Surtout pas de Mechele, ça non, lui qui turbine à son meilleur niveau depuis deux saisons, mais qui s’écrase comme une loque dans un groupe, le profil préféré de Martínez, l’anti-Nainggolan, juste bon à faire plot à l’entraînement, facile à mettre sur le banc. Et faire confiance à un Faes qui creuse son trou sous les yeux du grand public démontrerait à quel point le sélectionneur a mal travaillé jusque-là. Son rôle n’est-il pas d’anticiper ce genre d’éclosion?

Aux autres postes, rien n’a changé non plus, Martínez persiste à confondre continuité et encroûtement. Et à tout miser sur KDB et Courtois pour sauver les meubles. En somme, ne pas regarder la Coupe du monde semble moins ardu qu’on pourrait le croire. Un mauvais film qu’on a déjà vu plusieurs fois, le même réalisateur derrière la caméra, la durée rabotée de quelques minutes au fil du temps. Mais comme la Fédé se contente de peu, qui sait, peut-être qu’elle prolongera The Polite One jusqu’au Mondial au Groenland au printemps 2032. Un tableau pareil, franchement, ce serait pas une incitation au boycott? Si les morts ne suffisent pas évidemment.

C’est la première fois qu’un chronique me coûte autant. 3.700 signes rédigés avec des doigts de plomb. J’en ai marre d’essayer de comprendre comment on a pu laisser se produire un truc pareil. Marre d’entendre les «il fallait se réveiller plus tôt» comme si, nous, simples amateurs de sport, avions toutes les clés pour prévoir les squelettes sous la tôle du désert. Et quand bien même, marre de se laisser croire que notre colère et notre déception auraient pu atteindre les matelas de billets sur lesquels les décideurs opèrent en toute impunité. On tire la gueule pour le Qatar, on nous fout l’Arabie saoudite pour les JO d’hiver. De toute façon, qu’est-ce qu’on va faire, nous les gueux? Nous qui regardons ce sport, ce sport ne nous regarde pas, ne nous regarde plus.

Je rends une chronique de 3.700 signes qui ne fait même pas, en signes, le nombre d’ouvriers morts. Il manque 2.800 signes pour atteindre 6.500, ce chiffre ahurissant que rien ne peut justifier ni excuser. 3.700 lettres, allez-y, comptez-les, une pour chaque mort, et rajoutez en 2.800. Une chronique amère dans laquelle même les espaces sont des morts.

La semaine passée, je me suis surpris à regretter la trop bonne qualité d’un terrain sur lequel j’allais jouer. J’ai dit putain, sur un billard pareil, on va courir après le ballon, je préfère les terrains crapuleux. Max m’a répondu: «Tu deviendrais pas un vieux con toi?» Du haut de ma connerie, j’ai souhaité de la boue sur nos terrains et de la neige sur vos charniers.

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