Jacques Sys

Un EURO avec beaucoup de questions, mais peu de réponses

Jacques Sys Jacques Sys, rédacteur en chef de Sport/Foot Magazine.

Découvrez l’édito de notre rédacteur en chef Jacques Sys.

C’était en 2012. Michel Platini, patron de l’UEFA, annonçait avec le dédain qui le caractérise son idée folle d’organiser l’EURO 2020 dans une douzaine de villes réparties dans toute l’Europe. Une idée qui n’avait pas que des partisans. On a craint directement des soucis organisationnels et structurels. Mais Platini n’a pas abandonné son plan, malgré des réticences en interne. 32 pays étaient candidats alors qu’il y avait de la place pour treize villes. Plus tard, le nombre a été réduit à douze, puis finalement à onze.

Le coup d’envoi sera donc donné ce vendredi au stade olympique de Rome, avec un clash entre l’Italie et la Turquie. Bruxelles, capitale de l’Europe et siège de différentes institutions continentales, aurait dû entrer en ligne de compte pour organiser ce match. Mais on sait ce qu’il est advenu du projet de nouveau stade national à cause des intérêts provinciaux et des conflits politiques. Une honte pour notre pays. Et cette histoire prouve une nouvelle fois qu’en matière d’infrastructures sportives, la Belgique reste un pays sous-développé.

Les Diables rouges disputeront donc leur EURO sans avoir l’avantage de se produire à domicile, même si cet avantage a été diminué à cause de la capacité limitée des stades en raison du covid. Cette génération, vu son statut, est obligée de remporter enfin un trophée. Une attente qui existait déjà dans les tournois précédents. Depuis la Coupe du monde 2014, l’optimisme est au rendez-vous à l’approche de chaque phase finale. Les Diables étaient le produit national par excellence, et quand ils sont revenus de Russie en 2018 avec la médaille de bronze, tout le pays s’est mis en extase. Ce jour-là, l’apparition de nos joueurs sur la Grand-Place de Bruxelles ressemblait à une joyeuse entrée de gladiateurs.

En matière d’infrastructures sportives, la Belgique reste un pays sous-développé.

Est-il réaliste de penser qu’on pourra de nouveau assister aux mêmes scènes après la finale du 11 juillet? L’optimisme est toujours présent mais la tonalité est quand même moins enthousiaste. On constate un double sentiment. Plusieurs Diables ont entre-temps encore passé un palier dans leur progression. Kevin De Bruyne est encore plus dominant, mais il a pris un gros coup en finale de la Ligue des Champions le week-end passé. Romelu Lukaku est définitivement devenu un tueur. Et Youri Tielemans a encore pris un peu plus de galon avec Leicester.

À côté de ça, il y a plusieurs points d’interrogation qui amènent un certain scepticisme. On peut ainsi se demander si le fragile Eden Hazard est capable d’enchaîner sept matches en l’espace d’un mois, au cas où la Belgique irait en finale. Et qu’en est-il de l’état physique d’ Axel Witsel, patron de l’entrejeu, celui que Roberto Martínez considère comme son pion le plus important? Et notre défense, qui continue à se chercher un patron aussi autoritaire que Vincent Kompany, peut-elle tenir debout? Pour le moment, toutes ces questions n’ont pas de réponse. Face à toutes ces incertitudes, le sélectionneur se retrouve au-devant d’un sacré défi. Plus que jamais.

Cet EURO doit être le prélude à un magnifique été sportif et tirer un trait sur une saison dramatique pour le football, sans spectateurs et avec des clubs aux finances plus précaires que jamais. On a l’impression d’arriver à la sortie d’un long tunnel et de retrouver progressivement une vie normale. Mais les mesures sanitaires resteront strictes. Pour cette raison aussi, l’EURO va être particulier. Il y aura moins de monde dans les villes organisatrices et dans les stades, et on n’aura donc pas l’impression habituelle que le sport rassemble les gens.

Sport, santé et business forment rarement un mariage heureux. Parce que chaque pan a ses propres intérêts. On le voit aussi dans le dossier des Jeux Olympiques de Tokyo. Doivent-ils avoir lieu? Cette question-là divise les Japonais.

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