© Xinhua (Meng Dingbo)

Thomas Vermaelen, en 2012: « Tout le monde le sait que ma meilleure place demeure dans l’axe »

Stephane Vande Velde

Quand les Diables débarquent à Wembley pour un amical à jouer avant un EURO passé devant la TV, Verminator est aux yeux anglais l’un des noms les plus brillants du onze aligné par Marc Wilmots. L’histoire d’un homme en avance sur son époque.

Pendant que la génération dorée reste un simple sparring-partner, qui s’apprête à affronter une Angleterre en pleine préparation pour l’EURO, Thomas Vermaelen est déjà au sommet de sa carrière. Celui qu’on surnomme Verminator de l’autre côté de la Manche porte d’ailleurs le brassard de capitaine le 2 juin 2012, au moment de monter sur la pelouse de Wembley pour tenir la dragée haute aux Three Lions et lancer le véritable espoir de lendemains qui chantent.

S’il sera de tous les voyages internationaux qui suivront, l’essentiel des highlights de la carrière de l’Anversois se situent entre 2009 et 2012, quand sa rencontre avec Arsène Wenger fait de lui l’un des défenseurs les plus réputés de Premier League. La suite de l’histoire sera celle d’un dépanneur de luxe, titulaire incontestable quand son corps le veut bien, mais plus souvent allongé sur un brancard qu’aligné sur une pelouse à l’heure de répondre à l’appel du Diable. Un diamant niché dans un corps en cristal.

On touche du bois, cela fait maintenant quatre mois que tu n’es plus blessé…

THOMAS VERMAELEN : Oui, j’ai eu une petite blessure en janvier mais à part ce petit coup d’arrêt, j’ai pratiquement tout joué. Je suis donc assez satisfait.

Tu as douté durant ces deux saisons marquées par les blessures (ndlr : arrêt pendant huit mois, puis six semaines suite à des problèmes de tendon de la voûte plantaire) ?

VERMAELEN : Je n’ai jamais douté. J’ai beaucoup travaillé durant un an pour revenir à niveau. Je me focalisais uniquement sur ma rééducation, sans me préoccuper du temps que cela prendrait. L’année passée, j’ai été éloigné pendant pratiquement un an, c’était frustrant et de temps en temps, j’en avais marre, mais je ne me suis jamais éloigné de mon objectif premier : ma revalidation.

Et à ton retour, tu n’as jamais pensé à une rechute ?

VERMAELEN : Non. Je savais que j’allais devoir retrouver le rythme progressivement. À la fin de la saison passée, j’ai pu disputer les deux dernières rencontres de championnat et j’ai vu que cela se passait bien. J’ai alors pu reprendre la préparation.

« Je n’ai jamais douté »

Comment expliques-tu tes pépins physiques ? Un corps qui doit s’adapter aux rigueurs de la Premier League ou un style de jeu combatif qui laisse la place aux blessures ?

VERMAELEN : Ni l’un, ni l’autre. Tout le monde n’a pas de tendon supplémentaire autour du talon d’Achille comme moi. J’ai eu la malchance d’avoir ça. On s’en est occupé des deux côtés et je ne devrais plus en souffrir. Mais cela n’a rien à voir avec une question d’adaptation au championnat anglais ni à ma manière de jouer.

Malgré tes blessures, tu t’es très vite imposé à Arsenal, en devenant une pièce-maîtresse et un leader…

VERMAELEN : Je ne suis pas quelqu’un qui a l’habitude de parler en dehors du terrain mais sur celui-ci, je conseille, je donne des ordres tactiques pour que tout tourne parfaitement. C’est peut-être pour cette raison que l’on me perçoit comme un leader.

C’est aussi parce que tu t’es toujours senti soutenu par le manager Arsène Wenger ?

VERMAELEN : C’est vrai que depuis mon arrivée, je fais partie du onze de base. Dès la première saison, j’ai été habitué à tout jouer. Cela donne évidemment beaucoup de confiance. J’ai toujours reçu du soutien de sa part lorsque j’étais blessé. Une des preuves fut ma prolongation de contrat en octobre, après presqu’une année de blessure. Je ne peux que me féliciter de cette confiance du manager et du club.

Aujourd’hui, tu es cité fréquemment parmi les meilleurs défenseurs d’Angleterre. Cela te rend fier ?

VERMAELEN : Bien sûr. Je suis fier de porter le maillot d’Arsenal que je considère comme un club fabuleux. Évoluer en Premier League est également un rêve. Je prends du plaisir chaque semaine. Quand j’ai signé ici, je partais dans l’idée de prendre du plaisir et de profiter de ce transfert. Mais je n’ai pas douté de mon niveau. Je savais que j’arrivais naturellement dans un grand club et je me disais qu’il me faudrait un petit temps d’adaptation. Finalement, j’ai tout de suite été lancé dans la bain et je ne peux que m’en réjouir.

On t’a toujours décrit comme quelqu’un de pro et de mature. Cela explique ta réussite ?

VERMAELEN : J’essaye d’être pro. Tu n’as pas le choix si tu veux évoluer au top. On pense que le football, cela fonctionne seulement avec les pieds mais c’est aussi une question de mentalité. C’est aussi important que le talent. J’ai vu beaucoup de joueurs très talentueux à quinze, seize ans mais qui, par la suite, stagnaient. Parce qu’ils n’avaient pas la mentalité adéquate ou n’étaient pas assez professionnels. Le football est une succession de paliers. Et pour les franchir, il faut travailler.

J’ai vu beaucoup de joueurs très talentueux à quinze, seize ans mais qui, par la suite, stagnaient. Parce qu’ils n’avaient pas la mentalité adéquate ou n’étaient pas assez professionnels.

Thomas Vermaelen

Parlons de la drôle de saison d’Arsenal : un départ catastrophique, un retour du diable vauvert et une fin de saison marquée par la fatigue…

VERMAELEN : Le début de saison ne fut pas évident. On a très mal débuté avec un point sur 9 et la correction face à Manchester United. Le jeu n’était pas bon, les départs de Samir Nasri et Cesc Fàbregas ont certainement joué un rôle, même si, la saison précédente, on n’avait pas pu beaucoup compter sur Fàbregas, blessé. Et à cela s’ajoutaient de nombreuses blessures comme celle de Jack Wilshere. À cette époque, on a dû évoluer avec de nombreux jeunes de 18-19 ans. Je me rappelle que contre Liverpool, on avait dû aligner des joueurs dont personne n’avait entendu parler. Mais à la fin du mercato, Arsène Wenger a pu transférer des éléments qui ont équilibré l’équipe. Notamment Mikel Arteta qui nous a apporté de la stabilité. C’est un leader, il est un peu plus âgé et a davantage d’expérience. A partir de ce moment-là, l’équipe a commencé à tourner de mieux en mieux.

Le vestiaire a-t-il douté de la politique d’Arsenal ?

VERMAELEN : Vraiment douté non, parce que je savais que la période de transferts n’était pas terminée et que de nouveaux éléments allaient arriver. Mais c’est vrai que j’ai réfléchi à la situation. Je n’étais pas satisfait du début de saison mais de là à douter du club ou de la qualité des joueurs, il y a un pas…

Après le 8-2 face à ManU, on a même évoqué le départ de Wenger…

VERMAELEN : À l’intérieur du club et du noyau, il n’y a jamais eu de doutes sur Wenger. C’est toujours facile de regarder les résultats sur une courte période et de limoger l’entraîneur. Mais ce n’est jamais une solution. Quand on voit ce qu’il a réalisé dans le passé pour Arsenal, il a du crédit. Avoir cinq entraîneurs en cinq ans, cela ne constitue pas un gage de stabilité pour un club.

Comment expliquer les départs d’Arsenal ces dernières saisons (Clichy, Nasri, Fabregas avant peut-être Van Persie) ?

VERMAELEN : Chaque cas est différent. Il n’y a pas de raison précise. Certains veulent découvrir une autre culture, d’autres veulent un meilleur contrat. Cesc voulait, par exemple, revenir dans son pays natal. Je sais juste que ceux qui partent continuent à aimer Arsenal et à venir nous voir. Les départs font partie de l’histoire de chaque club.

Arsenal est-il voué à reconstruire chaque saison ?

VERMAELEN : Non, je ne crois pas. Je crois qu’il y a désormais un groupe de huit équipes qui jouent le haut du tableau et Arsenal en fait partie. Mais on doit bien admettre qu’il y aura toujours des ups and downs. Il n’y a que Barcelone qui peut rester 20 ans au sommet de son championnat. Dire qu’Arsenal ne peut plus rien gagner n’est pas correct. Arsenal fait partie des formations anglaises qui peuvent rêver du titre en début de saison mais il faut tendre à davantage de consistance afin d’obtenir plus de régularité et de décrocher des prix.

Mais Manchester United arrive à rester au sommet…

VERMAELEN : C’est difficile à expliquer, car je ne travaille pas là-bas. Je ne sais pas comment le club fonctionne. Mais cela ne sert à rien de s’occuper des autres. Focalisons-nous sur notre propre évolution !

« On peut aussi évoluer à dix derrière le ballon mais ce n’est pas notre conception »

Votre attaque fonctionne bien (troisième meilleure anglaise) mais pas votre défense (neuvième). Pourquoi prend-elle l’eau autant ?

VERMAELEN : Cela vient de notre manière de jouer.

Trop offensive ?

VERMAELEN : Non, pas trop. C’est une philosophie. On marque beaucoup mais le désavantage, c’est qu’on encaisse aussi plus facilement. Mais il n’y a pas de raison de changer même si cela comporte certains risques vu qu’il y a davantage de joueurs devant le ballon que derrière celui-ci. On a vu comment Chelsea a joué contre Barcelone. On peut aussi évoluer à dix derrière le ballon mais ce n’est pas notre conception.

La défense a également souffert de nombreuses blessures ?

VERMAELEN : Oui, notamment les deux backs, Bacary Sagna et Kieran Gibbs, mais on ne peut séparer la défense du reste de l’équipe. Si celle-ci tourne, cela devient beaucoup plus facile pour la défense.

Arsenal est-elle l’équipe la plus offensive de Premier League ?

VERMAELEN : Sans doute, oui.

Et ce n’est pas difficile d’être défenseur dans une équipe comme celle-là ?

VERMAELEN : Non puisque je marque aussi (Il rit).

Arsenal occupe la troisième place. C’était votre objectif ?

VERMAELEN : Pas vraiment. On voulait lutter pour le titre. Mais si tu regardes d’où on vient, on ne peut que se montrer satisfait. Cependant, pour les années à venir, Arsenal ne peut pas se contenter de cette troisième place. On doit viser plus haut. Que ce soit en championnat ou en Ligue des Champions.

La Ligue des Champions, un regret cette année ?

VERMAELEN : Évidemment. On a connu un soir compliqué à Milan. Tout le monde a été mauvais, moi y compris. On ne sait pas être tout le temps à 100%. Et ce soir-là, il s’agissait du jour sans dans toute sa splendeur. Et le plus frustrant, c’est de se dire qu’on n’est pas éliminé sur notre valeur. Lors du match retour, on a prouvé qu’on valait, et même qu’on était supérieur à l’AC Milan.

« Le retour de Thierry Henry nous a apporté beaucoup d’expérience »

Il reste maintenant à garder cette troisième place lors des deux derniers matches…

VERMAELEN : Oui. Pff. Après une belle série, on n’a pris qu’un point sur six avec ce partage contre Chelsea et cette défaite à Wigan. Avec six sur six, on serait bien tranquille. Là, le combat s’annonce encore rude avec Newcastle ou Tottenham. D’autant plus que si Chelsea gagne la Ligue des Champions, la quatrième place n’est plus qualificative. À nous donc de conserver cette troisième place. Ou alors il faudra supporter le Bayern (Il rit).

Bien que tu ne cesses de dire que tu préfères le poste de défenseur central à celui de back gauche, tu n’as jamais autant joué à cette position que cette saison…

VERMAELEN : En équipe nationale, c’est devenu assez fréquent. Plus qu’à Arsenal où je n’ai presque jamais évolué à cette position avant cette saison où j’y ai été aligné six ou sept semaines, tout simplement parce que tous les joueurs pouvant évoluer au poste de back gauche étaient blessés. J’accepte pour le bien de l’équipe. Mais Arsène Wenger sait très bien que ma meilleure place demeure dans l’axe. Tout le monde le sait. Wenger, Leekens, tout le monde.

Pourquoi n’aimes-tu pas le poste de back gauche ?

VERMAELEN : Ce n’est tout simplement pas ma position. Un attaquant n’apprécie pas non plus de jouer back droit, par exemple. Pour moi, ce sont deux positions complètement différentes.

A chaque but, te remémores-tu les propos de Tony Adams, qui, à ton arrivée, avait affirmé que tu n’étais pas assez grand (1m83) pour la Premier League ?

VERMAELEN : (Il sourit) Non, non. Je l’ai rencontré à plusieurs reprises. On n’en a pas parlé mais j’espère qu’il a changé d’avis (Il rit). Il avait son avis et je n’ai aucun problème avec cela. J’ai beaucoup de respect pour ce qu’il a fait pour le club. C’est une légende. Arsenal a une grande histoire avec les Adams, Henry, Bergkamp, Pirès. Steve Bould est, par exemple, entraîneur chez les -17 ans et c’est important de voir ces légendes encore graviter autour du club car elles sont une source d’inspiration pour nous.

Qu’a apporté Henry lors son retour ?

VERMAELEN : Beaucoup d’expérience. Il était très détendu. Il parlait avec tout le monde. Il a, non seulement, marqué des buts importants contre Leeds en Cup ou Sunderland en championnat mais a aussi conseillé les jeunes en dehors du terrain.

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