Jacques Sys
Rendez-nous le Topper
Ce dimanche, Anderlecht et Bruges se retrouvent pour une nouvelle édition du fameux Topper. Un rendez-vous traditionnellement chargé en grosses émotions. Même si pour le Club, il ne semble être qu’une étape de plus vers le titre. Un duel de prestige, rien de plus. Alors que pour Anderlecht, ce sera un match peut-être capital en vue d’une participation aux play-offs 1.
Au cours des cinq dernières années, le rapport de force entre les deux entités s’est complètement inversé. En 2016, Bruges avait arraché le titre, justement à l’occasion d’une confrontation avec les Mauves. Après onze saisons de disette, une éternité en football. Ce jour-là, le Club avait survolé le Sporting (4-0) avec ses vieilles recettes: un vrai bloc, des joueurs à leur top au niveau mental, un mélange de puissance physique, d’endurance, de créativité, d’inventivité et d’opportunisme. Et avec un entraîneur, Michel Preud’homme, tellement vanté qu’on pouvait avoir l’impression que ce titre était le sien, et rien que le sien. Sur le banc bruxellois, il y avait un coach sans idée, perdu: Besnik Hasi.
L’écart entre Bruges et Anderlecht n’a jamais été aussi colossal qu’aujourd’hui.
Changement de décor un an plus tard, quand Anderlecht a repris son bien en terminant avec sept points d’avance sur Bruges. Avec un René Weiler qui avait fait le procès de son équipe plus tôt dans la saison et s’était fait remonter les bretelles par sa direction. Dans la première ligne droite, Weiler avait beaucoup cherché et chipoté, alignant 29 joueurs en l’espace de trois mois. Anderlecht était une équipe en construction. Mais tout s’était donc bien terminé.
À Bruges, à l’approche de l’été 2017, il ne restait pas grand-chose du succès acquis un an plus tôt. Preud’homme a pointé un certain laxisme et lâché qu’il ne voulait continuer qu’avec des joueurs décidés à mouiller le maillot. Puis il a dégagé le plancher et a été remplacé par Ivan Leko. À Bruxelles, Weiler a eu le renfort qu’il voulait absolument: Sven Kums.
Dans ce sport, tout peut changer très rapidement. L’avance de Bruges au classement aujourd’hui, c’est quasiment du jamais vu. Le Club est un océan de calme, de tranquillité, de réflexion, de rationalité. Les fondations sont costaudes et Bruges a entamé la saison avec un budget de nonante millions, deux fois plus qu’Anderlecht. Et on ne parle même pas ici des soucis financiers des Bruxellois. Après le titre de 2017, le Sporting a terminé respectivement troisième, sixième et huitième. Bruges a été champion en 2018 et 2020, en finissant deuxième en 2019.
Après la joyeuse entrée de Marc Coucke et des années compliquées, Anderlecht s’en tient maintenant à une vision dont Vincent Kompany reste l’architecte. Il a l’occasion d’apprendre le métier avec une jeune équipe en phase d’apprentissage, et ça passe par des hauts et des bas. Quand on parle de bas, on pense par exemple à la raclée infligée par Bruges en octobre de l’année passée (3-0).
Même si la magie a un peu disparu, les chocs entre Anderlecht et Bruges restent des matches spéciaux. Imprévisibles. On se souvient de l’équipe brugeoise qui faisait des merveilles sous la conduite d’ Ernst Happel. Mais en 1977, le Club, champion en titre, avait pris une claque mémorable sur la pelouse d’Anderlecht (6-1). Après ce match, Happel avait déclaré que c’était terminé de jouer en zone. Il voulait passer au marquage individuel, ce que Bruges n’avait jamais fait. Finalement, il n’a pas changé son fusil d’épaule. Le Club a fini par coiffer un nouveau titre et s’est hissé cette saison-là en finale de la Coupe des Clubs Champions, la seule apparition d’une équipe belge à ce stade. En fait, c’est Anderlecht qui avait réveillé les Brugeois à temps.
Anderlecht a terminé ce championnat-là à la deuxième place, à un petit point de Bruges. Et a gagné la Coupe des Coupes.
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