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Pourquoi le Standard défend si bien (analyse)

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Souverain dans le choc wallon, le secteur défensif est l’un des points forts du début de saison liégeois. Analyse chiffrée de la forteresse construite par Philippe Montanier.

Charleroi n’était plus habitué à ça. Massés autant que possible dans les tribunes du Pays Noir, les supporters des Zèbres assistent au succès rouche avec la même impuissance que leurs poulains rayés. Au bout d’une heure trente, les hommes de Karim Belhocine n’ont cadré que deux fois. Le leader du championnat boucle la rencontre avec 0,68 expected goal. Depuis l’arrivée du Franco-Algérien à la tête de l’équipe, seul Bruges est parvenu à quitter les bords de Sambre avec un si faible total d’opportunités concédées. C’est dire à quel point la prestation défensive du Standard a des allures de chef-d’oeuvre.

Fraîchement installé devant la défense, Nicolas Raskin soulage son arrière-garde grâce à un volume de jeu hors-normes.

Si les statistiques d’une équipe dans sa propre moitié de terrain font rarement chavirer les coeurs des supporters, elles sont souvent celles qui comptent le plus à l’heure de régler l’addition. S’ils suscitent le souvenir des slaloms de Milan Jovanovic, des buts de Dieumerci Mbokani ou des numéros de styliste d’ Axel Witsel, les deux titres acquis au bout des années 2000 étaient avant tout construits de l’arrière. Dépassé par le Cercle en 2008, puis par Anderlecht et Gand en 2009 au le classement des meilleures attaques, le Standard a par contre été, à deux reprises, la défense la plus imperméable de l’élite. En deux ans et 76 sorties, les Rouches n’ont alors encaissé que 45 fois.

En quête de solidité défensive depuis le départ de Christian Luyindama, parfois maladroit ou déconcentré, mais toujours capable de rectifier des situations aux allures désespérées, les pensionnaires de Sclessin n’ont pas trouvé de sosie de leur colosse congolais. Suite au retrait de Michel Preud’homme, les décideurs liégeois ont donc décidé de confier leur avenir à un coach capable de construire un secteur défensif solide, atout presque indispensable pour s’inviter en haut du tableau national. Avec 32 clean-sheets rendues en 64 sorties à la tête du RC Lens, Philippe Montanier a l’étoffe du candidat idéal.

DEUX ARRÊTS POUR ARNAUD

La tâche du Normand est pourtant compliquée d’emblée par les trois matches de suspension de Zinho Vanheusden, patron de la ligne arrière qui paie une intervention trop impulsive lors du dernier match joué la saison dernière. En replaçant Mërgim Vojvoda aux côtés de Kostas Laifis en défense centrale, Montanier trouve une stabilité qui permet à ses nouvelles troupes de s’en sortir avec deux clean-sheets, un seul but encaissé et sept points au compteur. Fraîchement installé devant la défense, après une préparation impressionnante, Nicolas Raskin soulage son arrière-garde grâce à un volume de jeu hors-normes, et une agressivité qui lui permet d’interrompre les actions sans trembler, avec 3,29 fautes par rencontre. Quand on sait que l’an dernier, le classement des fautes commises était dominé par Ryota Morioka, on comprend mieux l’importance de la statistique.

Même si aux trois clean-sheets obtenues en quatre journées ont succédé quatre rencontres sans garder le zéro, le Standard est, après huit matches, l’une des meilleures défenses du championnat. Comme l’an dernier, les Liégeois ont encaissé six fois en 720 minutes, mais avec de véritables progrès enregistrés à plusieurs niveaux depuis le printemps. De 9,7 tirs concédés par match, les équipiers d’ Arnaud Bodart sont ainsi passés à huit cette saison. Et seules 29% de ces tentatives sont cadrées, contre 35 pour l’an II de l’ère Preud’homme. Ajoutez encore à cela que le pourcentage de tirs bloqués par la défense est passé de 22 à 28, et il ne reste, par match, qu’une moyenne de 2,34 tirs qui sollicitent une intervention du dernier rempart sorti de l’Académie.

En 2019-2020, les talents de Bodart étaient mis à contribution 3,64 fois par rencontre. Les chiffres du gardien des Rouches se rapprochent de ceux de Nicolas Penneteau, portier le moins alerté de l’élite cette saison. En conservant un pourcentage d’arrêts semblable à l’année passée (autour des 70%) malgré des gants moins employés, le numéro 1 entre les perches de l’Enfer confirme sa progression et pose la cerise sur le gâteau de la progression défensive de ses couleurs.

L’INTENSITÉ PAR MONTANIER

Si le pressing haut que semblait vouloir installer Philippe Montanier en début de préparation n’a pas encore contaminé le secteur offensif liégeois, l’intensité exigée par le Normand dans l’effort défensif n’a par contre pas connu le stade du compromis. Les chiffres de sa période lensoise étaient déjà un indicateur de l’importance que le Français accorde à cet aspect du jeu, puisque ses Sang et Or étaient la meilleure équipe de Ligue 2 en termes de challenge intensity, une statistique qui additionne le nombre d’actions défensives (tacles, duels ou interceptions) tentées par minute de possession adverse. Treizième de la spécialité la saison dernière en Pro League, le Standard se situe désormais au pied du podium dans le domaine, avec des chiffres semblables à ceux de Bruges.

La saison dernière, les hommes de Preud’homme étaient ceux qui disputaient le moins de duels défensifs par rencontre au sein de l’élite belge. Un chiffre en légère augmentation depuis la prise de pouvoir de Montanier, avec des conséquences positives sur l’intransigeance défensive liégeoise, étant donné les profils de Raskin, Vanheusden ou Collins Fai, dont le dynamisme est précieux en un-contre-un. Avec 65,2% de duels défensifs remportés, le Standard est d’ailleurs la référence nationale en la matière. De quoi protéger encore mieux les abords du but d’Arnaud Bodart, qui se charge désormais du reste quand l’adversaire est contraint de prendre sa chance à distance. Trompé à sept reprises en-dehors de sa surface l’an dernier, le gardien des Diablotins ne s’est pas encore retourné sur une frappe de loin depuis le coup d’envoi du nouvel exercice.

Un cocktail défensif qui commence à ressembler à la recette d’une saison réussie.

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