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Le dessert tactique #4 : le plan de l’Union, le verrou de Charleroi et la possession sans défense de Bruges

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Retour en cinq temps sur les observations tactiques du week-end sur les pelouses de Pro League.

Comment Charleroi a verrouillé sa surface ?

Trois buts encaissés face à OHL avant la trêve, trois autres au Bosuil pour la reprise : les performances défensives des Zèbres n’étaient pas de nature à rassurer Edward Still. « Instinctivement, j’allais parler des équipes qui défendent bien », répondait pourtant le Brabançon quand on lui demandait ce qui lui avait naturellement plu quand il a commencé à s’intéresser au jeu. Trop passif défensivement autour des fêtes, Charleroi s’est ressaisi lors des quatre dernières rencontres. Contre Gand, Courtrai, Saint-Trond puis Seraing, les Hennuyers n’ont jamais concédé plus d’un expected goal par nonante minutes. Seul Courtrai est parvenu à tromper la vigilance de Bingourou Kamara, convertissant l’une des deux seules big chances (occasion de valeur supérieure à 0,2 xG) laissées par les Carolos sur les 360 dernières minutes de jeu.

L’incarnation de cette nouvelle puissance défensive, c’est sans doute Valentine Ozornwafor. Pas toujours brillant au pied mais colossal dans les duels, le défenseur nigérian a des airs de sentinelle à l’ancienne, veillant sur sa surface sans relâche et y jouant de tout son corps pour dévorer les attaquants adverses. Collectivement, le pressing est également monté d’un cran en intensité, avec un coaching très bruyant de Still à la perte du ballon pour accompagner l’énergie défensive de ses troupes. La recette a rapproché Charleroi du top 4. À voir si elle portera également ses fruits quand le niveau de l’adversité augmentera d’un cran.

Daan Heymans, buteur ce vendredi contre Seraing.
Daan Heymans, buteur ce vendredi contre Seraing.© belga

Pourquoi le losange de l’Antwerp a pris l’eau face à l’Union ?

Challenger le plus proche du leader, le Great Old était devant ses supporters pour relancer le championnat. Le matricule 1 n’a pourtant jamais existé face à une Union conquérante et ambitieuse. Le losange installé par Brian Priske au milieu de terrain aurait dû garantir une supériorité numérique aux Anversois face à l’un des secteurs forts du onze saint-gillois mais une fois de plus, le plan défensif de Felice Mazzù était minutieusement cuisiné pour dévorer le club de Paul Gheysens.

Priske avait pourtant opté pour Koji Miyoshi afin de créer la surprise entre les lignes. Atteindre le Japonais était certes un gage de danger, mais aussi une mission périlleuse. Alignés sur les flancs unionistes, Guillaume François et Bart Nieuwkoop ont fermé l’intérieur du jeu bien plus que d’habitude, laissant Lazare Amani ou Teddy Teuma sortir mordre les chevilles des latéraux anversois. Tout était fait pour amener les centraux locaux à jouer un long ballon dans des nuages où Christian Burgess fait toujours la loi. Une fois le ballon récupéré et envoyé vers les attaquants bruxellois, les milieux de l’Union activaient leurs désormais classiques courses diagonales dans la profondeur, pour complètement désorienter le losange anversois.

Où en est Alfred Schreuder dans sa création du nouveau Bruges ?

Arrivé entouré de promesses de jeu dominant, le mentor néerlandais du club patine plus qu’il ne déroule depuis son arrivée dans la Venise du Nord. Malmenés par l’Union, bousculés puis battus par Gand, les Blauw en Zwart semblent chercher leurs repères dans ce nouveau système de jeu qui ne met que trop peu de leurs joueurs-clés dans de bonnes dispositions.

Si la liberté offerte à Charles De Ketelaere est un bénéfice pour le wonderboy (trois buts et une passe décisive depuis la reprise), le plan fait dangereusement disparaître un Hans Vanaken contraint à être plus contrôleur que créateur, et rend le dos de Tajon Buchanan presque plus dangereux que ses prises de balle.

Quand l’adversaire peut compter sur des joueurs de qualité pour mener les transitions et exposer la fragilité de l’organisation brugeoise, les dégâts sont presque instantanés sur une défense surexposée et dénuée d’un profil correcteur de situations d’urgence comme celui d’Odilon Kossounou la saison dernière. Le plus grand problème, c’est sans doute que ce Bruges se comporte avec le ballon comme s’il n’allait jamais le perdre.

Comment Kerim Mrabti est devenu le symbole d’un Malines liquide ?

Depuis la saison dernière, le secteur offensif de Wouter Vrancken est une curiosité nationale. Une sorte d’aquarium rectangulaire où chacun semble nager comme bon lui semble, sans pour autant jamais laisser une trop grande portion aquatique déserte. Si l’arrière droit se charge généralement de son couloir et que Nikola Storm aime partie du côté gauche pour conclure ses actions, les autres animateurs offensifs du KaVé brillent surtout par leur faculté à apparaître dans différentes positions. Hugo Cuypers est un attaquant plutôt mobile, Maryan Shved aime se présenter à l’intérieur du jeu et Rob Schoofs s’infiltrer à hauteur de la défense adverse. Et puis, il y a Kerim Mrabti.

Capable de jouer sur les flancs comme entre les lignes, en faux neuf ou en vrai milieu de terrain, le Suédois n’a pas vraiment de position. Il est tout simplement là où le jeu le demande. Un flaireur d’espaces comme il y en a peu, qui décèle les brèches créées par les mouvements de ses coéquipiers et s’y engouffre pour pénétrer la muraille défensive adverse. Souvent avec réussite.

Karim Mrabti, un homme qui sent l'espace comme personne.
Karim Mrabti, un homme qui sent l’espace comme personne.© belga

Pourquoi Eupen relance-t-il encore court ?

Il y a désormais neuf mois que Beñat San José a quitté les cantons de l’Est. Un délai insuffisant pour accoucher de nouveaux principes, mais assez long pour oublier la raison d’être des précédents. Méticuleux apôtre du jeu de position, le Basque aimait voir ses joueurs disposés précisément sur le terrain, évoluant ligne après ligne jusqu’à des ailiers chargés de faire la différence dans des duels créés par le système. Brillants quand ils ont été libérés d’un plan parfois trop contraignant, les Pandas se sont éteints progressivement quand leurs idées ont perdu de leur relief par manque de répétition.

Aujourd’hui, Eupen sait-il encore pourquoi il relance court ? Les deux premiers buts concédés face à Anderlecht permettent de se poser la question. Les circuits de passes semblent rouillés, et rappellent un principe essentiel du jeu : relancer de l’arrière ne doit pas être qu’un effet de mode, mais doit partir d’une intention qui aide à s’approcher du but adverse. Ce qui n’empêche évidemment pas les erreurs, comme l’a montré le seul but des Germanophones en exploitant une mauvaise relance mauve, mais évite de s’exposer sans savoir quel bénéfice en tirer.

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