Swann Borsellino

La chronique de Swann Borsellino: France-Belgique, voyage en terre (in)connue

Charles De Ketelaere, Julian Alaphilippe. L’un porte les rayures bleues et noires à la verticale, l’autre l’arc-en-ciel à l’horizontale. Leur beau costume d’ambassadeurs qu’ils ont été des relations franco-belge de la rentrée 2021. Une rentrée sous le signe de la performance sportive, celle qui donne envie de s’acheter un chapeau juste pour pouvoir leur tirer. À la mi-septembre, pour la reprise de la Ligue des Champions et alors qu’elle se cherche un.e nouveau.elle président.e de la République, la France aurait bien glissé le nom de De Ketelaere dans l’urne après avoir passé une heure et demie pendue à ses pieds, lors d’un récital donné face au Paris Saint-Germain. Quelques jours plus tard, dans une ambiance que toute la France a salué et aurait aimé sentir – et même boire – Loulou Alaphilippe s’est imposé à Louvain au terme d’une course exceptionnelle, que les amoureux de la petite reine belges ont salué. Des bagarres qui ont marqué le calendrier de la rentrée sportive sur lequel beaucoup ont coché la date du 7 octobre, jour des retrouvailles entre les Diables rouges et l’équipe de France, à Turin, pour les demi-finales de la Nations League. Un premier affrontement plus de trois ans après s’être quittés en terres russes. Un nouveau combat qui me réjouit, ne serait-ce parce que celui-ci aura bien lieu sur le terrain, avec les joueurs pour seuls protagonistes. Un voyage en terrain connu aux allures de voyage en terre inconnue tant le football et les forces en présence des numéros 1 et 4 mondiaux ont changé depuis leur dernière bataille.

Plus le temps passe, moins un Belgique-France est quelconque pour moi.

En 2018, je l’attendais impatiemment. À l’EURO 2021, je le redoutais très sérieusement. Aujourd’hui, je l’accueille très sereinement. Pourtant, plus le temps passe, moins un Belgique-France est quelconque pour moi. Mais je crois qu’en termes d’intensité, de stress et d’incertitudes, on ne battra pas ce 10 juillet 2018. Les équipes étaient magnifiques, les projecteurs braqués sur la plus belle scène du monde et l’air irrespirable. Puis est arrivé l’EURO. Là, en termes de médiocrité, de toxicité et finalement de déception sportive, les records ont été battus. La France et son orgueil, balayés en huitième de finale. La Belgique éliminée en quart après une compétition presque neutre. Et le spectacle des réseaux sociaux et des « médias » des deux camps, venus rajouter à ces médiocres parcours un peu plus de tristesse. Depuis, l’été a pansé quelques plaies et la rentrée est venue nous rappeler à nos devoirs. La première trêve internationale a laissé une impression étrange, qui veut que la Coupe du monde 2022 soit à la fois trop loin et trop proche. Un sentiment partagé, en Belgique comme en France, avant cette demi-finale de Nations League. Le casting ne sera pas le même qu’en 2018, pas plus que la dynamique. En effet, à Turin, se retrouveront deux équipes dépeintes comme des soeurs ennemies, mais qui ont plus intérêt à se serrer les coudes qu’à se mettre sur la gueule. Respectivement premiers et quatrièmes au classement FIFA, Diables et Bleus n’ont plus l’avance qu’ils semblaient avoir sur d’autres nations il y a trois ans. L’Italie et l’Espagne, qui s’affrontent dans l’autre partie du Final Four, mais aussi l’Angleterre, le Portugal, l’Allemagne ou l’Argentine, sont autant de concurrents qui bossent en vue de 2022. Ce 7 octobre, la France qui retrouvera la Belgique n’est plus aussi valeureuse et enthousiaste que l’année de son sacre mondial. Ce 7 octobre, la Belgique qui retrouvera la France n’est plus aussi solide et n’a pas les mêmes leaders que l’année où elle aurait pu décrocher sa première étoile.

C’était sans doute plus pratique de chaque côté de mon Thalys: ces derniers temps, au moment d’évoquer le France-Belgique, on a souvent préféré parler de tout sauf de football. Pourtant, la seule certitude qui émerge au moment de préfacer ce match, c’est qu’il va faire parler. Pour le reste, les hommes de Didier Deschamps, très peu convaincants en post-EURO, n’ont rassuré que lors d’une modeste intermittence face à la Finlande. Pas suffisant par rapport aux attentes qu’a suscité le trio MbappéGriezmannBenzema, qui a laissé le premier en perdition en Bleu, le second en club et le troisième avec le sentiment d’être le grain de sable dans la mécanique française malgré un bon bilan personnel. Privés de N’Golo Kanté, garant de l’équilibre d’un onze qui peine à se transformer en équipe offensive, les Français attendent de ce gros match un vrai test. Côté belge, où on a réussi l’exploit de banaliser les victoires tranquilles lors des campagnes éliminatoires, on va enfin pouvoir se frotter à une équipe capable de profiter d’éventuelles difficultés défensives. Un vrai challenge pour les hommes de Roberto Martínez, qui n’ont pas toujours été rassurants dans ce secteur. Finalement, le plus excitant dans cette rencontre, c’est qu’on connaît autant l’adversaire qu’on s’ignore soi-même. Donnez-nous un gros match, c’est tout ce dont cette rivalité a besoin. Merci d’avance.

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