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Qui est Johan Bakayoko, le nouveau grand talent belge du PSV Eindhoven ?

Les débuts de Johan Bakayoko en Belgique n’ont pas été couronnés de succès, mais trois ans après son transfert en U17 au PSV, l’ailier frappe à la porte de l’équipe A. Retour sur le parcours d’un jeune homme dont on va entendre parler.

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Le Jeune Joueur de l’Année est Johan Bakaya… Bakayoko! » Après avoir ouvert l’enveloppe, Louis Van Gaal a eu un peu de mal à lire le nom du vainqueur, mais le sélectionneur néerlandais a ensuite posé pas mal de questions à un Bakayoko à la fois sûr de lui et très respectueux. Van Gaal est un showman. Lorsqu’il était à Manchester United, il a réussi à faire adopter par les anglais des expressions comme « une hirondelle ne fait pas le printemps. » Lorsque Bakayoko affirme que la formation aux Pays-Bas est meilleure qu’en Belgique, Van Gaal répond sèchement: « Je suis d’accord avec toi. »

Ma chance viendra et ce jour-là, je devrai répondre présent. » Johan Bakayoko

Mais Bakayoko n’est pas le genre de jeune joueur belge qu’un club comme Lille, le PSV ou l’Ajax a sorti très tôt de son environnement familial. Il avait déjà seize ans lorsqu’il est arrivé à la PSV Academy, après être passé par OH Louvain, le Club Bruges, le FC Malines et Anderlecht. En principe, il devrait être à présent dans le noyau A du Sporting, aux côtés de Mario Stroeykens et Zeno Debast, mais un concours de circonstances l’a amené au Philips Stadion. « Il y a quelques années, on ne pouvait proposer un premier contrat aux jeunes joueurs qu’à partir de leur seizième anniversaire », raconte Roel Clement qui, à l’époque, entraînait Bakayoko en U16. Johan n’en était qu’à sa première saison chez nous et il lui a fallu plusieurs mois avant de s’intégrer tactiquement et collectivement. On a donc voulu attendre un an de plus avant de lui proposer quelque chose. On était contents de lui et on n’avait pas fait une croix dessus, mais il était un peu impatient. Il a donc décidé de partir au PSV. »

Renvoyé par Bruges

C’est à l’ombre du Jan Breydelstadion que Bakayoko a découvert les premiers aléas du football. Après une saison en U13, où il faisait partie de la génération de Lynt Audoor, l’attaquant a été renvoyé parce que son attitude ne cadrait pas avec la mentalité No sweat, no glory. Son ancien équipier Arn Spiessens se souvient encore qu’avec quelques joueurs plus âgés, comme Loïs Openda, ils faisaient le mur pour aller manger un kebab à la gare ou aller au salon de coiffure. Mais si Bakayoko était venu à Bruges, c’est parce qu’il voulait devenir professionnel. « Parfois, il devait évacuer à l’entraînement la frustration accumulée à l’école », dit Spiessens, qui évolue aujourd’hui en D2 amateurs au RC Malines. « Un jour, ça s’est mal passé. Il s’est heurté à quelques joueurs et on a fini par le renvoyer de l’entraînement. Pour moi, c’est la preuve qu’il en voulait déjà. Moi, à treize ans, je ne supportais pas l’internat, je téléphonais chaque jour à mes parents. Mentalement, j’ai craqué. Johan était différent: il se contentait d’un ou deux coups de fil à la maison par semaine. »

Johan Bakayoko au duel avec Justin Ogenia du FC Eindhoven durant la préparation.
Johan Bakayoko au duel avec Justin Ogenia du FC Eindhoven durant la préparation.© GETTY

À Bruges, l’ailier droit d’Overijse ne sortait pas du lot, mais contre les grandes équipes, il répondait toujours présent. Après un détour de deux ans par le FC Malines, il s’est fait remarquer par Anderlecht, qui avait repéré qu’il était plus rapide que les joueurs de son âge. « Il a obtenu du temps de jeu grâce à des actions individuelles », dit Clement. « Ses buts étaient toujours de très belle facture: il rentrait dans le jeu et tirait du gauche. Mais il lui arrivait parfois de ne pas regarder autour de lui. Je dois admettre que j’ai été très dur et sévère avec lui. Certains joueurs supportent difficilement cela, mais pas lui: il acceptait la critique. Je savais que c’était le meilleur moyen pour qu’il se mette en évidence. »

J’ai été très dur et sévère avec lui. Certains joueurs supportent difficilement cela, mais pas lui: il acceptait la critique. » Roel Clement, son coach en U16 à Anderlecht

17 buts en D2

En Belgique, Bakayoko avait la réputation d’être un blagueur, un joueur talentueux mais incompris ou un équipier bruyant, parfois trop enthousiaste. Avec les Espoirs du PSV, sous la direction de Peter Uneken, c’est devenu un joueur collectif qui ne pense pas seulement à attaquer, mais qui travaille dur pour récupérer le ballon ou aider l’arrière latéral. Au cours de la saison 2020-2021, il est passé partiellement des U18 aux Espoirs et a compris qu’il n’était plus la plaque tournante de l’équipe. « Les débuts ont été difficiles, tout allait plus vite, le jeu était plus physique et les défenseurs étaient plus résistants », dit Uneken qui, lors de l’été 2021, est devenu entraîneur-adjoint au RKC Waalwijk. « En fait, il voulait passer le plus vite possible dans le noyau A. Je lui ai conseillé de se donner du temps et il ne l’a pas accepté facilement. Il n’a explosé qu’après la trêve hivernale. Son rendement fut alors nettement meilleur. En équipes d’âge, un joueur est dangereux dix à quinze fois par match. Johan a vite compris qu’en D2 (où évoluent les Espoirs du PSV, ndlr), il n’aurait peut-être que cinq occasions de se mettre en évidence et qu’il serait jugé sur ces phases. »

Après ses débuts en Espoirs du PSV, avec un but en 19 matches, on a parlé de lui au RKC Waalwijk, un club de l’élite. Le transfert a capoté pour plusieurs raisons, mais après 17 buts et douze assists, il ne fait aucun doute qu’il aura sa chance en équipe A la saison prochaine. Roger Schmidt, désormais remplacé par Ruud van Nistelrooy, ne lui a pas fait confiance. Ça a énervé plusieurs personnes au sein du club, mais Bakayoko est resté calme. « Ma chance viendra et ce jour-là, je devrai répondre présent. »

Noeud papillon rouge

En juin, c’est avec le même enthousiasme et la même confiance qu’il a entamé la préparation avec le noyau A. En raison du départ de Ritsu Doan et du changement de position de Yorbe Vertessen, Bakayoko est deuxième dans la hiérarchie des ailiers droits. Son seul concurrent, c’est Noni Madueke, un Anglais arrivé en 2018. « En principe, Madueke va entamer la saison comme titulaire », dit Marco Timmer, de Voetbal International. « Il est plus avancé et plus efficace que Bakayoko, tant pour rentrer dans le jeu que pour déborder. La question est surtout de savoir qui s’adaptera le plus rapidement au style de jeu de Luuk de Jong? Tant Madueke que Bakayoko préfèrent rentrer dans le jeu et tirer. Or, De Jong veut des centres, il doit être le point de chute des actions offensives. Celui qui veut remporter la lutte devra pouvoir déborder afin d’alimenter De Jong au maximum. »

Lors de la signature de son premier contrat pro, à l’été 2019, Bakayoko est arrivé en costume noir et noeud papillon rouge, ce qui a fortement impressionné les employés du PSV. On a même dit qu’il était mieux habillé que le directeur technique, John de Jong. Le 14 septembre dernier, lorsqu’il a prolongé jusqu’en 2025, il portait un smoking blanc et un noeud papillon rouge. On se demande quel costume et quels accessoires il revêtira lors de la prochaine étape de sa carrière.

Un réservoir de jeunes talents

Dries Mertens (AGOVV), Quincy Promes (Go Ahead Eagles), Denzel Dumfries (Sparta Rotterdam), Frenkie de Jong (Jong Ajax), Perr Schuurs (Jong Ajax), Ferdy Druijf (Jong AZ) et Micky van de Ven ont tous remporté le trophée du Talent de l’Année de D2 néerlandaise. À l’une ou l’autre exception près, tous ces lauréats ont fait carrière aux Pays-Bas ou à l’étranger. En 2021, trois mois après avoir reçu le trophée, Van de Ven quittait le FC Volendam pour Wolfsburg, en Bundesliga. Johan Bakayoko est le énième joueur à succès de la Keuken Kampioen Divisie, un championnat qui permet à de futurs grands joueurs (européens) de progresser. Ce n’est pas une salle d’attente ordinaire pour des joueurs hyper talentueux ou un mouroir pour des joueurs en fin de carrière. « Quand on voit les clubs qui évoluent dans ce championnat cette saison – ADO Den Haag, De Graafschap, Heracles, NAC, PEC Zwolle, Roda JC et Willem II – on comprend que la série est très forte », dit Rik Elfrink, qui suit le PSV pour l’Eindhovens Dagblad. « Les clubs de la première colonne pourraient facilement jouer entre la dixième et la 18e place en Eredivisie, sans que le niveau de celle-ci ne chute. Je voudrais dire à chaque joueur et à chaque entraîneur qu’il doit s’attendre à souffrir. Le niveau est très élevé, les matches sont diffusés en direct à la télévision et suivi par les médias. Des jeunes comme Bakayoko en profitent. »

Au PSV, Steven Bergwijn, Donyell Malen, Cody Gakpo et Noni Madueke ont inscrit beaucoup de buts en peu de temps avec les jeunes du PSV avant de forcer les portes de l’équipe première. Bakayoko fera-t-il aussi bien? En Espoirs, il était de loin le meilleur joueur de la saison, ce qui laisse entrevoir des perspectives. « Un jeune comme Sam Lammers a dû passer par Heerenveen avant de recevoir sa chance au PSV. Comme Gakpo, Bakayoko peut devenir directement titulaire au PSV », affirme Timmer. « On pourrait dire que ses 17 buts ne valent pas grand-chose, mais il a beaucoup marqué face aux grandes équipes. »

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